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Années 1970 : les livres

Top des tops : les incontournables de la décennie. La littérature a droit aussi à son palmarès !

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Années 1920 ...

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30 livres

créée il y a plus de 11 ans · modifiée il y a environ 2 mois
La Vie mode d'emploi
7.9
1.

La Vie mode d'emploi (1978)

Sortie : 1978 (France). Roman

livre de Georges Perec

bilouaustria a mis 10/10.

Annotation :

La vie d'un immeuble, les pièces d'un puzzle. "La vie mode d'emploi" est surtout une version moderne des "Mille et une nuits". Des histoires à en pleuvoir, des centaines de personnages, des milliers d'idées, du plaisir en barre ! Encore une fois, la contrainte semble stimuler l'imagination. Livre-Monde qui va au bout de lui-même en épuisant TOUS les sujets, peut-être le plus grand roman français, Perec conseillait de le lire à plat ventre sur son lit.

Le Cul de Judas
7.8
2.

Le Cul de Judas (1979)

Os cus de Judas

Sortie : septembre 2006 (France). Roman

livre de António Lobo Antunes

bilouaustria a mis 9/10.

Annotation :

Le cul de Judas, c'est bien sûr l'Angola où le jeune Lobo Antunes s'est retrouvé de 1971 à 1973 comme médecin. Alors oui, ce deuxième roman est fortement autobiographique, il recèle de ces détails que l'on invente pas et qui transforment un livre. Il y a un art de la métaphore ici, chaque image frappe par sa justesse. Surtout, Lobo Antunes a déjà formellement l'envergure d'un très grand écrivain, que ce soit dans la structure du récit, le temps d'une nuit blanche entre des verres de toutes sortes d'alcools, le temps d'une longue confession, d'un monologue éminemment littéraire ou celui de ses phrases-pièges qui enferment celui qui approche. Mais rien n'étouffe cette forme, les phrases qui dansent autour de la mort, les virgules, les sauts de puce, d'une idée à l'autre, parce qu'on ne raconte pas l'enfer d'un trait, pas de face. Rien n'étouffe tout à fait cette forme qui aurait pu être trop sophistiquée ou trop prétentieuse pour que la vie puisse y trouver une place, et pourtant, passé les premières minutes de confusion, parce qu'on cherche à rentrer dans la phrase comme dans un rouleau, passé cette stupeur, nous sommes portés par la vague des allers-retours, du sang, des armes, de l'attente, de l'absurdité. C'est "Voyage au bout de la nuit", mais apaisé, conscient de tout, revenu de tout, hanté, documenté. Il y en a des livres sur la guerre, ils sont forts à leur manière, mais "Le cul de Judas" porte en lui la forme idéale pour dire les mots et les dire sans laisser le temps au lecteur de reprendre son souffle, de tricher et de refuser l'obstacle. Il nous prend par la main une fois pour toute, nous prévient à peine de ce qui nous attend, et l'horreur surgit dans toute sa simplicité, belle et tragique.

L'Établi
8.4
3.

L'Établi (1978)

Sortie : 1978 (France). Récit

livre de Robert Linhart

bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Texte court et politique extrêmement puissant sur l’expérience d‘un intellectuel travaillant à la chaîne chez Citroën. Du travail en soi, aux rapports de classe, de hiérarchie, jusqu’à l’organisation d‘une grève et la préparation des tracts, un livre époustouflant, tendu comme une flèche, toujours juste, précis, écrit 10 ans après les faits (Linhart a laissé mûrir, il y a mis tellement de lui-même). Les émotions, la fatigue, les relations entre collègues, la perversité des chefs, on vit un peu plus d‘un an dans ce milieu étouffant, en embrassant dans un même regard le quotidien de l’ouvrier et des questions plus essentielles sur le capitalisme, le micro et le macro. Une lecture indispensable.

Octaèdre
7.9
4.

Octaèdre (1974)

Sortie : 1976 (France). Recueil de nouvelles

livre de Julio Cortázar

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Rêves, mémoire, fantastique mais pas vraiment... Nous sommes à la lisière d'un monde inquiétant et obsédant, en terres Cortázariennes. "Manuscrit trouvé dans une poche", le Cortázar parisien tardif, qui crée du nouveau avec trois bouts de ficelle, nous plonge dans ses jeux et phantasmes en un clin d'oeil, sans avoir recours à tout un appareil dépassé de suggestions, de bruits de portes qui couinent etc. On a de loin dépassé la littérature de genre, nous voilà dans un bain angoissant de modernité, oubliez Borges, ces huit textes sont des sommets qui n'appartiennent qu'à leur auteur !

Tais toi je t'en prie
7.6
5.

Tais toi je t'en prie (1976)

Will You Please Be Quiet, Please?

Sortie : juin 1991 (France). Roman, Recueil de nouvelles

livre de Raymond Carver

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Pour commencer, cette merveille de titre : "Will you please be quiet, please". Du Carver quoi. Alors oui, on connaît l'histoire : Gordon Lish, l'éditeur, repassait méchamment derrière les copies de son poulain (Carver parle d'amputations) jusqu'à ce que, une fois le superflu nettoyé, ne reste que la prose à vif. Le résultat est et reste encore le modèle d'écriture US aujourd'hui : concis, diablement efficace, cette vie de banlieue sans relief est croquée en deux phrases ou quelques lignes d'un dialogue mordant, on comprend que Carver ait fait tant d'émules. 21 petites merveilles de nouvelles nerveuses.

JR
8
6.

JR

Sortie : 1975 (France). Roman

livre de William Gaddis

bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Dans le capharnaüm de Gaddis et de ces 1060 pages, les voix se superposent. On parle : dialogues, soliloques, publicités, radios, chansons, téléviseurs etc. Et ces mots, d'où qu'ils viennent, s'impriment sur la page comme une succession de bruits et d'impressions à peine distinctes. Si bien que le résultat est à la fois relativement illisible et totalement génial. La psychologie est aux portés disparus. Les mots parlent pour eux. Et pour ne rien gâcher, JR est férocement drôle : voilà un gosse de onze ans foutrement malin qui devient le nouvel empereur du capitalisme. Un roman sur l'argent, un roman sur l'Amérique.

Le Souffle
8
7.

Le Souffle (1978)

Der Atem

Sortie : juin 2007 (France). Autobiographie & mémoires

livre de Thomas Bernhard

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Bernhard, dix-huit ans, allongé sur un lit grinçant dans ce dortoir de vingt-six lits qui est en réalité un mouroir. De sa cage thoracique on retire des litres et des litres d'un liquide épais jaune grisâtre avec lequel on remplit des récipients ressemblant étrangement à des bocaux à cornichons. Dans le même temps, dans le même hôpital, se meurt son grand-père, son mentor, son guide intellectuel. Le scalpel de Bernhard est toujours aussi aiguisé, incisif, et coupe avec précision dans des grands morceaux de phrases flottantes. Son oeuvre autobiographique est peut-être son chef d'oeuvre. Cette pièce une partie majeure du tout.

Le Chant du bourreau
7.6
8.

Le Chant du bourreau (1979)

The Executioner's Song

Sortie : 1980 (France). Roman

livre de Norman Mailer

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Comme dans De sang froid de Capote, il y a ici une puissante fascination pour le tueur et sa psyché et Gary Gilmore est charismatique et intrigant, qu’on le veuille ou non. De part ses talents de dessinateur notamment, son don, sa culture, et également par ailleurs son caractère autodestructeur, chaque page où il apparaît capte notre attention. Mailer, malgré sa personnalité très forte, peut-être ayant conscience qu’il vaut mieux laisser la lumière à son sujet principal, décide de ne pas se mettre en scène dans le livre et de simplement, comme un journaliste omniprésent, capter toutes les scènes, tous les moments, tous les dialogues, pour restituer une somme colossale sur cette affaire. Il en obtient finalement 1300 pages mais il prétend que les transcriptions de tous les entretiens qu’il a écoutés et utilisés pour son livre représenteraient près de 15000 pages… Il a mérité son Pulitzer ! Son compte-rendu des événements embrasse de nombreux aspects de l’enquête et du procès : des questions morales, le travail de la justice et ses limites, le rôle des médias, l’argent qui a flotté autour de la victime et sa brève célébrité, sa relation belle et malsaine avec son amie etc. Mailer n’évite rien, il veut au contraire que tout y soit, que son livre soit un monde complet qui contiendrait tout. Quand on connaît son égo surdimensionné (et le projet en lui-même en est sûrement la preuve), il y a quand même une certaine modestie à approcher aussi humblement ce travail colossal, à rencontrer les gens, à poser les questions, à écrire des centaines et des centaines de pages. C’est peut-être son plus grand livre, un sujet à sa taille, mais où il arrive à s’effacer suffisamment pour donner son plein talent en cherchant l’efficacité et une forme complexe et riche de vérité.

La Couronne de plumes
7.6
9.

La Couronne de plumes (1974)

et autres nouvelles

A Crown of Feathers and Other Stories

Sortie : 1976 (France). Recueil de nouvelles

livre de Isaac Bashevis Singer

bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Bashevis Singer est un magicien, un conteur hors-paire, qui nous fait croire aux miracles, aux fantômes, aux doubles... Alors nous voilà sous l'édredon à écouter ces milles légendes, il y a presque quelque chose d'enfantin, on se laisse porter par ses récits tous plus fabuleux les uns que les autres, ces contes de tradition juive mais à vocation universelle. Le style est subtile, drôle, inquiétant, peu importe : à la fin, c'est le plaisir de l'histoire qui reste et celui de la lecture à haute voix.

Surveiller et Punir
8.1
10.

Surveiller et Punir (1975)

Sortie : 20 février 1975. Essai, Histoire

livre de Michel Foucault

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

L'écriture de Foucault ne fait pas d'étincelles comme celle de Lévi-Strauss ou de Baudrillard : il cherche avant tout à être clair, précis, à être entendu. Et procède d'abord comme historien, rappelant l'histoire des supplices en France, puis comment on est passé des corps aux âmes. Couper la main du voleur n'est d'un pur point de vue économique, pas viable : voilà une des raisons pour lesquelles la prison s'affirme avant de devenir indispensable. Avec elle la discipline, sorte de précepte qu'on utilisera bientôt à toutes les sauces dans notre société parce qu'elle assure une optimisation du rendement : la discipline à l'école, au bureau, à l'hôpital etc. C'est seulement dans sa dernière partie que la pensée de Foucault ose délaisser sa pose objective pour devenir plus subversive. En constatant l'échec du système carcéral, Foucault note aussi la complaisance et même finalement l'intérêt de l'Etat. Créer un circuit parallèle où les délinquants restent entre eux, où l'économie marchande avec l'illégalisme, où le cercle vicieux est fermé par ceux même qui ont crée les prisons. Essai majeur qui aide à penser le quotidien, avec un prisme bien plus large que le seul aspect pénal.

La Société de consommation
7.7
11.

La Société de consommation (1970)

Sortie : 1970 (France). Essai

livre de Jean Baudrillard

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Baudrillard comprend immédiatement (pressent, Baudrillard pressent toujours) que la société de consommation est partout, infuse tous les domaines, du supermarché à la publicité en passant par le pop art, les relations humaines, le kitsch, le secteur tertiaire etc. Premier texte majeur du sociologue, il s'embarrasse encore de sources et de notes de bas de pages, mais ses formules fulgurantes (et littéraires parfois, musicales dans leurs paradoxes) apparaissent déjà et ne laissent pas de doutes quand au regard visionnaire et très peu conventionnel (ou scientifique) de ce penseur singulier. Je préfère sûrment encore ses livres suivants, quand son style et sa pensée (les deux coexistent bien entendu) se radicalisent encore davantage et touchent à une forme d'épure intuitive. La modernité de "La société de consommation", quoi qu'il en soit, frappe et les années ont systématiquement donné raison au prophète Jean.

La Cave
7.8
12.

La Cave

Der Keller

Sortie : 1976 (France). Autobiographie & mémoires

livre de Thomas Bernhard

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Texte autobiographique et charnière où Bernhard décrit, dans son style reconnaissable entre mille, comment à l'adolescence il abandonne le lycée pour travailler chez un petit commerçant d'une cité de Salzbourg. Choix salutaire, alors que l'éducation traditionnelle était semble-t-il faîte pour le rendre fou. Il se découvre aussi une voix, au sens propre d'abord (un talent pour le chant), puis peut-être plus figuré (une possible sensibilité artistique). Où son grand-père joue également un rôle capital de soutien moral et de figure tutélaire.

Le Combat du siècle
7.8
13.

Le Combat du siècle (1975)

The Fight

Sortie : octobre 2000 (France). Récit

livre de Norman Mailer

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Quand Mobutu invite Ali et Foreman à boxer à Kinshasa pour 5 millions de dollars chacun, on se frotte les mains. Quand Norman Mailer, l'égo le plus boursouflé du siècle (avec, tiens tiens... Ali et Mobutu probablement), entreprend de nous narrer ces semaines dantesques, on tient de l'or en barres. Les anecdotes fleurissent de partout, des conférences de presse où Ali lit de la poésie aux rumeurs sur les assassinat commis dans le stade quelques semaines auparavant, et le style de Mailer, parlant de lui à la troisième personne comme le champion littéraire, l'équivalent intellectuel de ces athlètes, Mailer direct, piquant, alerte, jamais pris en défaut, toujours la métaphore juste. Un coup fait-il un peu de philosophie africaine, puis il partage son expertise de boxeur amateur, et part faire un footing avec Muhammad Ali à 3h du matin dans la savane ! La tension monte tout du long jusqu'à l'apothéose du combat (40 pages seulement) et l'orage insensé qui éclate dans les minutes suivantes. Le plus grand livre jamais écrit sur le sport, rien que ça.

Ida ou le délire
7.8
14.

Ida ou le délire

suivi de Le résumé

Sortie : 1973 (France). Roman

livre de Hélène Bessette

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Ida, le mot. Et Ida la personne. Derrière le mot. Et les mots des autres, qui parlent de la personne derrière le mot. De mots, d'Ida, nous n'en avons pas ou si peu. "Je suis un oiseau de nuit". Ce sont ses mots, les seuls. Le reste c'est la mort d'Ida, et les mots qui racontent la mort d'Ida. Les autres qui racontent Ida avec leurs propres mots. Ida qui apparaît plus ou moins dans les mots des autres, dans les mots impropres des autres qui définissent tout sauf Ida. Une mosaïque de mots. Ida est morte. Reste un corps et cette mosaïque de mots. Qui la défigurent plus encore que la mort. Ou comment Bessette avec sa fausse simplicité habituelle a, par la seule empreinte de son style, encore une fois réussit le tour de force de réinventer le langage, souvent aussi d'en montrer les limites. Les insuffisances.

Espèces d'espaces
8.2
15.

Espèces d'espaces (1974)

Sortie : 1974 (France). Essai, Récit

livre de Georges Perec

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Perec, à force de jouer brillamment avec les mots et son sujet (l'espace donc) finirait presque par nous rendre aussi intelligent que lui - c'était pas gagné d'avance. C'est parce qu'il est un génial pédagogue, et qu'il nous aide, un peu comme DFW avec "This is water", à capturer les choses à la fois complexes et évidentes qui nous entourent au quotidien. Ludique et profond.

Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes
7.8
16.

Traité du zen et de l'entretien des motocyclettes (1974)

Zen and the Art of Motorcycle Maintenance

Sortie : 1974 (France). Roman

livre de Robert M. Pirsig

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Philosophie et huile de moteur. Il y a un point de rencontre entre le travail intellectuel et manuel : c'est ce "Zen and the Art of Motorcycle Maintenance" (quel titre, quel programme !). Où l'on explique comment régler la jauge d'huile, faire sa vidange ou serrer ses boulons peut nous aider à devenir une meilleure personne. Un père et son fils traversent l'Amérique en moto. C'est l'occasion de se confronter à l'espace, au désert et à soi-même. Rouler-penser. Un roman à part, rejeté 121 fois par les éditeurs avant de trouver, enfin, preneur, mais aussi un guide pour mieux vivre.

Notes d'un veilleur de nuit
17.

Notes d'un veilleur de nuit

Sortie : 1979 (France). Roman

livre de Alexandre Zinoviev

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Sous l'ère soviétique, il y a eu un certain nombre de romans (ceux publiés, ceux qui nous sont parvenus) mais on les connait, ils ont un certain profil : la fable lyrique sur la beauté de la terre maternelle, le roman historique sur les grands hommes du passé, le texte de science-fiction qui critique à demi-mot sans clairement nommer ou oser... Il y a bien eu Soljenitsyne, oui, mais un texte comme ces "Notes d'un veilleur de nuit" qui décortique franchement le système dans son absurdité la plus directe, la plus franche, dans ses rouages les plus cocasses, c'est du jamais vu, on en hurlerait de rire si ce n'était pas aussi triste et concret. L'humour ici est absolument mordant, c'est un humour en dernier recours, féroce, qui n'a plus rien à perdre et qui se double d'une lucidité incroyable. Zinoviev est philosophe, il comprend tout, il met les choses en perspective, sans se leurrer. Son rire est presque thérapeutique, comme une alternative au suicide. Dans un pays connu pour la force de son silence et ses goulags, on reste comme halluciné à la lecture d'une attaque aussi violente. Tout est médiocrité et prétention dans ce monde gris. Dans une postface terrible, l'auteur écrit qu'il sait qu'il finira dans un hôpital psychiatrique. C'est le prix pour voir brisé un tabou de la plus belle des manières. Triste de voir sa très modeste postérité aujourd'hui...

Le Livre de sable
7.8
18.

Le Livre de sable (1975)

El Libro de Arena

Sortie : 1975 (France). Recueil de nouvelles

livre de Jorge Luis Borges

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Encore des jeux autour de l'infini qui donnent le vertige, en particulier cette nouvelle où Borges rencontre son double, le temps d'une conversation au bord d'un fleuve. Combien d'auteurs méritent à ce point un adjectif tiré de leur nom ? Borgesien...

W ou le souvenir d'enfance
7.1
19.

W ou le souvenir d'enfance (1975)

Sortie : 1975 (France). Roman, Biographie

livre de Georges Perec

bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Le miracle dans W. vient d'un idée simple à savoir la juxtaposition des textes. Deux histoires parallèles, étrangères l'un à l'autre, semble-t-il d'abord, l'une de fiction, l'autre plus autobiographique. Pourtant, comme le démontrait déjà Faulkner dans "Les palmiers sauvages", deux textes qui se frictionnent produisent des étincelles, c'est presque inévitable, notamment des explosions de sens tant le lecteur travaille et effectue de lui-même rapprochements et autres conclusions. C'est le contraire d'une lecture passive et pré-mâchée, ici le lecteur est même partie prenante du projet. Encore un exemple frappant des pouvoirs de la littérature.

Le Démon
7.9
20.

Le Démon

The Demon

Sortie : 1976 (France). Roman

livre de Hubert Selby Jr.

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Un texte fort sur l'ennui, le quotidien, et ces journées qui se répètent à vous rendre fou. On est déjà dans "Requiem for a dream", car il faut se trouver des addictions pour ne pas perdre les pédales dans cette vie-là. Harry White progresse dans un récit fermé comme une boucle, à la fois horizontalement et verticalement : le temps se condense dans ces répétitions et les sentiments eux sont démultipliés, agacés par cette folie cyclique. Jamais faire du sur-place n'a été aussi violent. Les mots pour dire la colère sont ceux de Selby : simples comme ceux de Bukowski, pas ceux d'un poète mais ceux d'un rescapé de la vie. Les tripes sur la table.

L'Écrivain des ombres
7.5
21.

L'Écrivain des ombres (1979)

The Ghost Writer

Sortie : 24 septembre 1981 (France). Roman

livre de Philip Roth

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Roth dans toute sa splendeur, avec des personnages qui sont tous des écrivains plus ou moins torturés. Nathan Zuckerman dans sa première apparition est un alter ego parfait, qui se cherche un père de substitution. On rit de l’intelligence pétillante, de la perversité subtile, du personnage d’Anne Frank (!), et des trouvailles tordues de cet écrivain toujours à l’aise dans le malaise des autres. La fluidité avec laquelle il coule d’une idée à une autre, d’un personnage à un autre, d’un récit à un autre est bluffante. Ça part comme un petit roman en chambre et puis de nouvelles dimensions apparaissent progressivement, en particulier avec l’embrouille familiale autour de sa nouvelle qui défrise un peu la famille juive, pas forcément présentée sous son meilleur jour : ce sont les meilleurs questions que le roman soulève. Peut-on écrire sur tout, quitte à s’en prendre à des proches ? La limite soit-disant éthique est-elle la limite littéraire ? Mais alors les écrivains sont des salauds qu’on admire ? Et puis cette Anne Frank qui attire l’admiration de tous alors qu’elle peut-être une simple menteuse… Même le grand écrivain légendaire est peint comme un emmerdeur qui place son art avant la vie. Passionnant mais surtout furieusement vivant, on crie, on bande, on ment.

Voir le voir
8.2
22.

Voir le voir (1972)

Ways of Seeing

Sortie : septembre 2008 (France). Essai

livre de John Berger

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Un essai important, aussi capital que le texte de Susan Sontag sur la photographie ou celui de Walter Benjamin ("L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité") qui est souvent cité comme référence. Berger analyse notre regard sur les tableaux classiques, les connus et les moins connus, pour mieux parler de nous, du capitalisme, de notre fréquentation des musées ou de comment la noblesse aimé à être représentée. John Berger agence sa pensée avec précision, en restant claire et sans jargon, et son livre est richement illustré. Le chapitre qui montre comment la publicité a progressivement transformé notre regard et ce qu'elle doit aux tableaux de maîtres est peut-être le meilleur.

Légendes d'automne
7.6
23.

Légendes d'automne (1979)

Legends of the Fall

Sortie : 1981 (France). Recueil de nouvelles

livre de Jim Harrison

bilouaustria a mis 8/10.

Annotation :

Des histoires de vengeances (froides) et de coups de fusils (chauds) qu'aurait pu écrire Mc Carthy. Trois textes qui prennent leur temps, pour bien poser tout le monde et nous concocter un final à la Peckinpah. Pourtant ici la violence n'est pas gratuite. Livre qui tourne dans la famille, normal quand on a passé du temps, enfant, au Nouveau-Mexique.

L'Homme-dé
7.2
24.

L'Homme-dé (1971)

The Dice Man

Sortie : 8 novembre 2019 (France). Roman

livre de Luke Rhinehart

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Choisir son destin en un coup de dés. C'est 1) jeter le roman psychologique aux oubliettes 2) faire du récit linéaire un souvenir du passé. Ici tout est imprévisible, le meilleur (parfois) comme le pire du pire (souvent). On s'attend surtout à ce que le système des dés soit un ressort comique mais en réalité Rhinehart semble emporté par son propre élan et la force du hasard. La farce cache une philosophie de son temps et quelques moments tragiquement drôles. Jusqu'au boutiste !

Le Malheur indifférent
7
25.

Le Malheur indifférent

Sortie : 13 septembre 1977 (France). Roman

livre de Peter Handke

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Le jeune Handke écrit à chaud la mort de sa mère, simplement quelques semaines, quelques jours après l'avoir enterrée. L'occasion de se pencher sur la vie d'une femme ordinaire, en Autriche. Il se trouve qu'en plus cette dernière cache un secret... Autofiction, oui, mais au plus près des émotions, d'une vérité complexe. Stylo-scalpel, d'une précision chirurgicale : que fait-on, au final, de nos vies ?

Venises
7.2
26.

Venises (1971)

Sortie : 1971 (France). Récit

livre de Paul Morand

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Autobiographie littéraire - Grand style. Morand se lit tout doucement : le temps de goûter ses phrases sucrées. Sens de la formule, dandysme mondain, très début de siècle (aussi pardonnera-t-on parfois l'affectation et le name-dropping), Morand navigue élegamment sur les canaux de sa mémoire. Selon les humeurs, le texte prend des airs de journal d'avant-garde littéraire ou de chronique politico-historique.

Putain de mort
7.5
27.

Putain de mort

Dispatches

Sortie : 1977 (France). Récit

livre de Michael Herr

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Grand reporter au Vietnam pour "Esquire", Michael Herr en a trop vu et de trop près. Aussi "Dispatches" est comme on peut s'y attendre un récit très éprouvant, ou l'horreur est ce qu'elle est, sans glamour ou morbidité excessive. Herr écrit comme par flashs, des instantanés de guerre, à la manière dont ses collègues photographes opèrent. Le livre est brillant et mérite sa réputation : dans les années qui suivront, Herr devient expert sur le sujet pour Hollywood et collabore à l'écriture d'"Apocalypse Now" puis de "Full Metal Jacket".

Mars
7.8
28.

Mars (1975)

Sortie : octobre 1979 (France). Récit

livre de Fritz Zorn

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Ce récit, c'est celui d'un homme qui crève littéralement d'avoir été bien éduqué. La première page est un électro-choc, tout de suite dans le ton : "je suis jeune riche et cultivé ; et je suis malheureux, névrosé et seul". Issu d'une famille zurichoise bourgeoise, très convenable, très comme il faut, Fritz Zorn étouffe de toute cette bienséance, de cette hypocrisie qui lui vaudra un cancer. "Je suis le déclin de l'occident" conclue-t-il 300 pages plus loin. Entre lucidité et grandiloquence, rage et paix intérieur, c'est la mort d'un homme qui est un peu en chacun de nous. Un cri d'alerte, trop tardif, pour rappeler notre monde à ses valeurs. Pourtant, aussi forte soit l'écriture nerveuse, on est trop souvent dans l'anecdotique, on a par trop le sentiment de suivre un cas et pas une génération. La démonstration y perd de sa force, même quand la colère gronde. Texte impressionnant, parfois fulgurant mais presque frustrant quand on sent le grand livre qui se cache entre les lignes.

Moi qui ai servi le roi d'Angleterre
7.8
29.

Moi qui ai servi le roi d'Angleterre (1971)

Obsluhoval jsem anglického krále

Sortie : avril 2008 (France). Roman

livre de Bohumil Hrabal

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

On dit qu'on peut rire de tout mais pas forcément avec tout le monde et le petit garçon de café de Hrabal est un "héros" (on fait difficilement plus anti-héros) qui cache bien son jeu. Parce qu'il est sacrément amusant et tchatcheur et à coup sûr on rigole avec lui, de ses anecdotes innombrables, de ses idées farfelues, de ses combines pour trouver ici ou là quelques sous. On ne sait pas encore à qui on a affaire mais tout cela est si inoffensif... Oui, le garçon veut être millionnaire. Oh pourquoi pas, c'est avant tout pour aller aux filles qu'il fait des économies. Puis on commence doucement à ravaler notre rire, il se trouve qu'il apprend l'allemand, une lubie soudaine puis qu'il épouse une allemande installée à Prague et que coïncidence, c'est seulement quelques semaines avant l'invasion d'Hitler. Nous sommes à la moitié du roman et le basculement s'est subtilement opéré. Le petit garçon est le roi des cyniques, toujours au bon endroit au bon moment : il vendra des collections de timbres appartenant à des familles de juifs déportés pour s'offrir le million qu'il convoitait depuis toujours. Et se payer un hôtel. Comme la vie est bien faite ! Et toujours avec le sourire s'il vous plaît. Dans un mélange détonnant d'envie dévorante et de naïveté feinte. Il y a la noirceur et le cynisme tchèque de l'époque, celle de "L'incinérateur de cadavres", des films de la nouvelle vague de Forman, Passer et Menzel avec lequel Hrabal a justement travaillé (le délicieux "Trains étroitement surveillés, c'est lui !). De ce roman polémique, une adaptation à l'écran a été réalisée, par Menzel encore, mais elle sera interdite et ne verra finalement le jour qu'en 2007. Sujet corsé mais joli poil à gratter littéraire.

Trois sentiers vers le lac
7
30.

Trois sentiers vers le lac (1972)

Simultan

Sortie : 1 février 2006 (France). Recueil de nouvelles

livre de Ingeborg Bachmann

bilouaustria a mis 7/10.

Annotation :

Cinq nouvelles et un projet compliqué : écrire le dérèglement. Par petites touches, les femmes de ces histoires, Nadja, Beatrix, Miranda, Mme Jordan et Elisabeth perdent pied. L'une parce que les langues semblent se confondre dans sa tête d'interprète, l'autre parce qu'elle oublie systématiquement ses lunettes et voit un monde trouble qui ne correspond pas à la réalité, etc. Ça solliloque beaucoup dans ces têtes angoissées, et le phrasé complexe de l'autrichienne rend parfaitement ces voix intérieures, la ponctuation ou son abscence créant de vrais flots de mots. L'écriture singulière, parfois touchante, évite habilement d'avoir recours à certains tics (pour caractériser la névrose par exemple). Les passages du discours direct au discours indirect sont troublants de réussite.

bilouaustria

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