Cover Carnet de Curiosités : Lectures 2025
Liste de

28 livres

créée il y a environ 2 mois · modifiée il y a 2 jours
Les Chasseurs dans la neige

Les Chasseurs dans la neige (2018)

Sortie : 4 octobre 2018. Roman, Histoire, Peinture & sculpture

livre de Jean-Yves Laurichesse

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Nous ne savons pas grand chose du peintre, c'est accepté. Ses attributions réduites à peau de chagrin. « les milliers de détails et d’histoire particulières » disait Giono à propos de lui, véritable moteur à écriture.

Gioniste, simonien, Laurichesse a déjà écrit, chez le même éditeur, sur le même peintre, les Noces rouges. Son Lignes de terre : écrire le monde rural aujourd'hui de 2020 est sur ma PAL.

Le livre d'Alexis Metzger, météophile de l'hiver, nous apprenait que les hivers étincelants, immaculés et purs tels que représentés dans la peinture flamande étaient rares voire impossibles ; en grande partie des constructions fantasmées tandis que les véritables hivers dans ces régions fondaient vites, salis, amalgamés à la boue.

Évidemment le Bruegel de Laurichesse est aussi une reconstruction idyllique, chantre d'un monde paysan opposé à la ville (Giono avant l'heure ?) et dont il efface à partie la férocité des représentations, l'ironie de ses tableaux certes aussi critiques envers la guerre et les massacres d’innocents ; avec et sans majuscule, le décentrage relativiste de ses sujets... pour en faire une bonne pâte chaleureuse, tendre qui aime bien boire et se réchauffer auprès des autres.
Pas sûr que sans cette ombre d'un reflet et par ce sujet j'aurais lu ou apprécié ce court récit nonchalant et lambin, doux et tendre, un peu fade.

{Je croyais avoir lu l'Actes Sud Bruegel et l'hiver mais on dirait que non : juste feuilleté à sa sortie alors.}

:: Critique d'ailleurs un peu trop bavarde :
https://journals.openedition.org/litteratures/6123 ::

*

« Il tourne encore la page : la vallée s’ouvre alors, avec l’étang gelé et les patineurs, le village et son clocher, les méandres de la rivière. Maeke est fascinée de voir ainsi fixés le décor et les menus faits de sa vie. Il n’y a pas de couleurs mais peu importe puisque la neige les a presque toutes effacées. L’homme la regarde, le visage soudain grave, comme s’il attendait ce qu’elle va dire. Elle cherche des mots et ne les trouve pas. Finalement, elle dit simplement merci. »

Le Démon de maître Prosper
6.7

Le Démon de maître Prosper (2020)

Prosper's Demon

Sortie : 2 mai 2024 (France). Roman, Fantastique, Fantasy

livre de K. J. Parker

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Bien sûr, on voit ce qu'a voulu faire l'auteur. Mais avec ce anti-héros n'est-ce pas ce qui est fait depuis déjà 30 ans, voire plus ? Encore l'un de ces anti-héros qui font des horreurs mais qui, parlant au lecteur et forts en verve, gouailleurs, "ont la classe", deviennent le comble du cool ; qu'importe en fin de compte ce qui glisse ces protagonistes de l'autre coté : c'est un badge, une panoplie sans poids ni plis que l'on fait porter comme ça à des personnages. Ah mais en plus, en fait, ce n'est pas vraiment de sa faute...

Court récit pour une longue introduction avec une fin précipitée, pour ne pas dire décevante comme si Holt/Parker n'avait lui-même pas su où aller. On s'attendrait à plus de magouilles. Une lecture qui laisse sur la faim avec l'envie d'en avoir plus.

(on s'en doutera, attiré surtout par la couv. qui évoque le travail de Nicolas Samori.)

*

« — Quelle est selon vous la plus grande force bénéfique du monde entier ? »

Il médita sa réponse pendant à peine une moitié de battement de cœur. « L’art, dit-il.

— Vraiment ?

— Oui."

Eh bien, songeai-je, ç’a été rapide. « Pourriez-vous m’expliquer les raisons de cette opinion ?"

Il hocha gracieusement la tête. "Parce que l’art est beauté, dit-il, et que la beauté est l’essence du bien rendue visible ou audible. Quand on regarde une belle statue, quand on écoute de la belle musique, on regarde ou écoute de la beauté, à savoir le bien même, une force à laquelle aucun être humain ne peut résister très longtemps. Lorsqu’il crée de la beauté, l’artiste ouvre donc dans notre esprit des portes et des fenêtres à travers lesquelles le bien se déverse à flots. Ce que nous appelons le mal est tout simplement l’obscurité, l’absence de lumière. La lumière dissipe l’obscurité ; le bien, la beauté, dissipent le mal. De ce fait, l’art est la plus grande force bénéfique du monde entier. "

Je hochai la tête. Puis déclarai : "Excusez-moi, mais c’est une grosse connerie." »

Les Fils enchevêtrés des Marionnettes
6.9

Les Fils enchevêtrés des Marionnettes (2003)

The Tangled Strings of the Marionettes

Sortie : 19 septembre 2024 (France). Nouvelle, Science-fiction

livre de Adam-Troy Castro

Nushku a mis 4/10.

Annotation :

Comme le précédent, c'est lu sans plaisir aucun. Sous les prémices pourtant stimulantes et la promesse d'une xénofiction colle une surcouche de gras. La danse des Vhlan est-elle si mystérieuse ? Telle que présentée par l'auteur, je ne trouve pas. Au vrai, je crois que cela tient, comme dans précédent, à la focalisation, celle d'un type lambda comme on en a lu un milliard de fois qui évidemment désire une nana (ils couchent ouf !) et dont l'auteur, malgré tous ses efforts pour nous dire (plus que nous montrer) ne parvient pas à susciter le pas de côté à notre Humanité, notre langue, nos corps ; mais tout au contraire arase, aplatit et aplani le relief de l'invention. L'idée toujours désagréable et sûrement quelque peu injuste que dans les mains ou le panier d'un ou d'une autre, c'eut été tellement mieux...

Mes musées en liberté

Mes musées en liberté (2024)

120 promenades artistiques en France

Sortie : 16 octobre 2024. Journal & carnet, Peinture & sculpture

livre de Adrien Goetz

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

« Sans s'être aperçu que, dans les villes, partout, ce qu'il y a de plus dynamique et de plus moderne, de plus aimable aussi, ce sont peut-être les musées. Voilà pourquoi quand j'arrive dans une ville que je ne connais pas, j'entre toujours par la porte du musée. »

Je dois battre ma coulpe et avouer qu'avec mon mauvais esprit habituel je m'attendais à un plaidoyer de vieux réac alors que c'est tout l'inverse ; ou presque. Il a dans la forme tout de même les atours du vieux réac' obnubilé par les réseaux, mais dans une sorte de paternaliste bienveillant. Ce n'est pas l'acidité acrimonieuse d'un Clair par exemple.

Style rapide, léger mais si rapide, trop léger, qu'il en devient sec, lapidaire, presque autoritaire sous le joug de quelques adjectifs. Le livre est au mieux dans ses quelques éclats de souvenirs, avis personnels enamourés, évocations de directeurs ou conservateurs amis et miettes d'humour.
Ça pouvait, non ça devait, être passionnant, enlevé et élevé, écumant de passion, pétillant d'anecdotes, pétulant, sémillant, bref éclairé d'avis singuliers et cinglants. Cela manque en somme de caletisme, de gionisme (il y en a dans ce "on rêve aussitôt")

C’est un livre qui demeure le cul entre deux cimaises : ni réel guide illustré pour préparer ses voyages, ni journal personnel de visiste, ça se lit sans vraiment se lire. Oui, bien sûr, j'ai envie de visiter ceux que je ne connais pas ; souvent je sais déjà quels petits chef-d'œuvres y sont nichés.

Sa grande marotte : enseigner l'hda dans les lycées et les collèges — je suis d'accord (mais pas totalement : si c'est déshabiller Jacques pour habiller Paul...et déjà que l'enseignement de l'Histoire "toute simple" est menacée, cela me paraît surréaliste. Pis qui pour donner ces cours ?!) — mais ne supporte pas les centres de pédagogie.

Un livre qui malgré les bonnes intentions et la louable sincérité manque, pour le lecteur, de gourmandise.

« L'astronomie doit pouvoir se pratique dans les jardins »

« La magie d'une collection bien faite est peut-être- hasard de l'histoire de l'art ou mission accomplie des conservateurs - de nous faire regarder différemment ce que l'on croit connaître, ou de nous faire découvrir ce qui nous échappe parfois dans les plus grands musées,dans la cohue des grandes peintures et des grands noms. »

Langage Machine

Langage Machine

Sortie : 27 septembre 2024 (France). Poésie

livre de Romain Lucazeau

Nushku a mis 4/10.

Annotation :

De la poésie SF ? Peut-on éviter le kitsch ? le décorum datable ? Le ringard boomer à la Damas' ? Partant, un petit premier mouvement de recul, carrément de rejet immédiat : de la poésie écrite par un auteur de SF — cela serait pareil avec un auteur de polar. Ugh. Il apparaît toujours un peu ridicule de voir des auteurs ne portant pas le macaron "poète" s'essayer à la poésie. Oh ça lui passera se dit-on. Mauvaise approche, teintée, narquoise à corps défendant.
Dans un podcast, Romain affirmait que son écriture poétique était totalement différente, méthode, territoire, souffle que ses romans. Question de souffle, plus de réf' philosophiques.
Je n'arrive ne sais pas lire aimer la poésie contemporaine, elle m'ennuie m'agace m'irrite du blanc partout plus de rime et tout compte fait si peu de prise avec notre monde mais avouons que j'en lis peu, si peu : je feuillette, je ne prends emprunte achète pas même les têtes de gondole les chouchous d'ici ou d'ailleurs.
La tentation serait grande d'estampiller froide, sèche, cette poésie moderne qui n'escamote pas la technologie. Les machines seraient-elles chasse gardée de l’imaginaire ? Le printemps, les fleurs ont-ils plus de poésie par essence ? Frustration dans cette pudeur : encore plus de cosmogonie et de nébuleuses me faut-il. Queneau, Réda, Calvino s'ordonnent du registre de l'humour. J'ai un peu honte d'apprécier ces histoires de Dieux morts dans des ascenseurs et des câbles, tubules de béton.
Et pourtant, néanmoins il y a une petite ritournelle, un rythme (un souffle), qui rappelle, admettons, parfois, lançons le mot, la laisse de SJP, une pudeur également je crois, bien loin des exagérations verbales d'un Damasio.
À chaque poème la 1ere strophe me happe puis la suite me lâche en plein ciel, déconfit.

{"Arrivé au milieu de nos vie" / "Au mitan de ma vie je m'égarai dans une sombre forêt". Indice supplémentaire pour voir dans La Nuit du faune une réécriture du Paradis de Dante.}

« Distingues-tu tout au moins dans le flux des données un schéma émergeant à la surface des eaux avant qu'il replonge dans les abîmes du monde ? »
« Dans la seule triangulation de l'âme, du langage et du chant. »
« non comme un fossile du passé, non pour psalmodier des vérités déjà mortes »
« face au monde qui est là, autour de nous »
« dans la vibration charnelle du dire »

« Je sais des lieux cachés dans les replis du monde
Que forme l'angle mort des radio-émetteurs
Par eux l'errance surgit dans le flux des vecteurs
Asynchronie

La Saga Evangelion
8.1

La Saga Evangelion (2023)

L’œuvre d’une vie

Sortie : 14 septembre 2023. Essai, Culture & société, Cinéma & télévision

livre de Virginie Nebbia

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

Eva est part intégrante de ma personnalité. Elle m’a marqué au plus profond et longtemps fait partie de ma constitution, c’est une strate sur Verne, sous Dante, qui, comme les ruines enterrées, reste encore à ce jour visible du ciel. Même mon visionnage est un "core mémory" : d'une traite en VHS de 10h jusqu'à 22h. Je ne le suis plus mais j'ai été Shinji.
• Style agréable, souple et varié, naturel ; même chaleureux sans être trop familier (pas de côté copain-Joypad-pochade). En tout cas une plume loin du style platement journalistique juvénile rehaussé trop souvent de maladresses scolaires guindées faussement universitaires. (mais quelques "chiadé" familiers jurent...)

Eva est avant tout un puzzle dixit Anno.

• Si (parce que) j’aime les fins ouvertes, les indécisions narratives qui laissent part belle à l'imagination je suis rétif aux théories totalitaires - je me fiche de savoir si la toupie tombe ou non, c'est la question et son flottement qui importent.

Virginie propose alors, je crois, la bonne approche : pas de grille rigide, pas de culte d'Anno : ses collaborateurs ne sont à ce titre pas éclipsés. Ce n'est donc pas une énième théorie voulant platement, homothétiquement expliquer de A à Z les mystères avec une grille exogène à Anno et ses équipes bien en partant de lui, son univers sans pour autant virer à la psychanalyse de comptoir (sauf quand il s’en inspire). Les analyses de l'autrice restent sourcées prudentes comme... le font (la plupart) des historiens. Quoique j’aurais aimé plus de finesse dans l’utilisation des sources.

{3rd ed. oblige, il y a un manque flagrant d'images. Non par pure gourmandise quoique le travail de Chauvel sur Zelda était fort sympathique mais pour enrichir le propos historique : concept-art abandonnés (Olympia), portrait de ces jeunes gens dont on suit la vie, images d'archives des bureaux, celluloïd, captures de ces animes cultes que l'on connaît de nom sans les avoir vus...}

+ Je serais intéressé par un livre, j'entends un vrai, non un attrape-otaku résumant les Ghibli, sur l'histoire de l'animation japonaise dans les années 70, la bulle des 80 puis l'effondrement des 90 avec ces dessinateurs qui passent d'un projet l'autre, d'un grand film à une série culte, fondant leur propre studio. Rêvons à une grande infographie, un graphe de ces relations, rebonds.

• Donné l'envie d'aller voir tout un tas de vieux courts, films, shojo jamais traduits en France... de regarder les milles saisons d'Ultraman !

Le Détail
7.9

Le Détail (1992)

Pour une histoire rapprochée de la peinture

Sortie : février 2009 (France). Essai, Peinture & sculpture

livre de Daniel Arasse

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

« Le premier mérite d'un tableau est d'être une fête pour l’œil. » (Delacroix)

Enfin !? me direz-vous. Un tel classique franchement. Mais de ces livres à lire au lycée qui peuvent amorcer une passion voire lancer une vocation. Puis c'est râpé, on ne les recroisera plus dans les manuels, biblio, (dis)cours (ou alors en mal) ; parfois, avec de jeunes chercheurs en note de bas de page, critiques (les sourcils de la Joconde).

{Lu non pas en Champs, fameuse pour la médiocre qualité de ses repro. Sauf que même dans cette "belle" édition elles sont sombres, baveuses, floues, piquées sur Google ? pas mieux que des Toute l'œuvre des '70. C'est incompréhensible et à vrai dire honteux. Loin loin d'un Hazan avec la série Par le détail.}

« Daniel Arasse a patiemment et amoureusement interrogé l’image, ses bizarreries, ses surprises, et, grâce au « plaisir de l’image »14, au plaisir pris à sa contemplation, il a isolé de nombreux objets de réflexion permettant de comprendre comment la peinture1-1 se pense par ses propres moyens. » (G. Cassegrain)

Face aux cimaises je m'arrête non pas tant devant un tableau qu'attrapé par un détail, une goutte qui agrippe l'œil. Devant l'Olympia c'est par exemple son aréole diffuse qui m'accroche. Oh pas par grivoiserie mais pas le dégradé invisible de la couleur, presque un petit pan de mur blanc laissé à nu qui fait écho à une hanche de son maître Couture accrochée juste en face dans la nef.
Un thèse publiée sur l'historien se titre, à raison, "Les plaisirs de la peinture". Même dans ses ouvrages "sérieux", Arasse parvient à maintenir une contagion du plaisir et même de la joie de voir, de regarder le tableau, s'en approcher, n'en sortir que pour mieux y revenir et le revoir. Mine de rien ce plaisir n'est pas si évident chez d'autres ténors du genre, la tête dans le guidon des sources & des textes. Plaisir donc, entre deux cat. d'expo arides.

J'ai cependant parfois eu du mal à suivre son fil, la progression ou l'exploration du thème selon ses facettes. Ayant au contraire l'impression d'une série de boucles répétitives : paradoxe, comble, emblème — en boucle, peinant à voir les distinctions, les finesses, au-travers d'un catalogue (riche, certes, passionnant bien sûr) d'exemples, souvent les chouchous d'Arasse.

(Deleuze avait Maldiney à citer ; Arasse semble avoir L. Marin.)

Sous un carré d'immortelles

Sous un carré d'immortelles (2024)

Sortie : 30 mai 2024. Roman, Fantastique

livre de Nina Gorlier

Nushku a mis 4/10.

Annotation :

//Don't act. Lu sans rien en savoir, pas même le résumé pour d'obscures raisons. D'autres viendront. Indeed, bien loin de mes lectures même côté SFF.//

Une volonté de tendresse, de diaphanéité émerge de ce court récit mélancolique. Le style, délicat, qui rechigne à trop en dire, à trop décrire, finit par s’effacer de lui-même. Un gothique à fines fines ogives jusqu’à devenir les châteaux en l’air d’un roman non-écrit. Il manque à ce style une plus forte capacité d’évocation en quelques mots pour rendre vibrantes cette Valogne imaginaire sorte de pays de Cocagne et cafardeux ce sanatorium humide au fond de la forêt, du destin tragique de collégiens que l’on envoie à la guerre. Un récit mélancolique façon Grand Aulnes et poétique mais trop visiblement mélancolique avec ses pétales qui leur sortent de la bouche.
Des réminiscences brumeuses de Lord Dunsany (sont-elles voulues ? Il me faut lire la Fille du roi des elfes)


« Cette maison resplendit. Elle enferme en son sein la lueur de l'été et la conserve à travers le froid et la pluie. »

« Vois-tu, les découvrir c'est basculer dans un autre monde. Un tableau sans couleur. Une multitude de fleurs plus tristes les unes que les autres. Un parfum passé aux élans d'autrefois, pareil à l'une de ces images oubliées trop longtemps à la lumière.
Il y pousse d'étranges statues végétales. Des œuvres hybrides dont on ne sait où se termine la pierre et commence le bois. Leurs formes sont humanoïdes. Elles capturent des visages paisibles, où des fleurs dont j'ignore l'espèce viennent éclore. D'une blancheur translucide, elles percent les yeux et les bouches. Elles sont l'hybride de la pivoine et de la rose. Ou bien serait-ce un brin d'aubépine?
Arthur, si tu étais là, tu me donnerais leur nom. »

« Notre petit étang se trouvait à l'ombre des chênes. Septembre étendait ses rayons tièdes par-dessus la canopée et certains de ses filets d'or parvenaient jusqu'à l'onde pure. Des violettes poussaient près de la mousse. Plus tard, tu me dirais que nous étions chanceux, car ces demoiselles timides avaient accepté de fleurir une seconde fois, rien que pour nous.J'ai abandonné ma bicyclette auprès d'un arbre et parcouru le bord de l'eau. Jamais encore notre promenade du dimanche ne nous avait menés dans cette direction. Pourtant,les lieux semblaient taillés pour nous. Le tapis d'herbe était assez tendre pour accueillir nos étreintes. Le chant des oiseaux pouvait camoufler nos éclats de rire.
Apparu de derrière un bosquet, tu t'es

Un monde plus sale que moi
7.3

Un monde plus sale que moi (2023)

Sortie : 25 août 2023. Roman

livre de Capucine Delattre

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Histoire d'un corps. Qui n'est pas, ne peux pas être le mien. Entrer donc dans la peau d'une autre pour y découvrir ce qui est éludé. L'autre versant, la face B, la face Nord. Nécessaire dissociation (mais aussi de saut générationnel), dans un état de superposition et... s'identifier à l'autre, aux deux à nos corps défendant, défendus. Le contre-Michon ? Le regard devers les bandeurs fous et aveugles (comme Homère) aux corps, désirs, refus des autres. Ce n'est pas lecture confortable mais éclairante. Victor nous sort par les trous du nez. Facile, évident. Or malheureusement #jesuisvictor.
(Drôle mais peu surprenant de voir les Jean-Mi de 50 ans mettre 1 étoile à ce livre car Delattre mettrait tous les hommes dans le même panier — ce qu'elle ne fait absolument pas — et de balayer le livre d'un revers de la main au nom, je cite, de l’extrémisme.)

Des passages forts, organiques notamment dans leurs métaphores, les saisons pourrissent, juin dégouline, les paroles pèlent les lèvres ; comme dans les BD de Florence Dupré la Tour c'est littéralement incarné ; et entre ces passages viscéraux : de l'eau qui m'a parue diluée, de petits clapotis qui finissent par être répétitifs et cachent mal leurs fondations théoriques. De l'eau qui aurait gagné à plus de condensation comme une distillation à froid de cette histoire.

Comme dans ces BD documentaires édifiantes, la part entre l'intérêt indéniable du fond et l'intérêt déjà plus flottant de la forme, du médium, il n'est pas facile de jauger.

*

« Maintenant, je sens la chair, le sang, les yeux lourds, l'ambition, l'arrogance, la colère, toutes ces choses qui font désordre et qui rendent les conversations compliquées, et elle m'en veut. Je ne crois pas qu'elle ait raison, mais j'ai honte de moi tout de même. »

« Je déglutis Je comprends que la honte, c'est surtout de la culpabilité qu'on prend en charge pour autrui. »

« J'ai ai à ce point fossilisé mon passé, cloué dans ma tête à grands coups d'interprétations définitives qui me servent de prises autant que de ligatures, que j’éprouve le plus grand mal à y insérer la moindre nouveauté. Lila ne rentre nulle part dans le récit que je me suis bâti par sécurité. »

Fortune
6.8

Fortune (1913)

Chance

Sortie : 1913 (Royaume-Uni). Roman

livre de Joseph Conrad

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Marlow, encore plus bavard, loquace, affable (entendre misogyne), insupp' même avec ses idées arrêtées, sa pugnacité à garder la parole, à confondre plus qu'à expliquer. Tout ça est voulu bien sûr, annonce Quentin sous la glycine, tant d'autres.

« Le plus beau » des Conrad nous dit la quatrième de couverture de mon édition. Moui... pas avec moi. Force est d'admettre qu'il n'y a pas cette universalité profonde et métaphysique d'au Cœur des ténèbres, que ce n'est pas non plus la toile d’araignée gluante de Lord Jim ni l’Iliade moderne (annonciatrice) qu'est le désastre Nostromo. Ce roman patine, rabâche et si, Narrateur, Marlow, Powell, détectives sauvages, dressent le portrait de Barral par la bande, à tournicoter sans fin, entre couilles, autour du 'point aveugle', ce protagoniste féminin, tout englué de ce témoignage indirect reste... creux ? Impersonnel plutôt. Il n'y a pas ce mystère épais qui garde son épaisseur, son attraction, son attrait tout en en disant assez.

(Bref, il y a du... Bridgerton, si si, dans toute la première partie qui patauge chez les Fyne.)

*

« Je me fis du capitaine Anthony une image simple et romanesque. C'était beaucoup plus agréable. Le génie n'est pas héréditaire, mais le tempérament peut l'être. Et il était le fils d'un poète qui possédait le don admirable de donner à la banalité une qualité individuelle et éthérée, de rendre touchantes, délicates, séduisantes, les conventions les plus rebelles de l'existence prétendue raffinée. »

« Puisqu'on rencontre dans la vie des espaces obscurs et comme impénétrables, il est inévitable qu'il s'en trouve aussi dans tout ce qu'on dit de la vie. Dans ce dont je vous parle maintenant — un épisode de l'un de mes congés banals passé dans la campagne verdoyante, que m'a rappel tout naturellement, après tant d'années, notre rencontre avec un homme qui a navigué sur la grande bleue — cet entretien nocturne est un point obscur, impénétrable. Libre à nous de faire les conjectures que nous voulons. »

J'écris l'Iliade
7.7

J'écris l'Iliade (2025)

Sortie : 6 février 2025. Récit

livre de Pierre Michon

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

Je ne sais qu'en penser. Je crois que sans l'estampille, j'aurais détesté. Je l'ai, en partie, détesté. Comme avec Abeille je ne sais pas quoi faire de cet érotisme de vieil homme (ne parlons pas de ses publi Instagram...). C'est embarrassant. Certes, si je reproche, plus bas, à l'un son érotisme fade, au moins l'autre ose-t-il dire les termes — bander doit apparaître sous toutes ses formes une page 1 sur 3 — et, parfois aller dans d'étranges territoires.

« Avançons dans la genèse de mes perversions. »

Pierre Marceau. Déjà dans M&S en parlant de Watteau il s’identifiait au clown ; au mime, il n'y a pas loin... Le roi en a marre de la couronne, s'auto-parodie, se dénigre, sape le passé, pointe les clichés, les trop grosses phrases. S'il a toujours fait ce genre de grimaceries, elles demeuraient en marge, presque cachées. Michon semble ne plus oser écrire sérieux, "pour de vrai" si ce n'est pour de bon. Ce n'est pas à moi de dire si c'est aveu d'échec ou enfin la libération. Déjà sa réponse au funambule Boley [le Guy d'une des dédicaces ?] laissait penser qu'il était passé à autre chose, enfin retourné à la vraie vie.

Pis, il le dit lui-même, comme dans les Deux Beune ou les miettes du Cahier, sa phrase ciselée et serpentine me paraît s'être dissoute, comme ces images de brins d'ADN brisés en fragments dans les films de science-fiction... avoir perdu de sa coloration (les mots qui roulent dans la bouche). Désormais, une sorte de gouaille légère. Elle prend alors dans cette vitesse trouvée encore plus d'accents gioniens, celui familier, roucoulant. Je retrouve cette citation : « Je me prends pour Giono. Mais, le reste du temps, la mayonnaise tombe. Alors que Giono, c’était tout le temps ! »
Car comme ce dernier, Michon a toujours été pour moi un auteur du plaisir, une lecture me mettant, à chaque phrase, en joie, bien ignorant des difficultés que certains peuvent y trouver. Or là le plaisir du texte y est-il encore ?

Je me suis demandé, au début, si ce livre n'était pas ce "roman d'amour" de 500 pages refusé, il y a quelques années dont j'avais entendu parlé par des voies trop distantes et le voir ainsi évoqué, l'expression exacte entre guillemets me fait douter : était ce déjà une fabrication ? autre petite machination pour amuser Pierrot le troll ?

Ce n'était pas ce que j'attendais/espérais et n'est-ce pas plus mal ?

Caillebotte, peindre les hommes

Caillebotte, peindre les hommes (2024)

Exposition, Paris, musée d'Orsay, 8 octobre 2024 - 19 janvier 2025

Sortie : 2 octobre 2024. Beau livre & artbook, Peinture & sculpture

livre de Paul Perrin et Gloria Groom

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

Les Raboteurs ! Ah un classique ? Pièce maitresse accrochée au ciel des fixes... Oh pourtant cette gloire est bien jeune. Ce n'est qu'une redécouverte de la fin du XXe siècle, un regain d'intérêt depuis les années 90 lors d'une première grosse exposition sur Caillebotte*.

Ici, une exposition truffée de chef-d'œuvres. Expo roborative. Parfois étouffante : du gris, des rues sans arbres, des vestons... car elle aborde le peintre par le petit trou de la lorgnette. En dressant à vrai dire un portrait pas si sympathique de l'artiste. Mais je préfère ce type d'exposition avec un propos, une direction aux simples accumulations de tableaux célèbres.

Lu quelque part sur Internet que bon l'expo en faisait trop sur les hommes : Gustave trainait ses guêtres avec des mecs et c'est bon, pliez bagage, n'en jetez plus, pas besoin d'aller plus loin. Mais quid de ces mecs du cercle impressionniste qui peignaient tant de femmes et des hommes mais pas comme lui (et ne parlons pas de tous les gagnants du Salon avec leur pâtisseries...) ? L'histoire n'irait pas bien loin avec ce genre de fausses évidences laissées pendantes. Déjà est-ce vrai ? Puis si ce n'est le pourquoi, le comment, le par qui et le pour qui ?

J'ai lu il y a quelques mois un autre catalogue d'une autre exposition, plus ancienne, sur Caillebotte jardinier, sorte de contre-point, doublure, de cette exposition sur Caillebotte peintre urbain, peintre des hommes.

-
* Aléas de la gloire. Le livre de Guégan sur ces "tableaux à éclipses", œuvre oubliées qui retombent dans la mémoire après des siècles d'oubli et qui nous paraissent de nos jours, mémoire courte, intemporels, n'était pas satisfaisant, pas à la hauteur de son sujet.

« Les critiques qui ont vu l'exposition impressionniste de 1879 ont reconnu le jeune artiste assis au chevalet avec, derrière lui, le chef-d'œuvre de Renoir. L'année suivante, ils le qualifient de ‘'’chef d'école’, d''apôtre principal' et de 'coryphée du groupe indépendant'. Dans les décennies qui suivent la mort de Caillebotte, on oubliera le rôle important qu'il a joué, et les premières histoires de l'impressionnisme en feront une figure secondaire. Ce n'est qu'en redécouvrant sa place dans l'organisation des expositions et l'influence que celles-ci ont eue sur son art que l'on peut commencer à voir en lui ce qu'il a vraiment été : la quintessence de l'impressionnisme, façonné par le groupe qu'il a contribué à former et qui l'a formé. »

Etre ici est une splendeur
7.3

Etre ici est une splendeur (2016)

Vie de Paula M.Becker

Sortie : 3 mars 2016. Roman

livre de Marie Darrieussecq

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

« Paula est une bulle entre les deux siècles. Elle peint, vite, comme un éclat. »

Après quelques lectures non pas désagréables mais laborieuses, si peu fluides, contrariées, la langue cristalline et claire de Darieussecq fût si ce n'est un total enchantement, une goulée d'air frais revigorante. Des bribes d'une vie minuscule, des épluchures colorées à réassembler comme une feuille déchirée. Et Rilke par la bande.

J'avoue ne connaître très mal la peinture de cette période : ces artistes n'ont jamais eu en France les honneurs de Gallimard Découverte, de la Petite coll. Taschen, de monographies Hazan, d'expositions thématiques, géographies. Alors qu'ils sont des stars de l'autre côté du Rhin... L'envie de s'y plonger, un par un et tous ensemble, de visiter cette colonie d'artistes au Nord de l'Allemagne

« L’horreur est là avec la splendeur, n’éludons pas, l’horreur de cette histoire, si une vie est une histoire : mourir à trente et un ans avec une œuvre devant soi et un bébé de dix-huit jours. »

[Le titre est une phrase 2.}

*

« Paula trouve en tout cas que c’est "plus dur pour les femmes". On attend d’elles de jolis tableaux séduisants, quand les hommes ont le droit de faire voyou »

« Les rencontres nous signent. Nous devenons des livres d'or. Nous apprenons à parler des mots donnés par nos aimés. Quand Rilke revoit Paula, w sa voix avait des plis comme la soie. »

L'agneau égorgera le lion
6.8

L'agneau égorgera le lion (2017)

The Lamb Will Slaughter the Lion

Sortie : 13 septembre 2024 (France). Fantastique

livre de Margaret Killjoy

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Trop punk pour moi.
|Couverture by Anouck Faure, l'autrice de la Cité diaphane.|

Je dis ça sans mépris mais cette novella pourrait facilement passer pour une novélisation d'un jeu Don'tNod, d'un Life is Strange : on imagine facilement le setting d'une ville abandonnée réaménagée, réappropriée par des zadistes et les concept-artists de s'éclater à dessiner la station à essence saturée de graffitis, les panneaux publicitaires détournés, le bar et l'épicerie/ friperie faits de matos de récup, la maison coloniale squat cozy avec milles guirlandes lumineuses (//FROM), la cabane bricolée dans la forêt, puis les barricades, le bus scolaire échoué, Iliksi évidemment avec ses cent variations de tatouages ; on imagine les épisodes avec l'arrivée dans la bourgade, les dialogues avec ces personnages bariolés, tatoués, bonnets de hipster, avec leur backstory, leur agressivité ou non envers le joueur-Danielle ; les choix sur renvoyer ou non l'esprit, rester ou partir, embrasser ou non, dénoncer ou pas, tuer Eric ou pas, etc.
J'en imagine le jeu, l'artbook. Et n'est-ce donc pas réussite de la part de Killjoy d'avoir ainsi fait germé en moi quelques images, ambiances ?

{Le titre est une phrase 1.}


« La révolution, c’est retirer le pouvoir à nos oppresseurs, pas devenir comme eux. Ou, dans notre cas, sans couronner roi un esprit sans fin. »

« Zut, à vingt-huit ans, c’était moi qui fatiguais. Dix ans plus tôt, je parlais de tout et de rien avec les chauffeurs et je les aimais pour ça. J’aimais les gens sympas pour leur gentillesse, les foldingues pour leurs histoires et, d’accord, je détestais les saletés de racistes, mais au moins j’avais l’impression de prendre le pouls de cette saleté de pays raciste. »

La Domination
6.1

La Domination

Sortie : 7 juin 1905 (France). Roman

livre de Anna de Noailles

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Bien sûr Antoine est insupp', graine d'un long chapelet d'hommes "séducteurs" en vérité dominateurs et cruels, Dom Juan, Casanova et dont on dirait aujourd'hui PUA. Ils ont toujours pour eux, comme excuse, comme vernis, comme pose, col et clope au vent, la mélancolie. Oui, tout ça par ennui très pascalien. Que voulez-vous, l'homme (avec un petit h), s'ennuie de par le monde. Ce chapelet mènera aux vrais désenchantés du XXe siècle ; à Langlois. Anna a en effet retiré de son texte une phrase finale qui change totalement la donne.

Il y a ce style ardent, précieux, chantourné, flottant, heurté, aux phrases sèches, évocatrices et rapides aux faux airs du Flaubert de l'Éducation, nonchalant, qui se roule et se prélasse avec distance cependant dans un lyrisme confit et déjà en ce début de siècle périmé, obsolète.
Les critiques ont éreinté le livre, à raison. "car cet ensemble est incompréhensible". Dans sa préface François Raviez rappelle à quel point ce n'est pas une lecture agréable : « Un grand désenchantement nimbe le tout, auquel seule une fin brutale pouvait mettre un terme. L'irrégularité de la narration, son décousu,ses dissymétries, induisent une lecture lente, et non la découverte dynamique d'une histoire. Ce sont des tableaux qui nous sont proposés, une série de scènes de la vie d'un homme, autant d'épisodes emblématiques d'une destinée envahie par le néant, mais marquée in extremis par la passion. Quand enfin son existence de grand homme désabusé touche à son terme, celle qu'il attendait depuis toujours arrive, mais il est trop tard. Dérision d'un destin, vanité du désir. »

Je ne peux donc pas dire avoir goûté cette lecture : vite harassé, empeigné dedans ces envolées et ces sentiments exacerbés, touffus et décousus, mais dont j'apprécie paradoxalement les buts et les enjeux, la visée.

« Je n'accepte aucun ordre qui ne me vient de moi-même, de ce qui constitue mon unité et ma personne éternelle, je veux dire de mon pays. »

Libertés urbaines

Libertés urbaines (2024)

Sortie : 3 octobre 2024 (France). Histoire

livre de Patrick Boucheron

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

J'avais découvert l'animal avec l'Entretemps, très plaisante, riche, nuancée réflexion sur l'Histoire et le Temps à partir d'un délicat tableau de Giorgione selon la stratégie de l'énigme de Bonnefoy.

« Mais il faut être bien peu archéologue pour croire que le temps s'empile sagement, le plus ancien demeurant toujours enfoui au plus profond. Non, les couches anciennes ne sont pas les moins actives, et pas seulement lorsqu'elles remontent à la surface, inversant l'ordre du temps en des chevauchements inattendus. On parle alors de sédimentation tourmentée, car il en est du sol archéologique comme de l'esprit humain. »

Ne rentrons pas dans les (pas si) récentes polémiques. On connaît la chanson, toujours le même refrain qui en fait crisser des dents certains. Il faut toutefois admettre que cela fait longtemps que Boucheron ne parle plus que de Léonard, Machiavel et qu'il est sorti de son domaine (règne ?) pour toucher à tout, sur tous les sujets, tous les fronts.

À l'image des autres textes de cette collection : court, frustrant. Moins sec que d'autres. Texte qui m'a nonobstant donné envie d'aller relire du Boucheron bien que ce qu'il me reste de lui à lire est soit trop vaste soit trop spécialisé, tout du moins de l'histoire antique, médiévale — J'ai le Purgatoire de Le Goff à reprendre depuis.... 2015)
Machiavel cet été ?

« Parce que le monde médiéval n'existe que sous la forme d'un réseau de mondes fermés mais articulés. Très rares sont les individus qui passent les seuils : à eux le pouvoir et la richesse, ou plus exactement aux gatekeepers qui en contrôlent les accès. De ce monde fragmenté, l'histoire connectée apprend à reconnaître les familiarités déplacées. »

Pablo Carpio

Pablo Carpio (2024)

Art.Box

Sortie : 2 octobre 2024. Beau livre & artbook, Peinture & sculpture

livre de Pablo Carpio

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Caurette, éditeur d'artbooks ultra-chers par exemple Delval, Alex Alice, Raphaël Lacoste qui a travaillé chez Ubisoft sur les AC, etc. édite également une collection plus humble, moins chère au format album souple sur des illustrateurs actuels. Que j'admets volontiers ne pas connaître le moins du monde. Je me demande comment se déroule leur choix éditorial.

Sans surprise avec de tels cadrages, une telle lumière mordorée, sa source d'inspiration première est la Hudson River School. Pour des cyborgs anges bioniques qui font très Bayonetta et des ruines à l'architecture brutaliste, dunesque, que l'on voudrait explorer.

Pour le prix, pas si petit au reste, on pourrait s'attendre à un chouia plus de matière qu'une interview expédiée sur une demi-page... Par exemple, 90% de ses images sont de la 3D ! quand j'aurais supposé au contraire 90% de Photoshop ! J'aurais donc été curieux d'avoir un WIP avec tout son processus, la 3D, le cadrage, le rendu, la surcouche Photoshop...quelques croquis, références et inspirations plus ciblées pour certaines œuvres, contexte sur sa carrière. Pourquoi les beaux-livres et autres Artof rechignent-ils tant à nous donner des billes rédigées ?

(Bon en plus ils passent par des campagnes de financement participatif... comme les Moutons Électriques en leur temps. Or l'on a vu ce que ça a donné...)

https://www.artstation.com/pablocarpio

De l'espace et du temps
7

De l'espace et du temps

Sortie : 21 mars 2024 (France). Science-fiction

livre de Alastair Reynolds

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

« Manipuler les concepts de la cosmologie classique requérait de l'imagination, mais également une capacité à considérer l'espace et le temps comme les facettes d'un même objet. »

Comme toujours avec Reynolds les blogs, critiques et forums me vendent du rêve d'un vertige cosmique qui va loin, étourdit et... ça va loin mais pas aussi loin que je l'espérais. Sans doute est-ce d'avoir du lu du Baxter et Stapledon dont on sent dans ce texte l'ombre tutélaire, qui me gâte ainsi le goût des échelles en-deça des super-amas ? J'entends toutefois que Baxter est bien plus médiocre écrivain que Reynolds.

À Elton John qui m'a toujours paru être l'incarnation vivante du kitsch et ringard anglo-saxon et dont je peine à écouter plus de deux titres, j'aurais préféré Bowie, autre Starman.

// Bon et à quand la traduction du Nord galactique, de Zima Blue et autres histoires et d’Au-delà du Rift de l'Aigle  ? //

La Marche funèbre des marionnettes
6.8

La Marche funèbre des marionnettes (1997)

The Funeral March of the Marionettes

Sortie : 23 mai 2024 (France). Nouvelle, Science-fiction

livre de Adam-Troy Castro

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Xéno-diplomatie.
Je n’ai pas lu d’autres textes dans l’univers partagé de l’auteur.

Un récit trop simple voire simpliste au regard du sujet, de ses prémisses qui attisent la curiosité et de ses thématiques passionnantes sur l’Autre, incompréhensible, indicible, la curiosité plus ou moins bien placée, etc. Le rejet absolu du suicide de la part du diplomate me semble également une excuse facile, peu solide, pour justifier l’incident à venir. De plus, comme plus bas Abeille ou Védrines, le désir du protagoniste principal-faux héros pour la mystérieuse femme, me semble court-circuiter les possibilités d’un texte ethnographique à la ‘La Voix des morts’. Manque d'un brin complexité, d'une autre couche, ce malgré l'excuse de vitesse du texte. (souvent on se prend alors à imaginer le thème exploité par un autre auteur... Liu, Watts, Chiang, Larson, Tchaikovsky ?)

*

« Il s'ensuivit l'un de ces intervalles complètement silencieux, comme il s'en produit de façon aléatoire même au cœur du pire des chaos, une période qui n'indique pas la fin de la destruction, mais fait office de ponctuation, mettant tout ce qui suit entre parenthèses. »

« — Je suppose que… si j’aimais uniquement ce que je comprends parfaitement, j’aurais une vie avec bien peu d’amour. Parfois l’amour c’est juste… l’envie de comprendre.
— Ce n’est pas l’amour, ça, seulement de la curiosité. »

« À l’instar de tous les diplomates de carrière, il avait passé sa vie à travailler la vérité à la manière d’une sculpture, lui conférant les formes qui convenaient le mieux au besoin du moment ; que j’en fasse autant maintenant lui aurait parfaitement convenu. »

L'Uræus

L'Uræus (2014)

Sortie : 21 mai 2014. Poésie

livre de Salah Stétié

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

L'insecte cosmique épinglé, le fossile galactique à ressortir d'une glaise sidérale du moins est-ce ce qui s'évapore de ces fines pages, pourquoi pas ? Carrément même. Full client. C'est ce que j’écrirais si j'étais poète. Mais là c'est maigre pour ne pas dire chiche.
Je crois ne plus pouvoir me lover larver glisser couler dans ces coquilles de poèmes pour y trouver chaleur.

Quant au dessin original d'Alenchinsky, du foutage de gueule. A pris un Crayola mauve, a entouré le texte imprimé et baste, on réimprime.


« La danseuse au long soin couleur de vent solaire
Du talon frappe un sol incandescent
Et danse invisiblement dans l'invisible »

*

« Cela, cela est songe
Chênes, reflets. Diaprures
Insubstantielles.
Songe que l'On songea
Qui : On ? N'est On qui veut
ON n'est personne. On, nenni,
Buvant aux deux seins du néant fornicateur Qui n'a de crépuscule qu'au lointain horizon Voilé de sable noir
Et qui n'a de matière diamantée que le Rien »

*

« Passerelle épineuse
Donne un oreiller à la tête osirienne
Où pullulent les scarabées cycliques

Portes du rien, Porte de Chine, seuil souverain
Ouvre-toi puis referme tes deux battants
Sur l'Osiris aveuglé de hannetons »

Phénomènes

Phénomènes (2023)

De la pollinisation à l'origine des comètes en 124 planches illustrées

Sortie : 30 août 2023. Sciences, Document

livre de Camille Juzeau

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Comme un gamin à feuilleter, les soirs d'orage en automne, les vieilles encyclopédies du fond de la classe ou données par le paternel avec l'esthétique si particulière des dessins de vulgarisation de la première moitié du XXe siècle.

Un peu décevant, la tranche de graphisme n'est pas poussée jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'à se passer totalement de texte. Elles ne fourmille pas assez de détails, chiffres, pictos — cette effervescence visuelle, ce monde-microcosme dans un grain de papier est ce que j'aime en regardant les infographies (plus que l'illusion de se cultiver à moindres frais sur quelques anecdotes ou menues statistiques comme dans les mauvaises vidéos YouTube.)

Une critique d'ailleurs (encore ! cela devient une sale habitude de me placer contre) affirme que les sujets traités sont peu passionnants. Elle prend en exemple l'intelligence du Blob et la datation au Carbone 14. C'est drôle, car entre le Blob qui a connu mille livres, documentaires, articles... et la datation qui nous ouvre les portes du passé, ce jugement me semble très péremptoire.

Morteparole
6

Morteparole (2014)

Sortie : 1 septembre 2014 (France). Roman

livre de Jean Védrines

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Morteparole présente l'odeur et la tête d'un roman des années 40. La mélancolie scolaire qui baigne ce roman n'évoque-t-elle pas tant Vialatte que Fournier et certains bouts de Gadenne ? Comme un classique oublié que l'on serait allé repêcher dans une bibliothèque locale de livres non-publiés en Bretagne. Du moins au début. Il n'en possède pas le goût réel, subtil et fort. Car une désagréable impression d’une volonté de tour de force, de monstration stylistique (et éthique) fait jour. Le style n'est au demeurant pas aussi virtuose qu'il le croit, à savoir une sorte de néo-simili-Céline (ou plutôt Cendrars car il n'y a pas la violence) oratoire timide. Il fonctionne notamment par ajouts, derrière la virgule finale, entassements et non par ciselure. Cela ressemble fort à du Bergounioux sans la rigueur, à du Michon sans les coulées mais Védrines se place loin des auteurs Verdier dont les thèmes, motifs sont similaires.
Il y a de la pose chez Védrines.

« Quand je lui remontrais qu’il aimait chez elles bien plus que les boucles d’or ou l’œil très bleu, un don de parole qu’il passait sa vie à repérer partout – dans la poésie de Rimbaud, de Jaccottet, les romans de Giono, de Céline –, il se contentait, supérieur, de hocher la tête. »

Quant au fond c'est plutôt de la même eau que du Delerm alors que Giovan se voit subversif sur l'école les vieux la modernité et les révolutions ratées. Mais ce thème, annoncé, n'est jamais traité. En effet, car quand Dora, la femme-mystère teasée tout du long débarque après tous ces ronds de jambe, bim, c'est comme si Védrines n’avait plus rien à dire, notamment sur les usines, la révolution, Turin, non, le désir comme chez Abeille écrase tout, le roman coupe court, pliez bagages et finit en queue de poisson.

« Enfin, c’était son espérance, la Manche, les bourrasques : qu’il y eût au moins des mots puissants, un grondement, des phrases qui roulent au rivage et disent cette terre presque étrangère. »

La Cité diaphane
7.2

La Cité diaphane (2023)

Sortie : 3 février 2023. Roman, Fantasy

livre de Anouck Faure

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Combien de jeunes romancières s’inspirent de Miyazaki ? Sauf que pour une fois… ce n’est Hayao mais Hidetaka ! Une fanfiction FromSoft clairement. Faure s’inspire ouvertement de ses architectures, de son lore, de ses personnages ambivalents et piégés. Lors des scènes d’action, l’on s’imagine manette en main à rouler, esquiver.

Existe-t-il a la ville ce que la Maison des feuilles fût pour la maison ? Une grande ville étoilée et son livre attenant avec son palimpseste, sa bigarrure de polices et de couleurs, truffée ras la brochure de mystères.

J'aurais apprécié plus de densité, de détails, à vrai dire de concret, dans le lore et les descriptions de cette cité ; ville diaphane mais aussi abstraite : le contact des pierres froides, les textures des murs, les scories des statues, le froissement des parchemins, toutes ces odeurs ! la bibliothèque est vite oubliée et la question archivistique annulée. L'écriture a certes de l'allant et de la fermeté mais manque de naturel et de nuances dans sa volonté baroque.

Avec ses 4 personnages qui se tournent autour dans un tourbillon dramatique à coup de prophéties, de jumeaux, d’un roi fou et de son conseiller maléfique, un forgeron mutique, ces rares décors étiques on dirait du théâtre, une scène, même du Shakespeare.
Du moins pour la 1ère partie.
Puisque le dernier tiers part en full FromSoft, du Dark Souls avec un splash de BB ; voyez. Larves lumineuses, mère abominables aux milles visages, sang vicié et sang blanc aux progénitures corrompues, fioles d'argent, homme-cheval, lances que l'on esquive en roulant et des grottes au sol de lave qui ouvrent sur des cieux inédits.

La Cité est un petit livre mais de ces livres autophages qui posent pions et mystères puis car il faut bien se résoudre à en dénouer les nœuds s’astreignent - comme La Maison des soleils – à s’auto-expliquer, tout éclairer de bout en bout, à méthodiquement revenir sans cesse sur ses quelques brins de son ADN dans une boucle de rétro-action fermée qui ne peut que la(i)sser le lecteur sur le carreau. Ce que Faure ne retient pas de l’écriture FromSoft c’est bel et bien ce qui en fait la sève à savoir le creux, les béances dans le récit, ses points aveugles pour prendre le terme cercasien, qui laissent un flottement, un doute, des troubles dans le non-dit. Tout mettre en lumière ne fait qu’abraser les textures et anéantir les reliefs.

En un mot : maladroit. En deux : maladroit mais sympathique.

Je connaissais Faure via ses illus.

Les Écosystèmes, un bien commun

Les Écosystèmes, un bien commun

Essai, Sciences, Écologie

livre de Sandra Lavorel

Nushku a mis 5/10.

Annotation :

Un peu court (comme ma notule).

« Dans le cas des valeurs dites non matérielles ou culturelles, comme l'appréciation esthétique d'une prairie, la question devient hautement subjective, et l'on va alors interroger directement les gens, sur ce qui,selon eux, rend une prairie plus belle qu'une autre. On se trouve alors à l'interface avec d'autres disciplines, en particulier la sociologie.
Pour les prairies des Alpes sur lesquelles nous travaillons, et qui sont gérées humainement depuis longtemps, nous avons constaté que ce qui les rend belles pour les habitants de la région, ce sont, sans surprise, les couleurs variées des fleurs, la diversité des espèces,l'étalement dans le temps des floraisons successives : tout cela, on sait le mesurer, même si c'est coûteux en temps. Mais aussi, et c'était plus surprenant, la quantité de litière, donc de matières mortes, accumulées au sol: il ne s'agissait pas ici d'une valeur esthétique, mais d'une preuve de la qualité de l'entretien et du respect des traditions.
Ainsi, pour mesurer un service écosystémique, il faut combiner les mesures habituelles en écologie avec des entretiens avec la population. »

Le Veilleur du jour
7.4

Le Veilleur du jour (1986)

Le Cycle des contrées, tome 2

Sortie : 26 mars 2015 (France). Roman

livre de Jacques Abeille / Léo Barthe

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

2-7.5/10

Abeille semblait écrire pour moi avec un style gracquien, des descriptions minutieuses, des bibliophiles et des géologues en goguette… Abeille celait pourrait être ce Marcheur, cet ami lointain, vu de loin en loin, à la fois mystérieux et proche (n'est-il pas comme ça avec tout le monde dans d'autres villes ?). Une voix arrachée au Surréalisme, débarrassée de ses oripeaux factices factieux, passée au tamis de la fantasy.

Néanmoins quelque chose grippe, grince.

Car ne sort que son côté vicelard, l'écrivain érotique. Un male-gaze permanent. Abeille me fait penser à ces vieux dégueux qui se disent galants, s'érigent en amoureux des femmes mais ne font juste qu’étaler leur désir adiepux non-sollicité. Sauf qu’Abeille démiurge, ici elles attendent littéralement nues dans la chambre des protagonistes au charisme d’endive. Malheureusement, je ne peux faire la part des choses, séparer la lie du vin qui pour Léo Bart... Abeille pour c'était sa mousse, la part des anges. Sans aucun doute ne l'aurait-il pas voulu que son œuvre soit ainsi non-miscible. Tourné les pages avec crainte, appréhension et répugnance d'une énième scène de cul. Certains ne supportent pas les descriptions de Balzac, moi je suis gavé de ces descriptions de jeunes vierges pâles. (fausse normalité des corps. Déjà les statues ne poussant pas dans la norme n'étaient-elles pas jetées ?) Étrange à quel point ça me chiffonne chez lui et pas tant chez d’auteurs auteurs masculins pourtant logés à la même enseigne ?

Pour rester sur ce Veilleur, tout encore pour me séduire par des airs kafkaesques mais surtout par son côté Borges en diable avec pierres cyclopéennes qui dessinent les runes archaïques d'une langue intraduisible. Pourtant il y a comme chez Cendors, la promesse d'une fiction archéologique qui fait long feu : pas une fin lovecraftienne c'est sûr, trop vu, un mystère historique plus ancien ? une documentation plus riche et consistante : inventer tout un monde et même plusieurs mondes empilés (les auteurs se limitent toujours à une seule civilisation ancienne) ? chronologie suggérée par quelques trous de poteaux, murs détruits, menues monnaies ? Alors l'envie d'aller les écrire moi-même. / ...fictions archéologiques rigoureuses en un contre-point au sense of wonder cosmique dans le feuillet des pierres (sense of the deep/of ponder ?) sans tomber dans le facile indicible ni le pastiche du roman péplum à la Gautier. (Pas une mince affaire. J'en suis bien incapable.)

Tech Noir
7.7

Tech Noir (2021)

L'art de James Cameron

Tech Noir: The Art of James Cameron

Sortie : 29 mars 2024 (France). Album

livre de James Cameron et Guillermo del Toro

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

On savait que Cameron himself avait dessiné le dessin de Kate dans Titanic et nous avions vu la révélation des Navi — déception alors… de grands indiens bleus — via ses dessins au crayon.

Une expo non par le truchement de making-of, non par l’histoire des films mais par les croquis et les concept-arts.

Créations des années ‘80, l'imaginaire jusqu'au bout des mains. Cameron n'évite pas les clichés de l'époque. Il se gausse d’avoir découvert l’aérographe pour faire des halos lumineux… il y a clairement du kitsch qui tâche et nous avons échappé au pire. Quoique ce pire aurait l’air de rien modelé le présent et n'aurait plus alors ce parfum ringard. Imaginez les découvrir les concepts de Terminator sans les films...

Suis-je fan du cinéma de Cameron ? Pas tant que ça ou alors admiratif avec le ciboulot et non séduit avec le cœur, malgré le détail militaire au parfum martial. Je m’identifie un peu au jeune Cameron à vrai dire : petiot esseulé dans sa province ; lecteur goulu de SF et particulièrement d’A. C. Clarke, dessinateur avide remâchant ses lectures, passionné de vaisseaux et sciences. Certes sans le talent, ni les réflexions très précoces, évidemment sans la carrière qui aura suivi...

Côté texte, il est plaisant d'avoir plutôt que des périphrases visuelles ou des circonvolutions psychanalytiques, la voix de Cameron qui ne fait pas le semblant de l’humilité. Malgré quelques incartades récentes et son délire d'IA pour ses remasters (paradoxe compréhensible : sa technophilie de toujours qui vient s’opposer à son goût pour tout faire lui-même, son exigence minutieuse) vieillit mieux que Scott. Gros bémol : pas de cartel avec la date même un ca., la technique, les dimensions…

Quel dommage de s’être coincé dans son trou de souris qu’estAvatar. Malgré (à cause ?) de cette planète où tout est possible, de cette 3D azimut, le jeune Cameron dépeint dans cette exposition semble avoir disparu.

Au surplus, lorsqu'on voit à quel point il puise dans ses idées de Xénogénésis encore aujourd'hui je suis étonné que Jake n'ai pas perdu un bras pour recevoir un bras bionique. Peut-être l'un de ses enfants ? Idem pour les méduses flottantes : sûrement dans le 3, au-dessus des volcans ou le 4 dans les nuages ?*

* Entre la rédaction de la notule et le retour de SC des images d’Avatar dévoilées montrent des… méduses flottantes !

Sur la peinture
7.2

Sur la peinture (2023)

Cours mars-juin 1981

Sortie : 5 octobre 2023. Peinture & sculpture, Philosophie, Essai

livre de Gilles Deleuze

Nushku a mis 6/10.

Annotation :

Jamais eu d’admiration ni la nostalgie, ce malgré quelques pas passés dans des amphis de philo, pour tout ça Vincennes, enfin ici Saint-Denis. Je ne doute pas que mes éclaireursmettront 9 ou 10. J'aimerais aimer le D. M'y fondre. Au double sens de dissoudre et mouler, comme une sculpture — voyez je suis deleuzien dans l'âme. Y revenir, former ma vision avec.

Est-ce du lard ou du cochon ? De l’escroquerie de haut vol joliment dite ou de la pensée à la fine et profonde ? mon cœur hésite toujours et à coup sûr hésitera toujours parfois au sein même d'une seule phrase.

Séduit par la verve dès lors plus que convaincu par la méthode flotteuse, par l'esthétisme un peu comme je le disais par les symbolismes inopérants, les zodiaques déformés… J’ai pris ces concepts tout du long comme un jeu de l'esprit, des brindilles jetées au vent qui façonnent une belle cathédrale, des châteaux en Espagne dont je ne retire rien ou si peu. Parfois le ton prend les tours et atours d'un gourou crudivore qui nous parle d'énergies… On dira que c’est de ma faute.

« Il ne faut surtout pas que vous vous reposiez ni que vous réfléchissiez. »

Reste qu'à la fin je n'en ressors pas l’œil changé ni la sacoche garnie d’outils neufs. À la limite, de temps en temps, tenterai-je de distinguer un diagramme. En vain. Ne serait-ce parce qu’il s’intéresse essentiellement à des peintres « faciles » : abstraction, Expressionnismes, Van Gogh.
Si j'affectionne particulièrement le ton de la discussion, c'est l'Hdl'a telle que je ne la goûte guère. Probablement car de par ma formation, de par mes goûts, je garde une approche très concrète, technicienne, pisse-froid sans doute ? Celle le nez collé aux œuvres, signatures, style, indices icono, retraçant le jeu des écoles ; n'oubliant pas, justement, les maîtres dits petits.

« J'ai honte de vous montrer ... »

(Peu aimé les interventions lèche-cul. Surtout celles de G. Comtesse, psychanalyse et vent. Me fait penser à ce type suffisant à la voix désagréable qui intervient souvent au M&lP film pour ne rien dire. // Lorsque les intervenants ne sont pas d'accord, D. balaie toujours ça d'un revers désinvolte : on est d'accord, ça passe, ça connecte.

« - Donc, il faut changer.
- Non, je ne crois pas. [...]
- Ça ne marche pas.
-Non [...]
- Je suis en profond désaccord avec toi. [...]
- Eh bien, je vois que nous sommes tous d’accord ! »)

Relire Riegl & Woflinn, aller lire Maldiney qu’il cite tant et tant, trop ?

Le Sorcier de Terremer
7.4

Le Sorcier de Terremer (1968)

Le Cycle de Terremer, tome 1

A Wizard of Earthsea

Sortie : 1977 (France). Roman, Fantasy

livre de Ursula Le Guin

Nushku a mis 7/10.

Annotation :

Ouvrons l'année avec un nouveau cycle que je gardais dans ma besace depuis déjà quelques années.
Prenons par la bande.

Est-ce la faute au fils Miyazaki ou à la langue simple, claire et limpide, sans fioriture aucune d’Ursula que j’ai imaginé les paysages, les habits dans une clarté limpide aux couleurs pures ? Loin en vérité des atours rudes, salins, burinés voulus par l’autrice pour son monde terraqué.

Étonné de voir ailleurs des critiques négatives sur ce roman par des admirateurices de Hobb tant leur ton, leur style, leurs paysages — Castelcerf est aussi pays de sel — leur rythme me paraissent proches, pour ne pas dire semblables. S’il est vrai que Le Guin va plus vite que Hobb, allant aussi vite de vieux contes là où Hobb prend le temps du temps long, du quotidien, c’est une fantasy sans fracas, à hauteur d’homme, intime.

La magie trouve bel et bien un équilibre entre la magie floue des Tolkien ou de HP aux sorts sortis du chapeau de l’autrice et les délires hard, techniques, d’auteurs contemporains. Il y a bien dans la magie des règles, des limites, des risques mais garde aussi son mystère, donc sa puissance.

Grand plaisir, gros charme.

-
Sur les couvertures dénaturées :
https://medievalpoc.tumblr.com/post/73847767314/fiction-week-the-earthsea-cycle-by-ursula-k/amp
https://colorfulbookreviews.wordpress.com/2020/10/26/rant-about-coverfail-in-earthsea/

*

« — À quoi sert-elle, Maître ?
— À rien que je sache.
Ils reprirent leur chemin et Ged garda la cosse un moment, mais il finit par la jeter.
— Lorsque tu connaîtras la quatrefeuille en toutes saisons, sa racine, sa feuille et sa fleur, son aspect, son parfum et sa graine, alors tu pourras apprendre son vrai nom, car tu en connaîtras l’essence, ce qui est mieux que d’en connaître l’utilité. Après tout, quelle est ton utilité ? Ou la mienne ? La Montagne de Gont est-elle utile, ou bien la Haute Mer ?
Et cinq cents pas plus loin, Ogion ajouta enfin :
— Pour entendre, il faut être silencieux. »

Nushku

Liste de

Liste vue 200 fois

10
2