80 livres
créée il y a presque 3 ans · modifiée il y a plus d’un anPilote de guerre (1942)
Flight to Arras
Sortie : 20 février 1942 (France). Roman
livre de Antoine de Saint-Exupéry
Annotation :
« Je vis.
Je suis vivant.
L’ivresse de la vie me gagne. […]
Ceux qui nous tirent d’en bas, savent-ils qu’ils nous forgent ? [...]
Si j’avais fait demi-tour une seconde plus tôt, j’aurais tout ignoré de moi.
J’ai été chercher, une fois de plus, la preuve de ma bonne foi sur Arras. J’ai engagé ma chair dans l’aventure. Toute ma chair. Et je l’ai engagée perdante. [..]
J’ai reçu le droit de participer. [...] d’accéder à cette plénitude qui me gonfle si fort ».
Le Livre de la Sagesse (1966)
The Book: On the Taboo Against Knowing Who You Are
Sortie : 1974 (France). Essai, Culture & société
livre de Alan Watts
Annotation :
Sont insensés par nature,
tous les hommes qui n'avaient pas la connaissance de Dieu et qui n’ont pas su, par les biens visibles, connaître celui-qui-est ni,
considérant ses œuvres, reconnaître l’Ouvrier.
Mais le feu, le vent, l’air rapide, le cercle des étoiles, l’eau impétueuse,
les flambeaux du ciel, ils les ont tenus pour des dieux gouverneurs de l’univers.
Si, charmés de leur beauté,
ils ont pris ces [créatures] pour des dieux,
qu’ils sachent combien leur Maître est plus beau
car c’est l’Auteur même de la beauté qui les a créées.
Et s’ils en admiraient la puissance et l'activité
qu’ils en concluent combien est plus puissant
Celui qui les a formées.
Car à partir de la grandeur et la beauté des créatures,
leur Créateur peut être contemplé par analogie.
La vérité est symphonique
Aspects du pluralisme chretien
Sortie : 25 avril 2000 (France). Essai
livre de Hans Urs Von Balthasar
Annotation :
Que la vérité chrétienne soit symphonique est sans doute la chose la plus importante que nous ayons à annoncer et à méditer.
La symphonie n'est absolument pas une harmonie doucereuse et relâchée. La grande musique est toujours dramatique, action incessante et suprême détente.
Mais la dissonance n'est pas la cacophonie. Elle n'est pas non plus l'unique moyen de maintenir le rythme symphonique. Le réservoir de l'Église se trouve dans "la profondeur de la richesse de Dieu" en Jésus-Christ, enfoui en son cœur.
Puisse-t-elle laisser cette plénitude agir dans une inépuisable diversité qui découle de son unité sans pouvoir être endiguée.
Terre des hommes (1939)
Sortie : 6 février 1939. Essai, Autobiographie & mémoires
livre de Antoine de Saint-Exupéry
Fabrizio_Salina a mis 8/10.
Annotation :
Il ne s’agit point ici d’aviation.
L’avion, ce n’est pas une fin, c’est un moyen.
Ce n’est pas pour l’avion que l’on risque sa vie.
Ce n’est pas non plus pour sa charrue que le paysan laboure.
Mais, par l’avion, on quitte les villes et leurs comptables, et l’on retrouve une vérité paysanne.
On fait un travail d’homme et l’on connaît des soucis d’homme.
On est en contact avec le vent, avec les étoiles, avec la nuit, avec le sable, avec la mer.
On ruse avec les forces naturelles.
On attend l’aube comme le jardinier attend le printemps.
On attend l’escale comme une Terre promise,
et l’on cherche sa vérité dans les étoiles.
« Ah ! le merveilleux d’une maison n’est point qu’elle vous abrite ou vous réchauffe, ni qu’on en possède les murs. Mais bien qu’elle ait lentement déposé en nous ces provisions de douceur. Qu’elle forme, dans le fond du cœur, ce massif obscur dont naissent, comme des eaux de source, les songes… »
« Quant à toi qui nous sauves, Bédouin de Libye, tu t’effaceras cependant à jamais de ma mémoire. Je ne me souviendrai jamais de ton visage. Tu es l’Homme et tu m’apparais avec le visage de tous les hommes à la fois. Tu ne nous as jamais dévisagés et déjà tu nous as reconnus. Tu es le frère bien-aimé. Et, à mon tour, je te reconnaîtrai dans tous les hommes.
Tu m’apparais baigné de noblesse et de bienveillance, grand seigneur qui as le pouvoir de donner à boire. Tous mes amis, tous mes ennemis en toi marchent vers moi, et je n’ai plus un seul ennemi au monde. »
Commentaire sur la Genèse Saint Jean Chrysostome
Sortie : 23 octobre 2013 (France). Essai
livre de Jacques de Penthos
Fabrizio_Salina l'a mis en envie.
Annotation :
« Voyez comment le saint prophète dit :
« Joseph, étant âgé de dix-sept ans, paissait les troupeaux avec ses frères ». Pourquoi nous indique-t-il le nombre d'années ? C'est afin que vous appreniez que la jeunesse n'est pas un obstacle à la vertu.
[Les frères de Joseph] se sont laissés emporter par la jalousie, en voyant la tendance de cet enfant vers la vertu, et la bienveillance que leur père lui témoignait.
Considérez en effet comment cet enfant se conduit avec ses frères que les mêmes entrailles ont nourris ; il montre une pleine confiance en eux et il leur parle avec une entière franchise ; ceux-ci au contraire, dominés par la passion de l'envie, sont remplis de haine pour lui.
Joseph, cet enfant admirable, ne connaissant pas les mauvais desseins de ses frères, leur parle comme à des frères, et leur raconte les songes par lesquels Dieu lui avait révélé sa future grandeur et en même temps l'assujettissement de ses frères.
Et ils le haïrent encore plus à cause de ses songes et de ses paroles. »
Lettres à un jeune poète (1908)
Édition bilingue (traduction Marc B. de Launay)
Briefe an einen jungen Dichter
Sortie : 6 mars 1991 (France). Correspondance, Essai, Poésie
livre de Rainer Maria Rilke
Annotation :
« Tout n’est que porter à terme, puis mettre au monde.
Laisser chaque impression et chaque germe de sentiment parvenir à la maturité au fond de soi, dans l’obscurité, dans l’indicible, l’inconscient, l’inaccessible à l’entendement, et attendre avec une profonde humilité, une profonde patience, l’heure de l’accouchement d’une nouvelle clarté : vivre dans l’art, c’est cela, et c’est cela seul : pour comprendre aussi bien que pour créer.
Je l’apprends tous les jours, je l’apprends dans la douleur, à qui j’en ai la gratitude : la patience est tout. »
Les Frères Karamazov (1880)
(traduction Henri Mongault)
Bratʹya Karamazovy
Sortie : 1880 (Russie). Roman
livre de Fiodor Dostoïevski
Annotation :
Ne craignez jamais votre propre lâcheté dans la poursuite de l’amour ; ne soyez même pas effrayée de vos mauvaises actions à ce propos. Je regrette de ne pouvoir rien vous dire de plus consolant, car l’amour qui agit, comparé à l’amour contemplatif, est quelque chose de cruel et d’effrayant.
L’amour contemplatif a soif de réalisation immédiate et de l’attention générale. On va jusqu’à donner sa vie, à condition que cela ne dure pas longtemps, que tout s’achève rapidement, comme sur la scène, sous les regards et les éloges.
L’amour agissant, c’est le travail et la maîtrise de soi, et pour certains, une vraie science. Or, je vous prédis qu’au moment même où vous verrez avec effroi que, malgré tous vos efforts, non seulement vous ne vous êtes pas rapprochée du but, mais que vous vous en êtes même éloignée,- à ce moment, je vous le prédis, vous atteindrez le but et vous verrez au-dessus de vous la force mystérieuse du Seigneur, qui, à votre insu, vous aura guidée avec amour.
La Pitié dangereuse (1939)
Ungeduld des Herzens
Sortie : 1939 (France). Roman
livre de Stefan Zweig
Fabrizio_Salina a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
Ce ne sont pas les êtres bien portants, sûrs d’eux-mêmes, gais, fiers et joyeux qui aiment vraiment – ils n’ont pas besoin de cela ! Quand ils acceptent d’être aimés, c’est d’une façon hautaine et indifférente, comme un hommage qui leur est dû. Le don d’autrui n’est pour eux qu’une simple garniture, une parure dans leurs cheveux, un bracelet à leur poignet, et non le sens et le bonheur de leur existence.
Seuls ceux que le sort a désavantagés, les humiliés, les laids, les déshérités, les réprouvés, on peut les aider par l’amour. Et quand on leur consacre son existence, on les dédommage seulement de ce dont la vie les a privés. Et eux seuls savent aimer et se laisser aimer comme il faut : humblement et avec reconnaissance.
Mermoz (1939)
Sortie : 1939 (France). Biographie
livre de Joseph Kessel
Annotation :
Son indulgence, sa charité, sa merveilleuse compréhension étaient faites pour bercer le chagrin et panser les plaies. Elles ne pouvaient pas donner une ossature au monde et une indiscutable loi intérieure. Or il en fallait une à Mermoz, et qui le dépassât. Il ne la trouvait ni autour de lui, ni en lui.
Alors le sens du divin qui s’était éveillé sur le plateau des Andes, qui l’avait visité sous le clair de lune quand pour la première fois il avait survolé l’Océan, s’imposa à son cœur. Ne pouvant comprendre les chemins de la vie, il s’en remit pour la conduire à un être supérieur.
Il chercha ses traces sur la terre. Il aima le silence et le chant des églises. Son émotivité poétique et sa soif de l’infini y furent comblées. Mais il ne pouvait accepter la façon dont en usaient les hommes. […] Il revint de Rome révolté par le luxe théâtral du Vatican.
« Dieu, disait-il, n’a pas besoin de ces livrées ; Dieu c’est la simplicité, la liberté, la bonté, la beauté et le courage. C’est l’oubli de soi-même, c’est le bonheur de l’évasion, du sacrifice, c’est l’amour sans mesure. C’est ce que je sens lorsque je vole.
"Mermoz toucha le terrain de Palmyre au soir du 4 décembre 1921.
Le désert, à lui seul, donne le sens du divin. Mais lorsque ce désert fut jadis le siège d’un puissant empire, lorsque des miettes de monuments indiquent l’échelle de son faste et de son prestige évanouis, lorsque l’on sait qu’une reine ardente et belle y gouverna des peuples disparus, alors la poésie des siècles, de la poussière humaine et d’une ombre magnétique rend plus dense et plus vivante l’action des sables et des pierres qui semblent soudain peuplées de sortilèges."
L'Ecclésiastique ou le Siracide
Mishlei ben Sira
Sortie : juillet 1977 (France). Poésie
livre de Yeshua Ben Sira
Annotation :
Heureux l’homme qui médite sur la sagesse et qui raisonne avec intelligence, qui réfléchit dans son cœur sur les voies de la sagesse et qui s’applique à ses secrets.
Il la poursuit comme le chasseur, il est aux aguets sur sa piste ; il se penche à ses fenêtres et écoute à ses portes ; il se poste tout près de sa demeure et fixe un pieu dans ses murailles ; il dresse sa tente à proximité et s’établit dans une retraite de bonheur ; il place ses enfants sous sa protection et sous ses rameaux il trouve un abri ; sous son ombre il est protégé de la chaleur et il s’établit dans sa gloire.
Samarcande (1988)
Sortie : mars 1988. Roman
livre de Amin Maalouf
Fabrizio_Salina a mis 7/10.
Annotation :
Qu’y a-t-il de commun entre cet homme et moi ? Je suis un adorateur de la vie, et lui un idolâtre de la mort.
Moi, j’écris : « Si tu ne sais pas aimer, à quoi te sert-il que le soleil se lève et se couche ? » Hassan exige de ses hommes qu’ils ignorent l’amour, la musique, la poésie, le vin, le soleil. Il méprise ce qu’il de plus beau dans la Création, et il ose prononcer le nom du Créateur. Et il ose promettre le paradis !
Crois-moi, si sa forteresse était la porte du paradis, je renoncerais au paradis ! Jamais je ne mettrai les pieds dans cette caverne de faux dévots !
Tu ne mourras pas
Sortie : 6 janvier 2005 (France). Essai
livre de Gabriel Marcel
Annotation :
« Donner une chose, ce n’est pas simplement la faire passer d’une place à une autre. C’est la transmuer, puisque c’est lui incorporer quelque chose de soi.
Le don qui m’a été fait, s’il est véritablement un don, ne vient pas seulement s’ajouter à un avoir préexistant. Il se situe dans une autre dimension, celle du témoignage. L’âme du don, c’est la générosité : une lumière qui serait joie d’être lumière. »
"Espérer, c’est porter en soi l’assurance intime que, quelle que puissent être les apparences, la situation intolérable qui est présentement la mienne ne peut pas être définitive, elle doit comporter une issue.
Le propre de l’espérance est peut-être de ne pas pouvoir utiliser directement ou enrôler aucune technique. L’espérance est propre aux êtres désarmés, ou plus exactement elle est le contraire même d’une arme, et c’est en cela, mystérieusement, que réside son efficacité.
L’espérance est un élan, elle est un bond. Elle n’est pas seulement une protestation dictée par l’amour, elle est une sorte d’appel,
de recours éperdu à un allié qui est amour lui aussi. »
" Il reste la très grande question, la question la plus importante, et c’est la mort. La situation de l’homme est telle que l’homme peut effectivement se trouver investi par le désespoir. Il peut se sentir enveloppé par ce désespoir. Et je dirais – non pas seulement en chrétien, mais en métaphysicien – que pour moi l’espérance est l’espérance du salut. Et je dirais plus précisément l’espérance de la résurrection. Cela signifie que pour moi l’espérance est par essence même, non de façon contingente, dans un au-delà. La mort est réellement le heurtoir. On pourrait prendre une autre image et dire : le tremplin. Le heurtoir où se bloque le train de l’espérance, mais aussi le tremplin où il prend son élan…"
« Le fait de conserver purement et simplement ne comporte pas de justification spirituelle ; la fidélité ne représente une valeur que dans la mesure où elle assure la permanence d’une âme ou d’un amour.
Mais âme et amour sont chose vivante et dont la vie est en perpétuel renouvellement. Ceci revient à dire qu’on méconnaît entièrement le sens et la valeur de la fidélité si l’on y voit une forme d’inertie ; elle est et doit rester une flamme.
Mais cette flamme ne saurait brûler à vide, elle est appelée à prendre corps dans des actes et dans des œuvres qui sont des témoignages.
La fidélité est liée à une ignorance fondamentale de l’avenir. J’ignore, en jurant fidélité à un être, quel avenir nous at
C'était bien (2003)
Sortie : 2003. Roman
livre de Jean d'Ormesson
Annotation :
« Quelque chose d’obscur et de gai qui remonte au temps les plus reculés et où la science n’a pas de part éclaire encore nos vies : les sentiments, les passions, les idées vagabondes, l’imagination créatrice, la liberté des mots. Rire et boire avec d’autres, rêver, dessiner, peindre, chanter devant un feu, faire de la musique et l’écouter, siffler avec les oiseaux, composer des motets, des messes, des opéras, raconter des histoires, écrire et lire des épopées, des odes, des fables, des tragédies. Ou regarder en silence les arbres qui changent et restent les mêmes et les nuages dans le ciel. Ou demeurer immobile, loin de soi-même et de tout, à bénir on ne sait quoi. Cultiver de l’inutile, au moins en apparence. Il n’est pas tout à fait exclu que l’inutile soit plus nécessaire que l’utile.
Au bonheur, en tout cas. »
« Nous sommes la proie depuis toujours de deux tentations symétriques et funestes : l’angélisme et le désespoir. La vie a toujours été et sera toujours une souffrance – et elle est un miracle : elle est une fête en larmes. »
Retour au centre (1969)
Einfaltungen. Auf Wegen christlicher Einigung
Sortie : 1998 (France). Essai
livre de Hans Urs Von Balthasar
Annotation :
« Dans l’art éducatif de Dieu, rien ne joue un plus grand rôle que le passage d’un point à son contraire : dès que nous avons à moitié appris et compris quelque chose, ouste ! nous sommes plongés du bain chaud dans l’eau glacée ! Ceci afin de ne pas nous établir mais de rester souples, et parce que la véritables intelligence ne réside pas dans ce que l’on a saisi mais dans la disponibilité plus grande et l’obéissance plus profonde. »
in Grains de blé II
« L’orgueilleux est pareil à un objet noir. Pour posséder et pour « briller », il absorbe toute la lumière en lui sans savoir que c’est justement à cause de cela qu’il ne réfléchit plus aucun rayon et qu’il est si sombre.
L’humble est clair : ce qu’il reçoit, il le donne plus loin, et il « brille » parce qu’il ne le veut pas. Renvoyant la lumière prêtée qui tombe sur lui, il devient lui-même lumière. Amour et mission ne font qu’un. » in Phénoménologie de la vérité
"Remarquons] la compénétration constante entre maître et serviteur chez le Christ : la manière dont il règne souverainement en tant que serviteur, dont il sert humblement en tant que maître.
Et, pour cette raison, il n’a rien d’un maître ni d’un serviteur. En servant, il ne permet jamais qu’on oublie qu’il est le maître (ainsi au lavement des pieds), et, en tant que maître, qu’il n’est là que pour servir."
Mémoires d'Hadrien (1951)
Sortie : 1951 (France). Roman
livre de Marguerite Yourcenar
Fabrizio_Salina a mis 8/10.
Annotation :
Dans les rencontres les moins sensuelles, c’est encore dans le contact que l’émotion s’achève ou prend naissance : la main un peu répugnante de cette vieille qui me présente un placet, le front moite de mon père à l’agonie, la plaie lavée d’un blessé. Même les rapports les plus intellectuels ou les plus neutres ont lieu à travers ce système de signaux du corps : le regard soudain éclairci d’un tribun auquel on explique une manœuvre au matin d’une bataille, le salut impersonnel d’un subalterne que notre passage fige en une attitude d’obéissance, le coup d’œil amical d’un remerciement, la moue d’appréciation d’un vieil ami.
Et j’avoue que la raison reste confondue en présence même du prodige qu’est l’amour, de l’étrange obsession qui fait que cette même chair dont nous nous soucions si peu quand elle compose notre propre corps, nous inquiétant seulement de la laver, de la nourrir, et, s’il se peut, de l’empêcher de souffrir, puisse nous inspirer une telle passion de caresses simplement parce qu’elle est animée par une individualité différente de la nôtre, et parce qu’elle présente certains linéaments de beauté, sur lesquels, d’ailleurs, les juges ne s’accordent pas. Ici, la logique humaine reste en-deçà, comme les révélations des Mystères. La tradition populaire ne s’y est pas trompée, qui a toujours vu dans l’amour une forme d’initiation, l’un des point de rencontre du secret et du sacré.
Citadelle (1948)
Sortie : mai 2000 (France). Roman
livre de Antoine de Saint-Exupéry
Annotation :
[Mon père parla :] Tu connais le festin des noces, une fois que l’ont déserté les convives et les amants. Le petit jour expose le désordre qu’ils ont laissé. Les jarres brisées, les tables bousculées, la braise éteinte, tout conserve l’empreinte d’un tumulte qui s’est durci. Mais à lire ces marques, me dit mon père, tu n’apprendras rien sur l’amour.
A peser, à s’attarder sur le dessin des caractères ou sur l’or des enluminures, l’illettré manque l’essentiel, qui est non l’objet vain mais la sagesse divine. Ainsi l’essentiel du cierge n’est point la cire qui laisse des traces, mais la lumière.
Joie de croire joie de vivre
Sortie : 7 mai 2013 (France). Essai
livre de François Varillon
Annotation :
« Car l'Homme n'est pas, l'Homme est à faire. Nous sommes des commencements d'homme, dit saint Jacques (Jc 1,18). Nous sommes des ébauches d'homme. Dieu ne crée pas l'homme tout-fait, Dieu a horreur du tout-fait. Dieu crée l'homme capable de se créer lui-même. »
Le grand Carême
Ascèse et liturgie dans l'Eglise orthodoxe
Sortie : 19 janvier 2011 (France). Essai
livre de Alexandre Schmemann
Annotation :
L’homme est ce qu’il mange. » C’est le philosophe matérialiste allemand Feuerbach qui l’affirme… Ce disant il pensait avoir réglé leur compte à toutes les spéculations « idéalistes » sur la nature humaine. En fait, sans le savoir, il exprimait la conception la plus religieuse de l’homme. Car – bien avant Feuerbach – la Bible donnait la même définition de l’homme. On nous y présente l’homme, avant tout comme un être qui a faim.
(Pour la vie du monde)
Le Mystère de l'être (1951)
Sortie : 1951 (France). Essai, Philosophie
livre de Gabriel Marcel
Annotation :
Le fait de conserver purement et simplement ne comporte pas de justification spirituelle ; la fidélité ne représente une valeur que dans la mesure où elle assure la permanence d'une âme ou d'un amour. Ceci revient à dire qu'on méconnaît entièrement le sens et la valeur de la fidélité si l'on y voit une forme d'inertie ; elle est et doit rester une flamme. Mais cette flamme ne saurait brûler à vide, elle est appelée à prendre corps dans des actes et dans des œuvres qui sont des témoignages.
La fidélité est liée à une ignorance fondamentale de l'avenir. J'ignore, en jurant fidélité à un être, quel avenir nous attend, et même en un sens quel être il sera demain ; et c'est cette ignorance même qui confère à mon serment sa valeur et son poids.
La Légende des siècles (1883)
Sortie : 1859 (France). Poésie
livre de Victor Hugo
Annotation :
L’ombre était nuptiale, auguste et solennelle ;
Les anges y volaient sans doute obscurément,
Car on voyait passer dans la nuit, par moment,
Quelque chose de bleu qui paraissait une aile.
Ruth songeait et Booz dormait ; l’herbe était noire ;
Les grelots des troupeaux palpitaient vaguement ;
Une immense bonté tombait du firmament ;
C’était l’heure tranquille où les lions vont boire.
Tout reposait dans Ur et dans Jérimadeth ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
Le croissant fin et clair parmi ces fleurs de l’ombre
Brillait à l’occident, et Ruth se demandait,
Immobile, ouvrant l’œil à moitié sous ses voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été,
Avait, en s’en allant, négligemment jeté
Cette faucille d’or dans le champ des étoiles.
La foi chrétienne hier et aujourd'hui (1968)
Sortie : 10 mai 2005 (France). Essai, Art de vivre & spiritualité
livre de Benoît XVI
Annotation :
« L’éternité n’est pas ce qu’il y a de plus ancien, ce qui était avant le temps, mais ce qui est tout autre ; elle est pour chaque moment du temps qui passe l’aujourd’hui, elle est pour lui présent ; elle n’est pas enfermée entre un avant et un après, elle est au contraire puissance du présent en tous les temps. L’éternité n’est pas à côté du temps, sans rapport avec lui, elle est la force créatrice qui porte tous les temps, qui englobe le temps qui passe en son unique présent et lui permet d’être. Elle n’est pas absence de temps mais domination du temps. Et parce qu’elle est l’aujourd’hui contemporain à tous les temps, elle peut aussi agir dans le temps, à chaque instant. »
Sermons du Carême du Louvre (1662)
1662
Sortie : 9 mai 2001 (France). Essai
livre de Jacques-Bénigne Bossuet
Annotation :
" Arrêtez les yeux sur Jésus et laissez-vous attendrir par la vue de ses divines blessures. Je ne vous demande pas pour cela, Messieurs, que vous contempliez attentivement quelque peinture excellente de Jésus-Christ crucifié. J’ai une autre peinture à vous proposer, peinture vivante et parlante qui porte une expression naturelle de Jésus mourant. Ce sont les pauvres, mes Frères, dans lesquels je vous exhorte de contempler aujourd’hui la Passion de Jésus. Vous n’en verrez nulle part une image plus naturelle. Jésus souffre dans les pauvres ; il languit, il meurt de faim dans une infinité de pauvres familles. Voilà donc dans les pauvres Jésus-Christ souffrant, et nous y voyons encore pour notre malheur Jésus-Christ abandonné, Jésus-Christ délaissé, Jésus-Christ méprisé."
"Mes frères, je vous en conjure, soulagez ici mon esprit ; méditez vous-mêmes Jésus crucifié, et épargnez-moi la peine de vous décrire ce qu'aussi bien les paroles ne sont pas capables de vous faire entendre. Contemplez ce que souffre un homme qui a tous les membres brisés et rompus par une suspension violente ; qui, ayant les mains et les pieds percés, ne se soutient plus que sur ses blessures, et tire ses mains déchirées de tout le poids de son corps entièrement abattu par la perte du sang ; qui, parmi cet excès de peines, ne semble élevé si haut que pour découvrir de loin un peuple infini qui se moque, qui remue la tête, qui fait un sujet de risée d'une extrémité si déplorable. Et après cela, ne vous étonnez pas si Jésus dit "qu'il n'y a point de douleur semblable à la sienne""
L'Ironie (1936)
Sortie : 1964 (France). Essai, Philosophie
livre de Vladimir Jankélévitch
Annotation :
La chose certaine est qu’il y a toujours une déontologie du vrai qui repose sur la saisie irrationnelle de l’occasion opportune et, comme nous dirions volontiers, de la flagrante conjecture. Ce n’est pas tout de dire la vérité, « toute la vérité », n’importe quand, comme une brute : l’articulation de la vérité veut être graduée ; car la pensée, en mûrissant, va de la lettre à l’esprit. Aux enfants le lait des enfants, aux adultes le pain substantiel des forts : c’est en ces termes que Paul s’adresse aux Corinthiens et aux Hébreux.
Il est « pédagogique » de laisser l’esprit s’égarer pour, insensiblement, l’infléchir vers une de ces vérités augustes qu’on n’aborde que de biais, – car leur vue nous briserait le cœur. Loin que ce rationnement des esprits ait quelque chose d’obscurantiste, nous devrions y voir plutôt un effet de la pudeur et comme le contrepoint de la sincérité grammatique, de l’inhumaine sincérité, vertu des pharisiens et des taureaux. Le respect du mystère combat efficacement notre fringale et nous empêche de brûler toutes ces étapes qui rendent nécessaires la majesté de la chose cryptique et l’étroitesse de la poitrine. Pour ne pas mourir de sincérité, nous consentons à être obliques et retors.
« Dans l’acrobatie du style, à tout moment nous devinons, derrière la lettre, la secrète respiration de l’esprit, et à tout moment le poids de la lettre risque de nous retenir au sol.
Pour lire ce qui n’est pas écrit, pour entendre ce qui n’est pas proféré, il faut que le silence se peuple. Nous dansons ainsi sur une corde tendue entre le trop et le trop peu, entre l’esprit famélique qui a voulu s’envoler d’un seul coup et l’esprit beau parleur à qui les mots ont fait oublier le sens. »
Le Tort du soldat (2012)
Il Torto del soldato
Sortie : 31 mars 2014 (France). Roman
livre de Erri de Luca
Annotation :
« L’ouïe est un sens prodigieux, elle reçoit à travers les murs, l’obscurité ou par-derrière. Par rapport à la vue, c’est un radar à côté d’une paire de lunettes. »
Ethique I
Sortie : 1 novembre 1998 (France). Essai, Philosophie
livre de Karl Barth
Annotation :
Au moment précis où il allait être question de l’homme, il était nécessaire d’affirmer que le fondement créateur de son existence était et est une histoire située dans le domaine et dans l’être divins, un mouvement à l’intérieur de Dieu, un appel de la divinité et une réponse unanime à cet appel.
in Dogmatique Ecclésiale
Le Partage de midi
version de 1906 suivie de deux versions primitives inédites et de lettres également inédites à Ysé
Sortie : 6 septembre 1994 (France).
livre de Paul Claudel et Gérald Antoine
Annotation :
Et maintenant, sauvez-moi, mon Dieu, parce que c’est assez !
C’est Vous de nouveau, c’est moi ! Et Vous êtes mon Dieu et je sais que Vous savez tout.
Et je baise votre main paternelle, et me voici entre vos mains comme une pauvre chose sanglante et broyée !
Comme la canne sous le cylindre, comme le marc sous le madrier.
Et parce que j’étais un égoïste, c’est ainsi que vous me punissez
Par l’amour épouvantable d’un autre !
Ah ! je sais maintenant
Ce que c’est que l’amour ! et je sais ce que Vous avez enduré sur votre croix, dans ton Cœur,
Si vous avez aimé chacun de nous
Terriblement comme j’ai aimé cette femme, et le râle, et l’asphyxie, et l’étau !
La nuit sera calme (1974)
Sortie : 1974 (France). Roman
livre de Romain Gary / Émile Ajar
Annotation :
J’ai quitté les Donovan me sentant assez coupable, coupable de croire que j’en savais plus long qu’eux, que j’étais mieux renseigné sur tout ça, que le XVIIIe siècle français m’avait éclairé sur tout et qu’on ne me la faisait pas, coupable de me sentir même un peu supérieur. Je tiens à dire ici à Mary Donovan qu’elle et son mari « savent » beaucoup mieux que moi, qu’ils sont beaucoup plus près de la vérité que je n’ai jamais été et ne le serai jamais, que les séquoias sont et restent en Amérique et que tout ce que le chercheur que je suis croit savoir est fait pour une bonne part de ce qui ne vaut pas la peine d’être connu
Le pays derrière les larmes
Sortie : 15 février 2016 (France). Poésie
livre de Jean-Pierre Lemaire
Annotation :
Tu n’as même pas frappé à la porte
(dans l’arbre, d’ailleurs, il n’y a pas de porte,
ou il y en a mille, et autant de fenêtres).
Tu as levé les yeux seulement, tu as dit :
« Descends vite. » Alors j’ai ouvert la maison
et les gens affluent autour de la table.
Les uns sont contents, les autres récriminent
mais moi, je suis bien, mon cœur a changé,
et toi, tu souris parmi les convives.
Simon de Cyrène
Le poids de la vie,
je n’en avais pas grande idée avant
qu’on me réquisitionne. Au retour des champs,
quand on m’a collé la croix sur le dos,
j’en ai senti la griffe énorme, inévitable :
le ciel a basculé avec les maisons
du faubourg, le mont chauve, la haie des visages
fripés par la haine ou la compassion.
Il a fallu marcher. Lui devant, moi derrière,
nous formions ensemble un étrange attelage
et la croix traçait par terre un sillon
aussitôt piétiné. Je soulevais un tiers
ou un quart de la charge ; il portait le reste
- un regard de sa mère m’a récompensé.
Arrivé en haut, j’ai pu repartir.
On lui réservait la dernière étape
à faire immobile, cloué sur le bois.
Je me suis redressé pour le voir en face,
lui confier le fardeau dont j’étais soulagé.
Il l’a reçu, tenu à bout de bras
Jusqu’au dernier soupir. Le chemin m’a roulé
en bas de la colline, muet, attendant
la réponse d’en haut. Du poids que j’ai connu
et qui ralentit mon pas aujourd'hui,
la part que je garde est humaine, légère.
Je marche à présent le dos droit, les yeux libres,
cherchant son visage entre ciel et terre.
Je le suis toujours.
Il est le pasteur confirmé du troupeau,
mais il n’a pas besoin qu’un ange le soufflette
pour rester humble. Il lui suffit d’entendre
le coq chaque matin.
The Long Loneliness: The Autobiography of the Legendary Catholic Social Activist (2009)
Sortie : 2009. Biographie
livre de Dorothy Day
Fabrizio_Salina l'a mis en envie.
Annotation :
Le Christ a vécu parmi les hommes. Le grand mystère de l’Incarnation, qui signifie que Dieu s’est fait homme pour que l’homme puisse devenir Dieu, était notre joie, une joie qui nous faisait désirer embrasser la terre en signe d’adoration, parce que ses pieds avaient voulu la fouler. C’était un mystère. Mais il y avait aussi les faits de la vie du Christ, qui est né dans une étable, qui n’est pas venu pour être un roi sur la terre, qui a travaillé de ses mains, qui a passé ses premières années en exil et le reste du début de sa vie humaine dans une vulgaire échoppe de charpentier à Nazareth
Au nom de la mère
In nome della madre
Sortie : 2006 (France). Roman
livre de Erri de Luca
Annotation :
Les mains croisées sur mon ventre plat, je touchais ma peau pour sentir au bout de mes doigts ma vie changée. C’était pour moi le premier jour de la création.