Classement Commenté \ Christopher Nolan

Annotation :

Mon film préféré.
Je pleure toutes les larmes de mon corps, plusieurs fois, à chaque fois que je le vois. C'est incontrôlable. Le scénario me fascine, l'histoire me touche au plus haut point, la réalisation est phénoménale, les acteurs sont d'un autre monde, la bande-son me hante encore et m'apaise à la fois. De la première scène à la dernière, du monde post-apocalyptique de poussière, nostalgique au possible, aux confins d'un trou noir qui côtoie l'impossible, de l'enjeu de la gravité, une perfection de ce que la science-fiction peut offrir, à l'amour d'un père pour sa fille qui transcende les dimensions, le film casse les codes et transmet par l'image mille messages, et au moins autant d'émotions. Sans doute perfectible, Interstellar reste pour moi une oeuvre parfaite même dans ses limites, qui me saisit à chaque moment, que je regarde émerveillé, frissonnant ou en larmes, et que je ne peux plus jamais oublier.
10

Annotation :

Christopher Nolan révolutionne une fois de plus tout un genre du cinéma avec ce chef d'oeuvre et joue avec notre perception de la réalité comme jamais en brouillant les lignes entre fiction et réalité. Avec une simple idée, une idée qu'il va tâcher de nous implanter tout au long du film sans qu'on ne le réalise : regarder un film, c'est rêver. Quand le spectateur est subjugué par les scènes d'action et la cinématographie révolutionnaire, il ne voit pas toutes les absurdités des événements. Et quand le fan s'interroge jours et nuits sur la symbolique de fin et les théories, il ne réalise pas forcément que l'essentiel, selon moi, se trouve non pas dans le dernier plan mais dans le shot précédent. En tout cas, le coup de génie d'Inception est d'associer le cinéma aux rêves : paradoxes, montage et temporalité trop parfaites, conception des décors, doutes et ambiguïtés qui règnent... Les personnages planifient l'inception comme Nolan construit le film. Cobb le façonneur de rêves ressemble au réalisateur de façon presque trop uncanny pour être une coïncidence. Un parallèle semble-t-il involontaire d'après les interviews ? Involontairement brillant quoiqu'il en soit. Cette idée est surtout la preuve que le cinéaste s'est donné corps et âme dans son projet, ce qui en fait de loin son film le plus personnel et retranscrivant le mieux son amour pour le cinéma. Inception est un hommage au septième art, et pourtant aussi un film vulgarisé dans sa forme et son genre, techniquement irréprochable, qui finit par totalement se fondre dans son propos. Tout comme les rêves du film sont superposés les uns aux autres, Inception recèle de couches à explorer. Inception devient alors une vraie expérience de rêve partagé en groupe, qu'on peut aussi appeler : "un film".
10

Annotation :

Comment construire une histoire ? Comment faire éprouver au spectateur les mêmes difficultés que le protagoniste, atteint d'amnésie à court terme ? Christopher Nolan façonne son chef d'oeuvre de façon à imiter la maladie de Leonard. Memento déroule son scénario néo-noir en alternant entre des scènes colorées racontées à l'envers où la vérité change à chaque instant, entrecoupées d'une interview en noir et blanc apportant de nouveaux faits objectifs. Les tattoos, le polaraoïd et le rythme répétitif des scènes en couleur agissent comme ancres auxquelles on peut se rattacher pour se guider, chaque nouvelle scène placée chronologiquement avant la précédente ouvrant sur un cliffhanger que la prochaine scène s'attachera à expliquer et éclairant celle qu'on vient de voir d'un autre point de vue. Chaque timeline est ensuite ponctuée de flashbacks qui respectent le code couleur de la scène actuelle et qui viennent nous éclairer sur le passif de long terme de Léonard. Après avoir réglé son récit comme du papier à musique, Memento commence à s'émanciper de ses règles et à mesure que les deux timelines convergent, nous pousse à remettre en question tout ce que l'on voit à l'écran. Au terme du climax du film, en réalité le milieu de l'histoire si l'on rassemble le puzzle, la frontière entre subjectivité et objectivité est brisée, les voiles sur les deux intrigues tombent et nous laissent sans voix tandis que le personnage choisit de se mentir à lui-même pour rester heureux et garder une raison d'avancer, une fin extrêmement glauque et osée. Tout est parfait dans ce thriller ultime peaufiné dans les moindres détails. Bluffant !
9

Annotation :

Comme un tour de magie, je n'ai pas vraiment été saisi la première fois. Contrairement à ce qu'énonce le film, je suis en fait beaucoup plus sensible au tour qu'au prestige en lui-même. Plus intéressé par le mystère que par la conclusion tonitruante. Pourtant en le revoyant, il est extrêmement fascinant de voir à quel point le récit est aussi bien fignolé et résonne autant avec le propos du film sur la magie. Toute la métaphore entre la construction d'un film et la construction d'un tour rend le visionnage génial à plus d'un degré, et les ruptures du quatrième mur jouissives ne servent pas qu'à exhiber le talent de narrateur de Christopher Nolan, mais aussi à nous berner encore plus afin de mieux nous immerger dans l'intrigue. Résultat, trois niveaux de lecture : d'abord, un drame autour de deux magiciens et leurs tours, aussi bien leurs illusions sur scène que leurs secrets vis-à-vis de nous. Ensuite, une dissection du processus de montage d'un film, une leçon de structure et de foreshadowing. Enfin, une illusion sans prestige et une morale pour ceux ayant tenté de déchiffrer le film par le deuxième sens de lecture, en nous laissant volontairement dans le brouillard, une audience interloquée et souhaitant en savoir plus. Bien sûr, il a fallu plus d'un visionnage pour se rendre compte de tout le génie de l'histoire, preuve que le film aurait pu être rendu plus accessible et chaleureux, tant au niveau de la réalisation que des personnages et de la promesse - les règles du scénario. Mais si l'on est prêt à ravaler notre ego et replonger dans ce tour pour tenter d'en apprendre plus, on y trouve une leçon de cinéma !
8+

Annotation :

En faisant le pari fou de ne développer quasiment aucun personnage, ce qui devrait aboutir à un détachement total de ma part, Christopher Nolan m'a fait en réalité m'attacher à chacun des soldats sur cette plage sans aucune exception. C'est à toute la situation qu'on s'identifie, et à cette lutte générale pour la survie humaine. Les personnages ne pleurent pas leurs compagnons de guerre qui tombent tout au long du film. Ils sont bien trop habitués à l'horreur pour cela. Tout n'est que suggestion que l'on perçoit en voyant les magnifiques images, et que l'on ressent en frissonnant à l'écoute des bruitages. Il s'agit pour moi d'un bel exemple de la règle du "show, don't tell" appliquée à la lettre. D'un film qui faire dire très peu, mais qui dit beaucoup. D'un scénariste qui se met totalement en retrait pour ne laisser que du vrai, du brut. Je me serais cru avec les personnages tout au long du film. "Dunkerque" nous saisit dès la superbe scène introductive et ne nous lâche plus jusqu'à la fin. Brut.
8-