Classement Commenté \ Hunger Games

Annotation :

"Puisse le sort vous êtres favorable !" Introduction mythique mais aussi en quelque sorte minimaliste à l'univers fascinant des Hunger Games. Si malheureusement, autant en tant qu'adaptation de série de romans qu'en tant que premier opus d'une saga de cinéma, l'univers et les personnages manquent un peu de développement, il apparaît déjà extrêmement riche et ne demande qu'à être approfondi. Le film est aujourd'hui un poil daté, surtout par la réalisation bancale ultra à l'épaule qui peut parfois servir le récit, mais aussi parfois donner la migraine. Malgré tout, la nostalgie qu'on ressent à y revenir après avoir vu l'ensemble de la saga élève la note. La force du concept des jeux de la faim permet également au film de se défendre en tant que guilty pleasure. Mais au-delà de cela, les enjeux politiques de la dictature du pays sont déjà très bien dessinés (la scène du quartier 11 suite à la mort de Rue, très explicite), et l'hypocrisie de la caméra et du divertissement en font déjà un blockbuster plus réfléchi qu'il n'y paraît. D'autant qu'avec l'excellent épilogue du film qui lance la saga, on sent déjà le potentiel de toute celle-ci. Dernièrement et pas des moindres, le film est complètement porté par Jennifer Lawrence, dont le charisme en tant que Katniss l'ont propulsé à raison au titre de superstar. C'est selon moi une héroïne qu'on attendait vraiment au cinéma : complexe, têtue, courageuse, bienveillante, intransigeante, pleine de préjugés et de bonté et de contradictions, mais motivées par un amour pour sa sœur, pour sa vie, pour sa liberté et son indépendance. Deux excellentes scènes : le sacrifice pour Prim et la mort de Rue, assurent l'alpha et l'omega du combat de Katniss, qui captive tout du long. The Hunger Games pose des prémices parfois incertaines, encore ancrée dans un teen-drama cliché, mais avec différents degrés de lecture, des scènes extrêmement puissantes et une héroïne culte, les braises de la révolution sont déjà là.
8

Annotation :

Second opus à la croisée des deux facettes d'Hunger Games : la première partie, qui met en avant le simulacre des vainqueurs devant les caméras, annonce la tournure délicieusement méta de la série à venir, avec un faux-couple Peeta/Katniss qui ne dupe personne parmi Panem ou le public du film, tandis que les révoltes s'amplifient au sein des Districts. Les personnages sont plus fouillés, la réalisation est enfin à la hauteur du propos et l'univers se noircit comme il se doit. La seconde partie est plus classique... en apparence seulement. Comme Katniss, nous n'avons pas vraiment envie de retourner dans l'arène après cela et l'électrochoc est assez difficile à encaisser. Mais si les jeux de l'Expiation partagent quelques défauts avec les premiers, notamment une abondance de personnages secondaires présentés après déjà deux tiers de film, ils sont beaucoup plus intéressants que les premiers jeux de Katniss. D'une part d'un point de vue spectacle au premier degré, ils sont beaucoup plus pervers et font face à un public averti et conscient. D'autre part il est révélé au détour d'un twist final assez remarquable que ces jeux n'étaient rien de plus qu'une supercherie, à l'instar de toute la première partie du film. Rien qu'un show destiné à nous berner afin de déclencher l'étincelle de la révolution. L'effet est très réussi, et les deux moitiés du film trouvent leur point de chute dans la conclusion saisissante où tout prend feu.
8+

Annotation :

Bien loin de ses débuts en film d'action pour ados hasardeux, The Hunger Games mûrit et se transforme complètement au cours de ce troisième opus qui repose sur un jeu entre le geai moqueur, les caméras et le public du film. Malheur à ceux qui s'attendaient à d'énièmes jeux pervers, Mockingjay va plutôt choisir de montrer comment se construit une révolution à travers le hard mais surtout le soft-power. Le film tente pour cela de répondre à la question : "comment façonner un symbole ?". En se basant sur le matériel des deux premiers films, qui sont ouvertement cités comme source d'inspiration ("A quel moment Katniss vous a-t-elle le plus ému ?"), Mockingjay détourne complètement l'histoire de Katniss et cannibalise cette dernière pour ouvrir une réflexion en prenant le public à parti, par les sentiments. A ce titre, avoir repris des images du trailer du film et son slogan final ("Join the Mockingbird, Join the Revolution") au sein des clips de propagande du District 13 est un véritable coup de génie.

Tout le scénario du film est alors à propos de sa propre élaboration. C'est comme si les créateurs (Suzanne Collins à la base et Francis Lawrence ensuite), constatant le succès de la saga lors de ses deux premiers opus, décidaient ensuite de disséquer l'histoire des Hunger Games avec un film méta "voici comment il faut s'y prendre". Katniss n'arrive pas à prétendre être une héroïne ? Il faut la placer sur le terrain pour y déclencher du "vrai". Les habitants de Panem n'y verront que du feu... et le public du film y trouvera satisfaction. Le District 13 a son geai moqueur, la Terre a sa nouvelle star mondiale. Et au milieu de tout cela, ni le public, ni Katniss ne distingue plus le vrai du faux, notamment avec l'exemple des images de Peeta, ce qui finira par briser les personnages.

Mockingjay est donc un film à lire à plein de niveaux. Il reste à la base un appel sincère à la révolution, basé sur la distinction thématiquement très solide des opprimés VS. oppresseurs. Le rythme posé permet à l'histoire de respirer, à l'univers de s'étendre avec la présence accrue des autres districts, à l'émotion de surgir : le passage "The Hanging Tree" est notamment une petite merveille. Mais Mockingjay est également une réflexion cynique sur la construction de symboles pour cette révolte. Et enfin, c'est un vrai propos sur la construction d'un film, d'une icône avec son public et le rapport entre ce dernier derrière l'écran et la légitimité de ce qu'il voit.

Un petit bijou.

Annotation :

Conclusion logique, glaciale et brutale. L'aboutissement de tout ce à quoi la saga (en particulier les opus 2 et 3) amenait. Si toute la première partie du film apparaît comme un épisode "3 bis" avec un ton très similaire à la première partie de Mockingjay, il entame tout de même quelques changements thématiques clés. La révolution ne semble plus être qu'une formalité, qu'une vague déjà trop grande pour être arrêtée et qu'il faudra maintenant contrôler, aiguiller, discuter. Le scénario se concentre sur un point qui personnellement, me fascine dans la fiction : que faire après une révolution réussie ? Tout l'épilogue du film suivant la scène déchirante avec Prim est absolument sensationnel. Le film va même beaucoup plus loin que le roman à ce niveau-là et choisit de laisser volontairement un doute quant à qui a vraiment lancé les bombes et mis un terme de la pire des façons à la guerre civile. Snow, ou Coin ? Katniss est complètement brisée par les événements, peut-être plus encore que par les jeux - quoique c'est sans doute la preuve qu'il n'y a aucun vainqueur aux Hunger Games, simplement des survivants qui ne sortent vraiment jamais des jeux. Doutant constamment sur ce qui est réel ou pas, au même titre que Peeta, elle perd tout dans cet acte. Mais choisit de faire un choix final faisant résonner son libre-arbitre en tuant Coin. Sans savoir forcément si c'est le bon choix.

Le fait qu'elle choisisse de retourner dans son ancien District désormais désert, de renier Gale, de rester avec Peeta, donne une aura tragique à cette prétendue happy-end que personne ne semble comprendre. Si elle considère son amour pour Peeta réel, elle n'aura jamais la certitude qu'il ne s'agit rien de plus qu'une fatalité à laquelle elle a été complètement formatée et s'est résignée. Pourrie par tous les côtés, depuis le tour des vainqueurs du deuxième opus, en passant par la propagande du District 13 qui l'a dépossédé de ses choix et emprisonné dans son statut d'emblème, jusqu'au public lui-même qui cherche à la contrôler (ce qui se retrouve dans le triangle amoureux avec Peeta et Gale), Katniss n'a fait qu'être influencée et s'est perdue. La vraie révolte, c'était donc pour elle, et ses derniers mots ne sont qu'à moitié joyeux.

Je ne développerai pas plus sur le reste du film puisque la majorité de ce que j'ai dit pour l'opus 3 s'applique. C'est une conclusion tellement riche et fascinante, une fin parfaite : osée, douce-amère et en apothéose.

La fin d'une grande saga.
9