Début de siècle : les livres

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Il y a une grande maîtrise chez Sôseki et en particulier dans ce livre. Regardez-le prendre son temps, déplier son récit progressivement avec cette fausse impression que l'on fait du surplace, creuser en profondeur son personnage principal, attachant, ambigu, dont on ne sait si il est un marginal, un paresseux, un sage ou un idiot, éviter tout spectaculaire pour restituer les sentiments au plus près. Un autre aurait brûlé les étapes pour en venir au roman d'amour... Mais même ce roman est plein de détails tragiques, le quotidien lui colle à la peau, les histoires d'argent qui reviennent sans cesse comme pour empêcher les sentiments les plus romantiques de prendre leur envol. Et pourtant, même quand le terrestre semble prendre le dessus, Sôseki offre une dernière page absolument fulgurante, qui montre que sa littérature peut lancer des éclairs. Avec "Et puis" il trouve un subtil équilibre entre tradition et modernité, entre passion et renoncement. Il est aussi fascinant d'observer un personnage prévisible qui sort tout à coup des rails d'une vie toute tracée et en ce sens, c'est un roman du dérèglement.

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Roman d'aventures absolument fascinant paru au début du siècle sous forme de feuilleton, "Le bâtard de Palerme" n'est que le premier tome de la trilogie des Beati Paoli qui décrit le fonctionnement d'une organisation secrète, ancêtre de la Mafia (mais ici version Robin des bois, une Mafia qui fait la justice pour le peuple). Luigi Natoli est un Alexandre Dumas sicilien et "Le bâtard de Palerme" l'équivalent des trois mousquetaires, le parallèle est facile à faire (thématiques, écriture, rythme) et parfaitement justifié. Natoli est même souvent supérieur à Dumas, le roman historique nous étant moins connu et tout autant savoureux. L'idée maître du livre est grandiose : mettre au pouvoir un jeune homme, par idéal et par justice, privé de ses droits par un duc tyrannique. On passera par mille rebondissements, duels, empoisonnements, évasions etc pour s'apercevoir que le jeune homme est en réalité aussi imbu de lui-même, arrogant et antipathique que le monstrueux duc. C'était déjà le thème d'"Elena" de Zviaguintsev : qui vous dit que vos efforts pour un autre seront récompensés ? Difficile ici de tout à fait tracer une ligne entre les bons et les méchants, tant les rôles évoluent, s'inversent, les intérêts divergent. Tout devient politique. Sauf pour notre chevalier Blasco qui place l'honneur avant les calculs. À la fois simple, immense et vertigineux. Le tome 2 ! Viiite !

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Je ne sais pas quelle influence Hesse a eu sur ses contemporains au moment de la sortie de son magnifique premier roman "Peter Camenzind" (et déjà premier Bildungsroman contenant en germe tous ses livres) mais on dit que le texte connu un grand succès et il y a dans ces pages la même incompatibilité d'être au monde qu'on trouve chez le jeune Walser ("Les enfants Tanner" sort en 1907) ou le jeune Musil ("Le désarroi de l'élève Törless", 1906). Ils ont tous les trois la vingtaine (Hesse a 27 ans à la sortie du roman), un sentiment de malaise et pourtant une vitalité absolue, à moins que ce ne soit un trop plein de vie. La prose de Hesse est splendide, son hymne à la nature (Dieu est dans la nature) n'a rien perdu de sa force aujourd'hui. Qu'il doit être impressionnant et bouleversant ce roman si on le lit à 18 ans ! Il y a une puissance, une générosité, une dépression en germe qui nourrit d'autant plus les moments de vie, une intensité, le sentiment d'une immédiate nostalgie : le présent est trop éphémère, on vit et déjà on se souvient qu'on vivait et qu'on ne vit plus. "Telle fut l'histoire de ma jeunesse. Quand j'y réfléchis, il me semble qu'elle fut courte comme une nuit d'été. Un peu de musique, un peu de vie intellectuelle, un peu d'amour, un peu de vanité - mais c'était beau, riche et coloré comme une fête d'Eleusis."

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Cinq jeunes révolutionnaires préparent un attentat terroriste contre un ministre conservateur. L’attentat est déjoué et ils se retrouvent emprisonnés et condamnés à mort par pendaison après un procès éclair et à huis clos. Le court roman d’Andréïev se concentre brillamment sur ces jours, ces heures, en cellule, isolés les uns des autres et face à la mort inéluctable qui les attend. Il y a mille détails et observations psychologiques qu’Andréïev dépeint ici. La nature humaine n’est jamais autant à nu et paradoxale que dans ces instants ultimes et intimes. Les courageux tremblent, certains ne ressentent rien, on s’effondre ou on se sent vivre plus intensément que jamais. Aux portes de la mort flotte aussi un ultime vent de liberté, l’envie d’aimer une dernière fois, toutes sortes d’élans qui dans l’urgence révèlent ces hommes et femmes qui ne sont plus en mesure de rien cacher. Eux qui bravaient hier encore la mort sans la craindre, sont maintenant victimes des circonstances et effrayés par une mort qu’ils n’avaient jamais considérée. Et Andréïev examine et décortique ces esprits en ébullition.

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Cette histoire d'abord hors-norme de Pygmalion inversé m'a emporté. Il y a de belles choses à en faire, la collision de deux milieux, la découverte de la littérature, de la culture même !, l'histoire d'amour qui n'ose se déclarer, mais tout ca rentre doucement dans le rang, quand on comprend que l'autobiographie est avant tout une occasion pour Jack London de s'offrir une magnifique (je reconnais) publicité pour sa ténacité, sa grande science, son talent immense, son courage etc. Il y a clairement de l'amertume, un air revanchard d'en vouloir au monde entier - je suis trop bon pour vous. Le lecteur, lui, qui n'a rien demandé se ferait engueuler pour un peu, d'arriver trop tard comme un mouton de plus suivant le troupeau. Bien sûr sa trajectoire soulève des questions légitimes et intéressantes sur les maisons d'éditions et à l'époque les magazines littéraires... Et oui, le style est très habile, on repose difficilement le roman une fois qu'on a fait la connaissance de Martin Eden. Eden, tiens, un nom d'idéaliste, de rêveur, d'impossible ! Parfois, quand il écrit sur les injustices du monde et ses contemporains, London a tout de même des airs de Steinbeck en miniature, sans la sagesse et la plénitude de l'homme en complète maîtrise de son art.

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Celui qui cherche ici un traditionnel roman d'espionnage voire une simple intrigue policière en sera pour ses frais. Conrad, comme souvent, se réinvente. Tantôt politique, virulent, pamphlétaire puis dans sa deuxième moitié plus psychologique, "The Secret Agent" avance, malgré une explosion et un meurtre, dans un faux rythme, tout sauf spectaculaire. Il faut prendre son mal en patience car une force insoupçonnée se dégage lentement des pions mis en place dans un premier temps. Les événements arrivent toujours comme à rebours, en deux bandes, une idée / sa conséquence pratique, la théorie / la mise en action, l'explosion / la déflagration. De la même manière, les personnages qui ont l'air faussement simple, enfoncés dans leur petit quotidien, n'attendent qu'un déclic pour changer et se révéler (au lecteur, à eux-même). Le vocabulaire suranné a ses charmes. Un texte court qui se mérite.

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Et dire que James envisageait à l'origine d'en faire une nouvelle ! Je pensais constamment en lisant ces plus de 600 pages, pourquoi ne pas raconter cette histoire en 50, peut-être 100 pages ? N'y a-t-il pas une forme de complaisance chez James à écrire interminablement ses jolies phrases comme si le récit en lui-même n'était plus essentiel, même à vrai dire secondaire ? On dira que c'est une forme de modernité ou que sais-je, une élégance indémodable, mais je ne dois probablement pas être assez sensible au style d'Henry James, c'est aussi simple que ça (la phrase longue mais jamais coulante, sans fluidité parce que constamment interrompue et entrecoupée, incapable d'aller au bout d'elle-même). Par ailleurs, je suis absolument admiratif de sa remarquable science du détail, un personnage croise les jambes, et il va dériver 4 pages sur ce que ce croisement de jambes peut signifier. Il y a un art subtil et sensible de l'observation à son paroxysme, une forme de génie, d'ultra-perception de ce que les silences nous disent, des sous-entendus également, si bien que les dialogues sont quasiment des conversations entre diplomates : personne ne dit jamais rien mais entre les lignes on cède du terrain, on avoue à demi mot, et des pages d'analyses suivent ses conversations inachevées. C'est probablement un genre unique en soi, et il faut reconnaître que l'ensemble est impeccablement tenu pour encore davantage faire ressortir les quelques moments où l'émotion surgit comme impossible à contenir plus longtemps. La scène du "vivez" etc et celle de la ballade façon tableau impressionniste vers la fin du roman en sont de parfaits exemples. De très belles scènes qui gagnent en intensité avec le temps, longtemps encore après la lecture du livre. Mais qu'elles ne fassent pas oublier que "Les ambassadeurs" fait facilement 400 pages de trop.

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Avec "La jungle", Upton Sinclair jeune journaliste signe son premier livre mais il le fait à l'américaine, décomplexé : un pavé à la fois pamphlet politique, enquête sur les abattoirs de Chicago, roman sur l'immigration d'une famille lituanienne depuis leur débarquement jusqu'au terrible désenchantement. Donc, comme Steinbeck le fera avec "Les raisins de la colère", Sinclair se positionne à cheval en fiction et non-fiction mais là où Steinbeck alterne pour ainsi dire les chapitre, Sinclair mélange les deux matières pour écrire un roman documenté ou un immense article fictionnel. On sait que le livre a fait changer les conditions de vie dans les abattoirs, notamment les conditions sanitaires qui ont du être réévaluées. C'est bien sûr une formidable publicité pour un livre qui se penche avant tout sur les inégalités sociales (et il y va ! un certain nombre d'horreurs insoutenables émaillent le récit) pour mieux nous livrer son couplet communiste dans les dernières pages. Vous jugerez par vous-mêmes ce qui a vieilli ou pas mais la misère, le froid, la faim sont intemporels et il y a de bien belles pages qui ne sauraient laisser personne indifférent.

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C'est toujours avec plaisir que je reviens vers Forster qui a ce talent pour articuler des romans autour de pensées, ici c'est plus ou moins passion-raison, Howards End c'est souvent modernité-traditions pour faire vite, bref ça pense et les dialogues sont réussis dans ce sens. Là avec "Room with a View" on est dans une oeuvre plutôt de ses débuts et les personnages et les situations sont parfois un poil caricaturaux mais c'est pour mieux nous emmener où il veut et finalement il n'y a rien de simple pour notre héroïne... Le roman est coupé en deux à dessein entre une première partie ensoleillée, dans une Italie fascinante et un peu effrayante, pleine de vie et de romance et puis une deuxième dans une Angleterre bien sage, sans surprise, sans doute trop confortable et convenue. Entre les deux un jeune homme qui se transpose d'un monde à l'autre. Qui réconcilie le meilleur des deux ? Comme Maugham, Forster est capable d'écrire ces romans d'amour intelligents qui sont un régal et de vrais divertissements de qualité.

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Parce qu'il a touché la mort, Michel reconsidère la vie. Mais croyant découvrir la liberté (se raser la barbe, partir voir le monde, coucher avec de jeunes garçons), il découvre sa propre anarchie, son envie de provoquer, de transgresser. Autobiographique ou pas, ce roman est peut-être le meilleur de son auteur, dans ses détours, dans ses contrastes. Le style y est remarquable même quand le goût pour l'aphorisme y est prononcé. Un personnage magnifique : Marceline, femme aimée (sans amour), enceinte (sans enfant). Un texte trouble et ambigu qui évoque la force d'un égoïsme, son élan vital. "L'immoraliste" laisse volontairement un parfum amer.

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Encore un roman délicat et impressionniste qui dit combien l'amour et la jeunesse sont l'été de la vie. On sent, malgré la légèreté de l'ensemble, comme un poids sur le coeur, une contrariété, au milieu de cette nature si fragile. Un secret pèse sur les personnages, et ce qui ressemble au premier émoi d'un adolescent est peut-être en réalité le dernier soupir de langueur d'un père fatigué par l'amour. Entre un tennis et une scène de chasse, on étreint une domestique. Je vous parle d'un autre temps, mais Eduard von Keyserling le capture d'un trait comme un peintre le fixerait d'un pinceau habile. La chaleur, une certaine lumière, les sentiments exaltés, et voilà, tout est fini, tout est mort, c'est l'âge adulte, morne plaine.

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Un grand classique que j‘avais acheté à l‘adolescence sans jamais le lire. London ouvre son roman sur une scène haletante de course-poursuite au milieu du wild. Mais quand le deuxième chapitre arrive et qu‘il centre soudainement son récit autour du louveteau, j‘ai eu peur de me retrouver à nouveau chez Colette, au milieu des mignonnes petites bêtes. C’était mal connaître London ! Ce deuxième chapitre est une merveille et finalement peut-être la plus partie du livre. Le jeune loup découvre qu‘il peut sortir de la grotte, que sa mère n‘est pas le centre du monde. Il s’aventure pour la première dans la forêt, apprend à chasser, London à son meilleur. Ensuite celui qui deviendra Croc-Blanc se retrouve chez les hommes, les indiens d‘abord et puis l‘homme blanc. On est quasiment dans Au hasard Balthazar, à passer d‘un maître à l‘autre et voir tout ce que l’humanité a de peu reluisant. C’est une fable férocement critique où le loup doit défendre sa vie dans des combats de chiens en forme de paris sportifs. Mais il découvrira aussi l‘amour et la fidélité. Beau et vrai, simpliste diront les critiques, voilà un roman que j‘ai lu à plus de 40 ans avec grand plaisir !

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Petit fascicule d’à peine 50 pages, Sur la lecture était à l’origine la préface que Proust avait écrit pour sa traduction d’un roman de John Ruskin. Mais Proust oblige, le texte est aujourd’hui publié comme tel. La première page est une merveille. Proustienne bien sûr, la lecture étant cette bulle au cœur de l’enfance où le temps se dilate. Convoquant mémoire et émotion à travers ses longues phrases, il touche au plaisir fondamental de disparaître en soi, de s’oublier dans un texte. Ensuite Proust théorise un peu. Il excelle dans l’émotion, moins dans la démonstration.

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L’indéniable plaisir de lecture est toutefois à nuancer : Arthur Conan Doyle maîtrise maintenant tellement ces histoires d’une trentaine de pages, qu‘il a développé, malgré lui sans doute, une mécanique un peu trop bien huilée. Au long de ces 13 nouvelles inventives, on reconnaît très vite les motifs, la structure redondante, et quelques facilités. On n’est pas au tome 6 pour rien. La langue est simple, les déductions de notre détective épatantes, et Watson joue son rôle de témoin, toujours un peu en retard sur les événements (ou plutôt au niveau du lecteur, lui-même toujours à la traîne derrière Sherlock Holmes). Tout cela est habile et on comprend le succès de ces recueils. ACD force parfois un peu les choses dans des directions assez improbables mais peu importe, on est là pour prendre du plaisir et s‘amuser à émettre nos petites hypothèses. Pour autant je trouve que le livre ne tient pas tout à fait sur la longueur.

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Texte très court qui restitue la fable du peintre antique Parrhasios et de son tableau «Prométhée». La légende veut qu’il ait acheté un esclave au marché et torturé le malheureux pour que sa peinture exprime à la perfection la douleur de Prométhée, comme jamais capturée auparavant. L’imitation entre l’art et la vie et ses limites, quand l’artiste, au déni de l’humain, se prend pour un Dieu. Mais Louÿs ne se contente pas d’être fort, de son écriture précise et très visuelle, il ose aussi une dernière page magnifique et ambiguë : la foule, venue en masse pour condamner ce fou de Parrhasios pour son outrage est confrontée au tableau, elle est frappée par l’émotion et finit par applaudir l’artiste ! L’œuvre justifie tout ?

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L'histoire d’une ascension fulgurante. Carrie monte de sa campagne pour découvrir Chicago et s’installer dans une banlieue minable chez sa sœur. Mais de rencontres en rencontres, parce qu’elle est séduisante et se révélera pragmatique et même une actrice talentueuse, Carrie finit au sommet, adulée par le tout Broadway. Qu’on veuille faire de Dreiser le Zola américain m’intrigue un peu, il y a ici beaucoup de rebondissements parfois à la limite du vraisemblable mais peu de descriptions réalistes d’un milieu. Dreiser ne fait pas du Upton Sinclair non plus, son Chicago est simplement une toile de fond pour autre chose, un jeu de séductions et de dupes où l’argent prend les décisions à votre place. Sorte de super page-turner qui a un tout petit peu vieilli, « Sister Carrie » est assez stimulant pour qu’on pardonne à Dreiser les défauts de ce premier roman qui à l’époque est passé totalement inaperçu.

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Je ne veux pas faire de faux procès à Booker T. Washington, ce grand homme. Sa vie évoque les grands, de Martin Luther King à Nelson Mandela et il a inspiré un nombre considérable de noirs en leur donnant la possibilité, quelque soit leur milieu, d'accéder à un niveau supérieur d'éducation. Le problème n'est pas l'homme, il est admirable. Le problème, c'est le livre. Distinguons le contenu du contenant parce que sur le fond, je soutiens bien entendu les principes de Booker Washington. Le premier tiers du livre est le plus autobiographique et contient les pages les plus émouvantes, sa petite enfance comme esclave, l'abolition, son apprentissage de la lecture et sa soif de savoir, tout ça est splendide. Ensuite vient le coeur du texte qui est en réalité une grande campagne pour soulever des fonds. Il explique combien les dons ont aidé ses projets, qu'il fait attention à chaque centime, que le dénuement ne lui a jamais fait peur mais que, bon, l'argent n'est pas si mal après tout etc. Il revient en long et en large sur ses talents d'orateur et les bienfaits de son école. On se demande presque pourquoi le livre ne vient pas avec un formulaire pour envoyer notre contribution directement en Alabama. Mais cela ne retire rien à l'incroyable destin de cet homme et à son travail forcené pour la justice sociale dans le sud.