Ensemble Modern (discographie)

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En 1991, l'Ensemble Modern approche Zappa en vue d'une collaboration pour le festival de musique contemporaine de Francfort. Le 17 septembre 1992, "Yellow Shark" est interprété en ouverture du festival. L'accueil est enthousiaste et unanime. Zappa rallie enfin les amateurs de rock, de jazz, de baroque, de classique, de toute forme de musique en fait, tous réunis à l'opéra de Francfort pour ce qui sera l'ultime travail de Frank.

L'album présente donc l'intégralité de ce spectacle (moins deux morceaux). L'ambiance y est plus que contemporaine même si les Mothers sont une fois de plus revisités ("Uncle Meat", "Pound For A Brown", "Dog Breath Variations"). Seulement que penser d'une musique dite 'sérieuse' lorsque l'orchestre de musiciens dit 'sérieux' s'empare soudain de paquets de chips qu'ils secouent, d'un seau rempli d'eau, de coquillages, ... Sérieux ! L'univers Zappa est plus que jamais unique et la qualité de ses compositions atteint ici une perfection divine. Même un morceau comme "The Girl In The Magnesium Dress" composé pour le synclavier, d'une complexité telle qu'il semble injouable par des humains, est ici restitué avec toutes ses finesses. Le public fera une ovation à Zappa et celui-ci retournera dans les coulisses, un sourire de gosse sur le visage et les larmes aux yeux. Zappa a gagné son pari, la musique sans règles et sans carcan existe.

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Die Winterreise de Hans Zender se veut une «interprétation composée» de l'oeuvre éponyme de Schubert. Le terme «interprétation composée» fait référence à deux éléments. Tout d'abord, à la configuration sonore. Le piano schubertien est remplacé par un ensemble d'instruments, calqué sur les moyens de l'Ensemble Modern. Le second élément est la liberté que prend Zender par rapport à l'oeuvre. Il ne s'agit pas d'une orchestration de Winterreise, mais d'une véritable réinterprétation écrite qui se permet d'ajouter des introductions, de redoubler les phrases, voire de les amplifier.

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Passionné de jazz, le compositeur britannique classique Mark Anthony Turnage s'est essayé à un troisième volet de huit minutes et demie pour l'Ensemble Modern, et il est finalement devenu cette suite de 69 minutes, souvent sinistre, complexe et tentaculaire pour orchestre de chambre et solistes de jazz. Les images sur le coffret à CD sont terrifiantes - un portrait du compositeur hagard et une seringue baignant dans le sang - et, en effet, certaines parties de l'œuvre sont des élégies pour le frère de Turnage, qui était un héroïnomane. Sensationnel si l'inspiration peut être, la vraie histoire est la capacité de Turnage à réaliser une alliance classique / jazz contemporaine sérieuse et vitale. Que ce soit en s'appuyant sur un pouls ou pas, l'écriture a une sensibilité jazz et Turnage impose toujours son langage harmonique, sans tenter de se plier aux oreilles délicates. Il n'y a pas beaucoup de liberté pour les solistes de jazz stellaires - le guitariste John Scofield, le saxophoniste Martin Robertson, et le batteur Peter Erskine - de prendre leur envol, mais les musiciens ont l'occasion de faire étalage de leurs styles distinctifs. Scofield brûle vraiment dans "Needles" et lui et Erskine descendent à un brouillage funky deuxième ligne de la Nouvelle-Orléans dans "Crackdown". Sinon, l'écriture de Turnage s'adapte avec une étonnante proximité au son unique de Scofield et à son sens du temps délibérément biaisé, ainsi qu'à la manière Erskine, et il évoque son idole Miles Davis dans la longue finale, "Dispelling the Fears". Comme Peter Rundel et l'Ensemble Modern l'ont interprété de façon experte et transparente, ce n'est certainement pas un divertissement d'écoute facile, mais il vaut la peine d'être fendu.