Fausses citations

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Bidar se commet avec deux fausses citations dans un seul livre. Deux fausses citations attribuées à des philosophes. Double faute professionnelle pour cet inspecteur d'académie qui a enseigné pendant 10 ans. La première : "pour étouffer par avance toute révolte", qu'il attribue à Günther Anders, son "maître en la matière". Ce texte fameux sur internet, attribué tantôt à Anders, tantôt à Huxley, est en réalité un texte de 2007 écrit par Serge Carfantan , philosophe covidosceptique et complotiste au dernier degré. La seconde est une déformation de l'oracle de Delphes : "connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux", déformation trompeuse qui semble être apparue à la fin du XIXe siècle dans des milieux proches de la théosophie.

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https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/isere/grenoble/coronavirus-grenoble-auteur-science-fiction-jean-pierre-andrevon-avait-imagine-pandemie-1821360.html
Alors qu'il vient de publier ce livre, dans lequel il évoque Le meilleur des mondes, il attribue à ce même livre, à Huxley, un texte bien célèbre sur les réseaux sociaux : "pour étouffer par avance toute révolte". Et le lit, ou le récite, devant un journaliste en plein milieu d'une rencontre pour la télé. Euuuuuuuuuuh. Quelqu'un peut m'expliquer ? Il écrit sur Le meilleur des mondes. Je veux bien qu'il ne le relise pas s'il le connaît bien. Mais s'il le connaît bien, comment peut-il lui attribuer un texte un peu crétin qui ne peut pas s'y trouver ?

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Ferry attribue à Louis Pasteur un propos qu'il ne peut pas avoir tenu : "un peu de science éloigne de dieu, beaucoup en rapproche". Il ne peut pas ignorer que cette phrase est en réalité de Francis Bacon, j'ose l'espérer en tout cas, et il ne devrait pas ignorer que Pasteur n'était pas croyant. Tous ses proches affirment qu'il n'allait pas à la messe que par obligation, qu'on ne l'y voyait ni chanter, ni prier. Il est mort sans prêtre et sans signe religieux. Il était spiritualiste, c'est à dire que pour lui, dieu, la survie de l'âme après la mort, sont de réalité que psychologique. On a besoin, porté par l'émotion (le deuil), de les poser pour ne pas désespérer. Au delà de ce besoin psychologique, on ne peut rien en dire. Il n'hésite pas à dire que la science doit être mené sans considération aucune pour la religion et les croyances et que les affirmation sans fondement de la religions ne mérite pas la moindre attention.

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Toujours Louis Pasteur. J'ai du mal à croire qu'en 4 ans, personne ne lui ait dit qu'il disait une ânerie. Ânerie qui provient des mensonges d'un journal réac et catho, Le Gaulois, qui a milité pour faire de Pasteur, dès sa mort, une figure catholique. Deux hypothèses : soit tous les lecteurs de Ferry sont des lecteurs complaisants. Soit on lui a dit et il ment sciemment.

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"L'adversaire d'une vraie liberté est un désir excessif de sécurité". Sur les réseaux sociaux, dans des thèses et des mémoires, dans des livres, cette phrase est attribuée de manière délirante à La Fontaine. Il est pourtant facile de vérifier que la phrase ne s'y trouve pas.

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Elle est en réalité de Maurice Flamant, qui est clairement moins intéressant à lire que La Fontaine, dans la conclusion de son Que sais-je sur le Libéralisme Contemporain. Tout ce qu'il annonce dans cette conclusion s'avère aujourd'hui faux et ridicule. Tout aussi ridicule cette étrange méprise qui fait florès dans le monde académique du droit et de la sécurité.

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"Il n'y a pas de génie sans un grain de folie". Là aussi, pourtant facile de voir que la formule ne s'y trouve pas. Mais combien de journalistes et d'auteurs de développement personnel vérifient les citations qu'ils sèment dans leurs textes. La formule est en réalité de Sénèque, dans De la tranquillité de l'âme. Il l'attribue à Aristote, mais plutôt comme une référence lointaine au Problème XXX.

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tiens, une fausse citation d'Aristote ! Mise en épigramme, donc rien à en dire, puisqu'il n'en dit rien.

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Sénèque n'a pas produit qu'un seul faux dans ce texte ! Il livre aussi une fausse citation de Platon. Alors, je corrige tout de suite : à l'époque, la citation exacte n'existe quasiment pas. Sénèque cite de tête et Platon et Aristote, et retranscrit à sa manière ce qu'il veut en tirer. Dès lors, cette citation libre, qui découle d'une lecture du Problème XXX, n'est pas vraiment une fausse citation. Elle l'est devenue plus tard quand on a attribué collectivement la formule de Sénèque à Aristote, d'autant plus quand on prétend qu'elle est tirée de la Poétique ...

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A en croire Rama Yade, Socrate aurait écrit : "les jeunes d’aujourd’hui aiment le luxe ; ils sont mal élevés, méprisent l’autorité, n’ont aucun respect pour leurs aînés, et bavardent au lieu de travailler. Ils ne se lèvent plus lorsqu’un adulte pénètre dans la pièce où ils se trouvent. Ils contredisent leurs parents, plastronnent en société se hâtent à table d’engloutir les desserts, croisent les jambes et tyrannisent leurs maîtres."

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Caroline Goldman aussi estime que Socrate a "rédigé cette tirade intemporelle". Rien n'est plus faux, puisqu'on ne dispose d'aucun texte de la main de Socrate, notoirement connu pour n'avoir rien écrit ! On ne peut donc pas dire qu'il ait ressenti un "grand pessimisme" face à la "vigueur infantile". Je ne peux pas en dire autant hélas.

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Je n'ai pas envie de cheminer vers ma sagesse intérieure si pour ce faire il faut que je transite par des fausses citations. Car enfin, la fausse citation de Socrate sur les jeunes qui aiment le luxe, elle a une origine : The School of Hellas, de Kenneth J. Freeman, un mémoire sur l'éducation chez les grecs qui devait en 1906 lui ouvrir les portes du Trinity College. Il est mort malheureusement pour lui avant d'avoir été accepté comme enseignant. Par ces formules, il synthétise ce qu'il trouve sur l'éducation chez plusieurs auteurs, dont Platon et Aristophane. Pas chez Socrate, donc.