Cover Joseph L. Mankiewicz - Commentaires

Joseph L. Mankiewicz - Commentaires

Cinéaste du verbe, du faux-semblant, de la manipulation, du masque et du jeu social, Mankiewicz a porté son art à des sommets de raffinement et d’élégance intellectuelle. C’est peu dire que j’adore les perles de sa filmographie.

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1. Le limier (1972)

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16 films

créée il y a plus de 12 ans · modifiée il y a presque 2 ans
Le Château du dragon
6.9

Le Château du dragon (1946)

Dragonwyck

1 h 43 min. Sortie : 18 avril 1947 (France). Drame, Thriller, Romance

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Le conformisme de la première réalisation de Mankiewicz n’est qu’une impression de surface, et sa perversité bien réelle. Composant sur le canon de "Rebecca", le cinéaste-scénariste dépasse les conventions du genre par son sens inné du non-dit et du mystère, et par la maîtrise d’une mise en scène qui contrôle chaque image et l'arrête à la juste frontière de l'effet visuel. Il suit une jeune fille naïve pétrie d’imagerie gothique qui se projette des rêves de princesse et qu’un riche cousin enferme dans son domaine seigneurial, vestige d’une féodalité européenne figée dans l’histoire depuis des lustres. Ce faisant, il témoigne déjà d’un goût de la désillusion romanesque et du portrait féminin qui, loin de ne faire qu’accuser l’héritage du romantisme victorien, affirment sa personnalité. De bien beaux débuts.

L'Aventure de Mme Muir
8

L'Aventure de Mme Muir (1947)

The Ghost and Mrs. Muir

1 h 44 min. Sortie : 26 mai 1948 (France). Drame, Fantastique, Romance

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Force du souvenir, éternité du rêve et de l’amour, éclat des vagues et de l’océan… C’est à tout un héritage romantique que se rattache ici Mankiewicz, dans une création enchanteresse qui manie le verbe – qu’il soit romanesque et lyrique, sentimental et rusé ou cyniquement trompeur – et l’image avec la même grâce, la même séduction, la même puissance évocatrice. Autour de la passion amoureuse, des choix de vie qui dictent la mise en place d’un destin, de l’écoulement du temps magnifiant les vestiges de la mémoire, l’œuvre tisse des variations dont la poésie n’égale que l’émotion. Et pour incarner à chaque instant le charme de cette magie, pour nous faire oublier l’arbitraire du point de départ, rien de tel que l’inaltérable Gene Tierney, ce trésor pour lequel on a, comme le capitaine Gregg, les yeux ensorcelés.
Top 10 Année 1947 :
https://urlz.fr/kegb

Chaînes conjugales
7.8

Chaînes conjugales (1949)

A Letter to Three Wives

1 h 43 min. Sortie : 30 novembre 1949 (France). Drame, Romance, Comédie romantique

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

L’image de l’intellectuel sophistiqué aux jeux de mots fusants, à l’humour retors et à l’intelligence étincelante, qui charge à coups de discours emphatiques la culture de masse, Mankiewicz l’investit au travers de cette étude des mœurs provinciales, qui tient sa cohérence et son attrait d’une mise en scène fondée sur le non-dit et la dissimulation. Il dissèque avec une lucidité goguenarde les aléas, les doutes et les compromissions de trois couples d’origines sociales diverses, à la faveur d’un chantage cruel orchestré par une séductrice invisible. Le brio des dialogues décoche de réjouissantes flèches dardées, le récit s’enroule autour de flash-backs savamment orchestrés, les acteurs et actrices font feu de tout bois : l’étude psychologique est brillante, le suspense captivant, le divertissement savoureux.
Top 10 Année 1949 :
https://urlz.fr/kegg

La Maison des étrangers
7.2

La Maison des étrangers (1949)

House of Strangers

1 h 41 min. Sortie : 23 novembre 1949 (France). Drame, Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Chez Mankiewicz, le paradigme des portraits peints et des intrigues anciennes vient toujours se frotter au monde vivant, entrer en concurrence avec lui, relativiser à son contact sa propre permanence, pour mieux s’effacer quand leurs répétitions approximatives se multiplient en une série de duplications internes. Ainsi de ce drame feutré mais cruel construit sur le modèle shakespearien du "Roi Lear", où le commentaire social corrosif le dispute à la noirceur d’une tragédie familiale fondée sur l’inoculation du venin paternel. Et si l’auteur apporte brillamment sa pierre à la démystification du rêve américain, c’est parce que son art du geste significatif et de la réplique cinglante est à nouveau porté par un casting remarquable au sommet duquel trône Edward G. Robinson en tyran pathétique.

Ève...
8.2

Ève... (1950)

All About Eve

2 h 18 min. Sortie : 18 avril 1951 (France). Drame

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Secrets d’alcôves, intrigues de cour et conspirations secrètes dans les coulisses : c’est comme si Shakespeare s’invitait dans le monde cruel et arriviste du show-business. Toute en répliques acérées et notations cyniques, jouant du faux-semblant et des effets de miroir, l’œuvre brosse une galerie de personnages mémorables et épingle avec une cinglante ironie l’hypocrisie et l’arrivisme qui cimentent une irrésistible ascension. Comme toujours, le dialogue est le véritable moteur de l’action, qui commande physiquement la mise en place et le déplacement des protagonistes, et c’est à travers lui que Mankiewicz fait étinceler le jeu de la vérité et du mensonge, affirme sa tendance aux paradoxes satiriques et dévoile l’envers de la réussite et de la vocation, avec une élégance qui n’a d’égale que la férocité.
Top 10 Année 1950 :
http://lc.cx/ZU7r

On murmure dans la ville
7.5

On murmure dans la ville (1951)

People Will Talk

1 h 50 min. Sortie : 3 octobre 1952 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Film un peu étrange, difficile à identifier, fertile en morbidité (le cadavre d’une belle jeune femme présenté en cours d’anatomie) et en mystère (le compagnon taciturne revenu d’entre les morts). En pleine période maccarthyste, le réalisateur s’élève contre le poison de la rumeur publique et affirme sa croyance au talent individuel, à l’éclat et à la joie, autant que son hostilité au culte de l’argent, au conformisme, à la mesquinerie et à l’envie. Il renonce à ses savantes constructions narratives au profit d’un mélange de mélodrame et de comédie dont l’originalité se fonde sur la puissance du faux, du mentir-vrai qui engendre le doute et apporte aussi le remède au scepticisme comme on peut en juger par l’intrigue amoureuse. Mais l’ensemble est presque trop indéfini pour trouver une vraie cohérence.

L'Affaire Cicéron
7.8

L'Affaire Cicéron (1952)

5 Fingers

1 h 48 min. Sortie : 20 juin 1952 (France). Drame, Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Jubilatoire enchâssement de dupes, de mensonges et de manipulations dans le théâtre d’Ankara, en pleine guerre mondiale, où la duplicité cache mal des rapports frisant le masochisme, où les calculs intellectuels finissent tôt ou tard par être rattrapés par l’incongruité du destin. Maître d’un jeu cérébral qui renverse les valeurs et génère un suspense délectable, modeste valet et salaud exquis qui ne rêve que de revêtir le costume blanc d’un riche oisif croisé un jour à Rio, James Mason y déploie des trésors de raffinement pervers – à tel point que l’on se surprend à souhaiter sincèrement sa réussite et celle des Allemands. Mankiewicz problématise à nouveau la question du pouvoir et de la vanité des apparences, imposant une philosophie dont la mordante ironie culmine lors du coup de théâtre final.
Top 10 Année 1952 :
http://lc.cx/ZUDv

Jules César
7.3

Jules César (1953)

Julius Caesar

2 h. Sortie : 16 octobre 1953 (France). Péplum, Historique, Drame

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Homme du verbe, le cinéaste ne pouvait que passer par la case adaptation shakespearienne. Ce qui étonne et fascine ici, c’est la sobriété presque ascétique des décors, du dispositif ornemental, du traitement plastique, du jeu sur le noir et le blanc, les ombres et les lumières, qui guident intuitivement le spectateur dans le développement d’un acte bien connu en le dramatisant davantage, et lui permettent de se concentrer sur des duels verbaux qui sont autant de joutes psychologiques. La réflexion sur le pouvoir, la solitude qu’il génère et les conflits qui en découlent, se développe à travers de grands moments de confrontation, véritables morceaux de suspense (la scène déclamatoire du forum, exemplairement). Le casting est formidable, à commencer par Marlon Brando en Marc Antoine.

La Comtesse aux pieds nus
7.4

La Comtesse aux pieds nus (1954)

The Barefoot Contessa

2 h 08 min. Sortie : 15 juin 1955 (France). Drame, Romance

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Réalisé paraît-il contre "Citizen Kane", le film fait pièce au pirandellisme en racontant le même épisode vu par des personnages différents, mais presque sous le même angle de prise de vues, comme si le cinéaste, narrateur explicite après tous les autres, entrait lui-même dans le jeu des plis et des redoublements, des effacements et des simulacres. Le raffinement habituel de Mankiewicz s’exprime toujours à travers ses images voilées et soyeuses, sa construction complexe en flash-backs entrelacés et la cruauté feutrée de ses dialogues, mais j’ai trouvé longuette cette autopsie d’une destruction, cette patiente mise en lumière de la personnalité cachée d’une héroïne sauvage et indépendante, victime de la ploutocratie, de la veulerie dorée, de l’arrivisme des hommes, et de sa propre frivolité.

Blanches colombes et vilains messieurs
6.3

Blanches colombes et vilains messieurs (1955)

Guys and Dolls

2 h 30 min. Sortie : 1 mars 1957 (France). Comédie musicale, Romance, Comédie

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Pas sûr que l’univers de la comédie musicale convienne à l’ironie naturelle de Mankiewicz, dont la mise en scène accuse ici une certaine raideur illustrative, et qui donne un peu l’impression de vouloir s’encanailler sans trouver la spontanéité adéquate. Diluant quelques intrigues sentimentales plutôt molles en près de deux heures et demie assez pataudes, il tire une séduction intermittente de ses complications vaudevillesques, de son New York de studio étoilé et chimérique, et de quelques interludes incongrus où enfin la folie s’invite à la fête (le pugilat cubain, en premier lieu). Il peut aussi remercier l’apport du grand chorégraphe Michael Kidd, et surtout Jean Simmons, avec sa grâce délicieuse et son ravissant minois bouclé, de rafraîchir les artifices aujourd’hui un peu datés de l’entreprise.

Un Américain bien tranquille
6.5

Un Américain bien tranquille (1958)

The Quiet American

2 h. Sortie : 9 juillet 1958 (France). Drame, Guerre, Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

S’il n’évite pas tout à fait les écueils de l’application littéraire, Mankiewicz a su apporter à cette adaptation de Graham Greene (reniée par l’écrivain) son sens naturel des zones troubles, de l’équivocité, de l’incertitude. À Saïgon, en pleine guerre d’Indochine, un journaliste anglais et un citoyen américain détaché d’une mission humanitaire se disputent le cœur d’une jeune vietnamienne. Engageant une réflexion sur la politique, l’engagement, les compromissions entre la morale et les intérêts personnels, oscillant entre le récit d’espionnage, l’intrigue policière, le suspense amoureux, la narration est un tantinet confuse, mais le caractère constamment ambigu des personnages et des situations maintient un intérêt constant, et offre à ce drame d’un homme manipulé par ses sentiments une vraie identité.

Soudain l'été dernier
7.6

Soudain l'été dernier (1959)

Suddenly, Last Summer

1 h 54 min. Sortie : 23 mars 1960 (France). Drame, Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Dans le cadre empoisonné et étouffant d’un jardin sauvage in vitro, l’auteur épanche sa tendance baroque et se livre à une exploration psychiatrique intense, obstinée, oppressante. Enquête de la parole comme contaminée par le décor artificiel, avec ses plantes vénéneuses et son ambiance de serre chaude, le film provoque une impression suffocante qui, tel une chambre d’échos, puise dans une série de tabous informulés (impuissance, homosexualité, inceste, anthropophagie) et visualise les violents entrechocs des conflits traumatiques. Trois monstres d’acteurs s’affrontent le long d’un psychodrame réveillant, en une suite de paroxysmes désespérés, les racines de l’amour, de la haine et de la vérité, jusqu’à une séquence finale de terreur blanche et surexposée qui marque durablement la mémoire.

Cléopâtre
7.3

Cléopâtre (1963)

Cleopatra

4 h 11 min. Sortie : 25 septembre 1963 (France). Historique, Péplum, Drame

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Le film vaut davantage que sa réputation de projet colossal et démesuré. L’essentiel du dessein de Mankiewicz s’y donne à lire, qui vise à décrire le choc de deux civilisations à travers un grand spectacle emprunt de fulgurances fastueuses, d’une sorte de fièvre souterraine, et qui parvient à équilibrer la dimension humaine de l’intrigue à la monumentalité logistique de la production. La soif de conquête, le goût du pouvoir, la politique, la manipulation amoureuse dialoguent en un drame tumultueux, aux accents presque shakespeariens, mais parfois écrasé par son gigantisme. Pour résumer, une œuvre imparfaite et ruineuse mais nullement méprisable, dont les meilleurs moments parviennent à s’inscrire, par leur ingéniosité et leur double lecture, dans la dynamique artistique de son auteur.

Guêpier pour trois abeilles
7

Guêpier pour trois abeilles (1967)

The Honey Pot

2 h 11 min. Sortie : 6 juillet 1969 (France). Comédie, Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Au-delà des miroitements de la lagune vénitienne, d’un décor dont les raffinements n’opèrent que pour mieux nous égarer, d’une intrigue policière qui masque ses véritables intentions, le film est une œuvre singulièrement déroutante. Il donne la sensation d’une image reproduite à l’infini par deux miroirs face à face : quel jeu plus subtil que celui de ces dédoublements en chaîne qui enferment entre le rêve et la réalité, entre la fiction et le spectacle de la vie elle-même, tous soumis aux aléas du destin ? Prenant appui sur "Volpone", l’auteur y brocarde la cupidité et l’hypocrisie à travers une ronde de menteurs, d’avides et de tricheurs dont les jeux de masques mystificateurs renvoient les complots de l’intelligence et de l’illusion à leur vanité. Une fable aussi amère que brillante et un divertissement de haute volée.

Le Reptile
7.4

Le Reptile (1970)

There Was a Crooked Man...

1 h 58 min. Sortie : 19 septembre 1970 (France). Comédie, Western, Aventure

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Première incursion dans l’univers du western pour le réalisateur, qui signe l’un des archétypes ironiques du genre et ne perd rien de son goût des échafaudages inattendus, des trompe-l’œil psychologiques, de sa morale de l’ambiguïté. Avec cette vivacité de l’esprit qui n’appartient qu’à lui, Mankie renvoie dos à dos crapules et justiciers d’antan, le long d’un suspense mené sans accroc que l’on peut lire comme une réflexion amusée sur les apparences et leur contraire. Construit selon un réseau serré de chemins convergents, repris les uns après les autres pour aboutir tous, sauf un, dans un cul-de-sac, le film cultive un ton burlesque, iconoclaste et sardonique où le cynisme règne en maître. Et il faut bien sûr attendre la guirlande des rebondissements finaux pour découvrir qui est le beau salopard de l’histoire.

Le Limier
8.1

Le Limier (1972)

Sleuth

2 h 18 min. Sortie : 18 avril 1973 (France). Thriller

Film de Joseph L. Mankiewicz

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Pour son dernier film, le réalisateur réduit son cinéma à ses composantes essentielles : une intrigue d’une rigueur mathématique, une joute implacable entre représentants de classes antagonistes, une machination labyrinthique fondée sur une vertigineuse succession de coups de théâtre, énigmes, déguisements, ripostes et coups fourrés. Emblématique d’un principe où se redoublent dans les acteurs les personnalités du spectateur et du metteur en scène, le jeu se décline en un étourdissant récital en huis-clos sur l’envers du décor social, un fascinant manège de duperies où la parole est reine. Affrontement entre un aristocrate dévoré par ses origines et son rang à tenir et un coiffeur représentant du peuple qui viendra à bout de ce pouvoir, le face-à-face donne l’occasion à deux grands comédiens de se livrer à un époustouflant numéro. Magistral.
Top 10 Année 1972 :
http://lc.cx/AUa

Thaddeus

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