Le self-fulfillment à l'américaine.
Une plongée dans le monde de l'individualisme triomphant.
9 livres
créée il y a plus de 6 ans · modifiée il y a plus de 6 ansS'organiser pour réussir
Getting Things Done (méthode GTD) ou l'art de l'efficacité sans le stress
Getting Things Done: The Art of Stress-Free Productivity
Sortie : mars 2008 (France). Vie pratique
livre de David Allen
Ergastules a mis 7/10.
Annotation :
En vo.
Une abondance d'anecdotes putacliques, beaucoup d'éloges sur la prétendue qualité incroyable de la méthode, mais surtout, surtout, énormément de redites. Le nombre de pages se gonfle donc: on sent une "farcissure" perpétuelle, les conseils simples se perdent sous les digressions. Beaucoup de verbiage pour...
Des conseils évidents (ranger, jeter, faire des listes de tâches) mais qui, mis bout à bout, aboutissent à une méthode inapplicable à petite échelle. Il faut acquérir des chemises, des sous-chemises, des sous-sous chemises, avoir plusieurs systèmes de "stockage" (sic), une gestion informatique, un agenda, des carnets... etc. Ca peut peut-être marcher, pour les gens vraiment très submergés. Au fond, l'idée est pourtant intéressante, et je crois qu'elle offre matière à réfléchir: "If you have collected, processed, organized, and reviewed all your current commitments, you can galvanize your intuitive judgment with some intelligent and practical thinking about your work and values."
Sur youtube, David Allen a l'air sympathique. Il applique avec rigueur ses propres directives, son bureau foisonne de rangements et de meubles, l'ensemble est, de façon très inquiétante, trop soigneusement rangé.
L'Art subtil de s'en foutre (2016)
Un guide à contre-courant pour être soi-même
The Subtle Art of Not Giving a F*ck: A Counterintuitive Approach to Living a Good Life
Sortie : 1 juin 2017 (France). Essai
livre de Mark Manson
Ergastules a mis 6/10.
Annotation :
En vo.
Le discours tranche, c'est vrai, très nettement avec ce qu'on entend d'habitude. Il ne faut pas viser la "fame", atteindre le "success" et être "healthy". Au contraire, il faut valoriser l'essentiel, l'important, ne jamais céder au "positive thinking" pour préférer l'acceptation. Apprendre à souffrir, endurer l'échec, modeler sa vie sur des valeurs ordinaires.
Du coup, c'est bien plus chouette à lire. Les anecdotes sont originales, comme celle du type qui, après s'être fait virer des Beatles, s'est avéré bien plus heureux dans une vie de simplicité. L'introduction est très poussive (avec la répétition incessante de "fuck", oh regardez-moi, je parle comme vous!) mais ça devient plus agréable ensuite.
Le problème, c'est que c'est juste du stoïcisme 2.0, à l'américaine. Il y bien quelques stéréotypes individualistes qui ressurgissent de temps en temps (avoir une belle femme, une belle voiture, un travail gratifiant), mais le fond est exactement similaire. C'est à peine déguisé; les mêmes termes reviennent.
Là-dessus, ce paragraphe est assez frappant:
"Popularity, on the other hand, is a bad value. If that’s your value, and if your metric is being the most popular guy/girl at the dance party, much of what happens will be out of your control (...). Second, the value/metric isn’t based on reality: you may feel popular or unpopular, when in fact you have no fucking clue what anybody else really thinks about you. (...) You’ll notice that good, healthy values are achieved internally. Something like creativity or humility can be experienced right now. You simply have to orient your mind in a certain way to experience it. These values are immediate and controllable and engage you with the world as it is rather than how you wish it were. Bad values are generally reliant on external events—flying in a private jet, being told you’re right all the time, owning a house in the Bahamas, eating a cannoli while getting blown by three strippers. Bad values, while sometimes fun or pleasurable, lie outside of your control and often require socially destructive or superstitious means to achieve."
Be Obsessed or Be Average
Sortie : 12 juillet 2016 (France). Vie pratique
livre de Grant Cardone
Ergastules a mis 1/10.
Annotation :
En vo.
C'est une sensibilité de gauche qui s'exprime dans ces lignes; elle est très irritée. Le propos est à l'opposé de celui du livre que je présentais juste avant, de l'aveu même de l'auteur: "There are thousands of books on success, but few of them actually match up with my definition of success. It’s not just a steady job, the respect of your peers, and a nice little nest egg for your retirement."
L'auteur donc, dont on ne sait si sa mégalomanie l'emporte sur son égocentrisme. Celui qui, dans le chapitre 8, veut partager son "world-renowned sales knowledge" affirme avoir désormais "about $400 million in holdings" et disposer, du temps de la rédaction, de "almost five thousand apartments". Son histoire est prétendument celle d'une réussite exemplaire, des haillons aux richesses. Depuis une vie de misère (romancée, réduite à ses évènements les plus larmoyants) il se serait élevé à une vie de succès (amplifiée, emprunte de mensonges et de vantardise) : "My obsessions have taken me from lost and broken in every way at the age of twenty-five to owning five privately held companies with sales of $100 million a year, being named one of the top ten most influential CEOs in the world, and being a New York Times best-selling author of five books, an internationally acclaimed speaker, an attentive husband, a doting father of two girls, and a contributing member of society."
Sous l'égide d'un tel maître, il est tout à fait possible de devenir exceptionnels. Pour cela, il suffit simplement de répudier les croyances limitantes, mais surtout de s'élever contre la société, bien trop timide (comprendre, socialiste) à son goût: "Society has always had a problem with people like you and me. (They) see us as abnormal, problematic, driven, greedy, never satisfied, overly demanding, tyrannical, self-serving, unreasonable, control freaks, and so on." L'on a donc le droit à une série de pages hallucinantes où le bien-fondé des aides sociales est critiqué; à d'autres, où l'auteur instruit le procès de la "normalité"; à d'autres encore, où la politique intérieure est qualifiée de "problème secondaire" en regard de "ce qui compte vraiment", à savoir l'argent.
Sans surprises, Grant Cardone est caucasien. Il est un "il", et ce "il" est en bonne santé. Le capital culturel de sa famille est moyen à élevé. Ce qu'il livre, ce n'est donc pas seulement un ouvrage mal écrit et irréfléchi, mais l'occasion d'une jolie confrontation avec les mirages du libéralisme.
Intelligence Emotionnelle 2.0 (2009)
Emotional Intelligence 2.0
Sortie : 2 mars 2010 (France). Vie pratique
livre de Jean Greaves et Bradberry Travis
Ergastules a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
En vo.
Les trois ouvrages précédents conduisaient l’individu à se perfectionner par et pour lui-même. Que ce soit par la rangement de l’espace de travail (le premier) ou par un changement progressif de l’état d’esprit (les deux suivants), il s’agissait d’initier une quête vers la réussite matérielle.
Plutôt que d’engager le seul développement solipsiste de son lecteur, ce livre propose d’améliorer son « intelligence émotionnelle » en renforçant quatre capacités sociales : « self-awareness », « self-management », « social awareness », et « relationship management ». Le travail sur soi est alors présenté comme la source d’un effet positif sur l’entourage proche. Quand l’autre est souvent le grand oublié d’une société quasi-nombriliste, ce texte lui redonne toute sa place: « no man is an island; relationships are an essential and fulfilling part of life. » Partant du constant que «(people) stumble and lose their footing trying to maintain relationships over the long term », il énumère donc des conseils facilement applicables pour rendre la sphère familiale et le monde du travail plus habitables.
Deux problèmes m’empêchent pourtant de lui attribuer la note maximale. Le premier est superficiel : de façon systématique, les statistiques paraissent infondées. Non mentionnées et imprécises, les études convoquées ne paraissent que servir l’argumentation. La science du cerveau est même réduite à des simplifications brouillonnes, comme pour donner une caution théorique à l’ensemble : « Information travels between the rational and emotional centers of your brain much as cars do on a city street. When you practice EQ skills, the traffic flows smoothly in both directions. »
Le deuxième m’agace bien plus. Au fond, c’est à se demander si la prétention altruiste de l’ouvrage n’est pas en fait un énième pragmatisme déguisé. Le respect et la considération de l’autre ne sont pas nécessairement le résultat d’une quête pour eux-mêmes, mais le moyen de succès plus importants : « We observe supposedly brilliant and well-educated people struggle, while others with fewer obvious skills or attributes flourish. And we ask ourselves why? The answer almost always has to do with this concept called emotional intelligence. » De ce constat découle certains passages où l’autre semble déshumanisé, seulement rapproché du bénéfice ultérieur qu’il apportera au salarié ou à l’entrepreneur; comme si, au total, la relation n’était qu’une production de valeur de plus.
Voler comme un artiste (2012)
10 secret bien gardés sur la créativité
Steal Like an Artist
Sortie : 20 novembre 2014 (France). Vie pratique
livre de Austin Kleon
Ergastules a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
En vo.
D’emblée, il faut souligner combien ce livre se rapproche de la fraude éditoriale. Onze euros et vingt-huit minutes de lecture (montre en main), ce qui correspond à 60x28/11000 ≈ 1 centime pour 1 seconde de lecture. Entre les longues citations « d’auteurs » aussi divers qu’André Gide ou Jay-Z, les schémas démesurés et les nombreuses pages blanches, la contribution de l’auteur à son propre livre paraît limitée. Tout est heureusement gratuit grâce à internet, si l’on se sent prêt à affronter quelques publicités douteuses...
De toute manière, la longueur n’a jamais été synonyme de qualité. Austin Kleon sait se borner, et jamais trop plein de son objet, peut abandonner son sujet sans l’épuiser. (#BoileauVie)
Originales, ses consignes développent une conception de l’art bien américaine. Loin du créateur dépravé, l’écrivain idéal se coule dans les modèles de la normalité : « Neil Young sang, “It’s better to burn out than to fade away.” I say it’s better to burn slow and see your grandkids. » Dès lors, les conseils artistiques ne sont, assez paradoxalement, pas directement portés sur l’art lui-même. Pour produire des œuvres de qualité, il faut bien se marier : « Who you marry is the most important decision you’ll ever make. » Il faut encore garder un métier alimentaire : « A day job gives you money, a connection to the world, and a routine. » La vie de l’artiste, au total, ne fait plus rêver : « Saying no to takeout, $4 lattes, and that shiny newcomputer when the old one still works fine. »
Si l’auteur rend à l’art sa part de prosaïsme et de trivialité, il le délivre en outre du mystère qui l’entoure. L’artiste n’est pas ce créateur démiurge, dont les œuvres naissent abouties et pures de toute influence. En témoigne l’insistance sur la part d’artisanat que comprend la création, de la mention des brouillons à l’évocation de la correction, en passant par l’étrange prescription qui constitue le cœur du livre. Il s’agit en effet de « copier », sans jamais « plagier » : « plagiarism is trying to pass someone else’s work off as your own. Copying is (…) like a mechanic taking apart a car to see how it works. » D’inventeur fécond, l’artiste devient donc un « collecteur », « not a hoarder, mind you, there’s a difference ».
Si la création est un effort et si le talent n’existe pas, tout semble beaucoup plus simple. Le livre lui-même dégage cette impression de naturel, et laisse transparaître une honnêteté qui ne vire jamais au voyeurisme.
La preuve du paradis
Proof of Heaven: A Neurosurgeon's Journey into the Afterlife
Sortie : 1 mars 2013 (France). Biographie
livre de Eben Alexander
Ergastules a mis 2/10.
Annotation :
En vo.
En m’intéressant à ce type de littérature, je ne me doutais pas que les thèmes seraient aussi étendus. De l’art au spiritualisme, le développement personnel engage un ensemble de croyances qui vont bien au-delà de simples conseils de productivité.
Ici, un neurochirurgien atteste de l’existence du paradis après avoir vécu une expérience de mort imminente. Plongé dans le coma, il a découvert une « vérité » qu’il se doit de transmettre : « Once I realized the truth behind my journey, I knew I had to tell it. » De là à se présenter en prophète, il n’y a qu’un pas allégrement franchi : « Doing so properly has become the chief task of my life. » Outre qu’il est un « prominent US neurosurgeon », Mohamet 2.0 est aussi l’auteur de « conferences around the world », ce qui lui permet de dédier tout un chapitre à exposer son CV.
Mais l’important n’est pas tant sa réussite sociale et familiale que sa brève visite de l’au-delà. Il n’y fait pas bon vivre. C’est un monde de primates ("language, emotion, logic: these were all gone") qui ressemble à s’y méprendre à l’univers de la petite maison dans la prairie. Le paradis lui-même est clichéique : là où les « butterflies » ne volent pas, « trees and flowers bloo(m) and blosso(m) in the countryside ». Les enfants y dansent, portant de « simple yet beautiful clothes » (où sont les triple S de chez balenciaga ?). Les anges sont très white, très blancos, et n’ont semble-t-il pas beaucoup d’argent : « Someone was next to me: a beautiful girl with high cheekbones and deep blue eyes. She was wearing (…) peasant-like clothes ». Pour finir, galopant joyeusement entre les « streams » et les « waterfalls », les gens sont toujours gentils, jamais coupables.
Chez un auteur si profondément chrétien qu’il en reprend, sous couvert de l’objectivité du scientifique, la phraséologie rebattue (« Good », « Evil » et même « Creator »), ce discours peine à convaincre. Si d’autres croyances l’avaient habité, son paradis aurait probablement compté 70 houris. Et du reste, si l’on oublie que ce paradis-là est profondément sexiste, il serait bien plus sympa.
Contre cette essentialisation douteuse du bien, contre cette régression de la conscience dans un décor de carte postale, je préfère bien plus écouter Temps Mort, manger du frometon et taper quelques likes sur instagram. Plutôt que de rassurer, ce texte me fait donc paradoxalement davantage craindre la mort.
Eben Alexander, ton paradis est mon enfer.
Miracle Morning (2012)
The Miracle Morning: The Not-So-Obvious Secret Guaranteed to Transform Your Life (Before 8AM)
Sortie : 7 janvier 2016 (France). Vie pratique
livre de Hal Elrod
Ergastules a mis 5/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
En vo.
Story Climax (2015)
Story Climax
Sortie : 8 janvier 2015. Guide & manuel
livre de H.R. D'Costa
Annotation :
En vo.
Trump: the art of the deal (1987)
The Art of the Deal
Sortie : décembre 2004 (France). Vie pratique, Biographie
livre de Donald Trump et Tony Schwartz
Ergastules a mis 3/10.
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En vo.