Lectures estivales (2016)

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Il y aurait beaucoup de choses à dire tant la pensée de Rousseau est complexe. D'ailleurs, l'édition GF apporte son lot de notes de bas de pages absolument essentielles pour la compréhension, ce qui limite le rythme de lecture du texte en lui même, rendant l'exercice un tantinet laborieux, mais plein d'enseignements.

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Trop court, l'ensemble n'en est pas moins divertissant, donnant lieu à des instants (courts, trop courts) parfois géniaux :

"Celui qui mange est heureux ; celui qui digère est plus heureux ; celui qui sommeille en digérant est plus heureux encore. Tout le reste n'est que vanité et impatience d'esprit."

"j'ai perdu en acquérant la science, les naïves illusions de l'estomac et du cœur."

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Si l'origine de ce petit cahier libertin est impossible à définir clairement, ses fondements sont en revanche apparents : basé sur un petit recueil de 1790 et héritant de l'influence d'Aretin, l'auteur anonyme propose de passé de 16 positions dans le recueil de base à rien moins que quarante. L'intérêt d'un tel recueil libertin réside dans sa position charnière : à l'aube de la modernité, les machines font une entrée remarquée (et remarquable) dans la représentation (et la pratique) de la sexualité. Délaissant les blagues graveleuses sur le roi et la reine, ce sont le vigneron, l'épicier et l'artilleur qui entrent en scène. Si certains passages sont choquants (sur l'Eglise et la pédophilie, la nécessité naturelle et irrépressible des femmes de "profiter d'un vit"), le tout est suffisamment enrobé de chants paillards et de gravures pour illustrer de manière ludique le petit opuscule.

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Impressionnant avant-gardisme par ses teintes féministes, ses traits acerbes contre les conventions sociales de l'artifice, Othello est une pièce maîtresse orchestré par un orfèvre du 6ème art. La complexité des personnages, leurs ambiguïtés multiples, servent parfaitement un propos qui recèle bien plus qu'il n'y paraît. Un chef-d'oeuvre, en somme.

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Répondant en partie à Descartes, appuyant Spinoza, admirant Voltaire, Saint Augustin ou encore Pascal et préfigurant parfois Nietzsche, ce petit traité est bondissant, agréable à lire et d'une clarté appréciable dans le propos comme dans la prose. Le lecteur attentif se plaira à lire la danse des mots (lorsque l'auteur présente le thème de la volonté comme étant issue de Dieu, il affirme immédiatement "je veux") qui en dit plus long sur la pensée de leur auteur que le texte lui-même. Une découverte qui, ma foi, n'est pas déplaisante et même rafraîchissante sur la question du libre-arbitre dans un monde gouverné par Dieu.

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Lire Kant, en philosophie, relève toujours ou presque du traumatisme. Frustré, le lecteur peu attentif s'en prendra ad personam à l'auteur, dans le but de se consoler aussi bassement que possible : "Toute façon, c'était qu'un gros coincé, c'vieux bougre !" Un point aide l'étudiant frustré : l'absence quasi totale (et très surprenante) d'informations ayant filtrées sur la vie intime du philosophe de Königsberg. Seulement voilà, on ne peut pas simplement balancer comme ça qu'Emmanuel était puceau. Dans un système de pensée aussi complexe et complet que le sien, cette question revêt une importance énorme, capitale même : le sexe peut-il être érigé en loi universelle ? Si non, son absence ? Comment alors perpétrer l'espèce humaine sans sexe ?
Botul est un génie, rien de moins. Injustement mis à l'écart pendant des décennies, cet auteur (qui n'a presque rien écrit) propose une réflexion sur les incidences profondes que soulèvent la question sexuelle. Bien loin de la raillerie de l'étudiant frustré, de l’indignation pédante de l'universitaire, Botul prend le problème à bras-le-corps et donne même envie, à moi qui en était un farouche opposant, d'aimer Kant, d'apprendre à l'aimer.

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David, si je devais lui donner un visage, ce serait le mec banal, presque trop, qui ne paye vraiment pas de mine mais qui, quand tu commences à discuter avec lui, te sort des petites pépites, entre deux borborygmes et trois micro-siestes. Un opuscule indispensable pour qui veut envisager la question de l'esthétique et de la perception de la Beauté, qui cache sa profondeur sous une couche rude et indigeste de trivialités parfois déconcertantes.

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L'histoire est très plaisante, d'autant plus lorsque l'on apprend son impact sur Molière et autre Beaumarchais. C'est véritablement la magie de cette collection des Mille et Une Nuits : donner à découvrir des textes souvent oubliés qui ont pourtant joué un rôle essentiel dans l'apparition et le développement des classiques (ici, les Précieuses Ridicules, les Femmes Savant, le Barbier de Séville et j'en oublie).

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J'ai vraiment du mal avec HD. Ce monsieur est tantôt d'une prétention et d'un égocentrisme révoltant, tantôt d'une clarté époustouflante dans l'analyse. Véritable Schopenhauer sous acide dans les mauvais jours, Thoreau n'est certes pas le plus avenant et conciliant de tous (loin de là), mais cela n'enlève rien à l'intérêt que l'on doit lui porter.

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S'il est une certitude sur l'auteur de ce texte, c'est qu'à l'heure de sa publication, ledit auteur était jeune, sans doute un peu trop. Si le propos est bien sûr "en avance sur son temps", du fait de sa relative dénonciation de la domination des hommes sur les autres, lorsque l'on creuse un peu plus que la belle surface lisse si bien rendue par l'amant Montaigne, le creux sonne vite. Les enfants, ce n'est pas un ardent défenseur de la liberté qui a écrit ce texte, préfigurant les valeurs révolutionnaires françaises deux siècles et demi avant leur arrivée, non ; c'est un jeune homme plein de fougue et d'entrain qui vous explique gentiment que les hommes, de tout temps, se sont toujours dominés, que cette domination n'est pas naturelle puisque la seule qui le soit, c'est celle du Tout-Puissant.
Il vient juste de dire que la domination naturelle est divine, pas humaine, ça ne casse pas six pattes à un crabe non plus hein. Et quand je précise la fraîche jeunesse de son auteur, ce n'est pas en vain : c'est pour mieux souligner la candeur que dégage la conclusion, sur la toute-puissance de l'amitié, seule forme de proto-domination humaine naturelle socialement acceptable.
Pour résumer : la domination c'est mal, sauf si c'est Dieu ; ah, et aussi, c'est bien d'avoir des amis dans la vie, parce que si l'on prend l'exemple des tyrans, ils n'ont pas d'amis. Faut avouer que c'est tout d'même un peu léger comme conclusion ; mais encore une fois, loin du "Rimbaud de la pensée" encensé par le fougueux amant Montaigne, ce Discours n'en reste pas moins tout à fait agréable à lire.

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Cet homme est un génie. L'éloge du mou, la nécessité de "palper" ou plutôt de "tâter" pour faire l'expérience du mou, de la "mouité", véritable concept philosophique pensé en opposition au rigorisme rigide à la germanique qui l'exaspère. Cet opuscule permet de suivre les doutes d'un penseur hanté par la "page noircie" et non la page blanche ; Botul a toujours rechigné à écrire, quel dommage pour la postérité, mais quel plaisir de lire ces fragments, ou plutôt ces "bouts", véritables pépites de réflexion du contemporain de Sartre, Malraux et Merleau-Ponty. Il a d'ailleurs servi de nègre à ce dernier pour la rédaction d'une thèse pour la Sorbonne, monnayée "quelques billets", tandis que ce brave Maurice allait "faire du vélo avec une demoiselle". D'un humour fin, d'un dilettantisme qui n'est qu'apparent et recèle une profondeur réelle, La Métaphysique du Mou est à lire pour tout amateur de bon mot, de bonne bouffe, de bonne chair en somme, car après tout, qu'est-ce qui défini mieux le mou que la chair (d'un sein plantureux, en l'occurrence pour Botul) ?

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Je ne comprends pas véritablement le fossé virtuel qui sépare cet opus de 2001. Les deux sont bons, voire très bons, celui-ci souffrant peut-être de quelques passages à vide mais franchement rien d'handicapant tant la beauté du texte happe et fait oublier tout le reste.

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On m'avait prévenu (je n'sais plus qui, qu'il se manifeste séance tenante), et effectivement, ce livre est d'une rude densité, pas forcément très accessible : âpre à la lecture, fourmillant de détails et de précisions "historiques", le Silmarillion est à réserver aux véritables mordus de Tolkien et du Seigneur des Anneaux pour pouvoir être pleinement apprécié.

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Pourquoi l'éjaculation, ou plus précieusement, "la décharge", en-dehors du vagin est-elle fermement condamnée par la médecine et l'Eglise jusqu'au XIX° siècle et devient monnaie courante, pour ne pas dire moneyshot, dans les films pornographiques modernes ? C'est le parcours fort intéressant et instructif que propose Leiva, parcours étrange s'il en est, mais révélateur d'une tendance tout à fait surprenante qui n'a, contrairement à ce que l'on pourrait croire, pas eu cours dès la transposition de la pornographie au cinéma.

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Un qualificatif que je n'utilise que rarement : c'est brillant, tout simplement brillant. Ça n'est pas brillantissime (donc pas de 10), parce qu'il dit n'importe quoi sur Descartes, ce qui est dommage, quand on voit la qualité de la réflexion sur tout le reste.