Les lectures d'André Gide
Relevé des lectures d'André GIDE (1869-1951) mentionnées dans son 'Journal'. Je me suis limité dans un premier temps à l'anthologie (1889-1949) de Schnyder et Solvès . Le 'Journal' complet en Pléiade (heureuse perspective), ce sera pour plus tard...
Non référencés sur SC :
106 livres
créée il y a presque 4 ans · modifiée il y a environ 1 moisMémoires
Sortie : 1717 (France). Autobiographie & mémoires
livre de Cardinal de Retz
Annotation :
29 janvier 1902
« Les 'Mémoires' de Retz. Voilà longtemps que je n'avais goûté pareille joie. Étrange style, qui semble tout en substantifs et en verbes, et qui marche sur les talons. Apparenté toutefois à Montesquieu et à Saint-Simon, avec plus de cambrure et d'étroitesse que celui-ci. »
[« J'ai voulu me remettre (...) à lire les 'Mémoires' de Retz (...). Il n'y a pas moyen. C'est assommant. Au moins pour moi, c'est illisible. » Paul Léautaud, Journal littéraire, 13 juillet 1948]
Retz est évoqué à nouveau le 22 février 1942 (Chateaubriand).
Poèmes barbares (1862)
Sortie : 1862. Poésie
livre de Leconte De Lisle
Annotation :
5 février 1902
« Repris hier soir Leconte de Lisle (« Massacre de Mona ») ; satisfaction pure et parfaite. »
Les Fleurs du mal (1857)
Sortie : 25 juin 1857. Poésie
livre de Charles Baudelaire
Annotation :
14 juin 1905
« Repris Baudelaire [Les Fleurs du mal ?] avec le plus vif plaisir.
'L'ironie considérée comme une forme de la macération'. Très important. »
[1918]
« Dans ces vers de Baudelaire :
'Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.'
où le lecteur inattentif ne reconnaît qu'une cascade de mots, je vois la parfaite définition de l'œuvre d'art. Je saisis à part chacun de ces mots, j'admire ensuite la guirlande qu'ils forment et l'effet de leur conjuration ; car aucun d'eux n'est inutile et chacun est exactement à sa place. Volontiers je les prendrais pour titres des successifs chapitres d'un traité d'esthétique :
1° 'Ordre' (logique, disposition raisonnable des parties) ;
2° 'Beauté' (Ligne, élan, profil de l'œuvre) ;
3° 'Luxe' (Abondance disciplinée) ;
4° 'Calme' (Tranquillisation du tumulte) ;
5° 'Volupté' (Sensualité, charme adorable de la matière, attrait). »
5 août 1934
« Il faudrait enseigner à lire. Non pas lire à voix haute ; mais bien à voix basse et pour soi. Si l'école du Vieux-Colombier était encore ouverte, combien volontiers j'y ferais un cours de lecture. J'imagine un cycle de six leçons. Je choisirais, par exemple, Baudelaire ['Parfum exotique']. J'expliquerais son amour du sonnet. (Espace limité à remplir, et qui interdit « l'inspiration » successive.)
'Des hommes dont le corps est mince et vigoureux
Et des femmes dont l'œil par sa franchise étonne'
J'y dirais le rôle de l'étonnement dans un poème de Baudelaire. Beauté de ce mot. L'étonnement (artistique) vient ici de ce que Baudelaire ne considère de l'homme que le corps, et de la femme (ici) que la qualité morale. »
[Les Fleurs du mal sont évoquées en 1936, le 16 mai (Keats) et en 1938, le 21 août (Hugo)]
Journal
Sortie : 1801 (France). Journal & carnet
livre de Stendhal
Annotation :
31 juillet 1905
« Copeau s'étonnait que j'en sois encore après le 'Journal' de Stendhal. Il est certains auteurs que je ne lis que le plus lentement possible. Il me semble que je cause avec eux, qu'ils me parlent, et je m'attristerais de ne savoir pas les retenir plus longtemps près de moi. »
Les Chants de Maldoror (1869)
Sortie : 1869 (France). Poésie
livre de Comte de Lautréamont (Isidore Ducasse)
Annotation :
23 novembre 1905
« Je viens de lire, à voix basse d'abord, puis à haute voix, l'extraordinaire VIe 'Chant de Maldoror' (chap. I, II et III). Par quel hasard ne le connaissais-je pas encore ?
Voilà qui m'exalte jusqu'au délire. »
[C'est dans ce sixième chant (chap. I) que se trouve le fameux : « beau (...) comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie ! ».]
Journal de voyage, lettres éphémérides, sentences (2006)
Sortie : mai 2006.
livre de Michel de Montaigne
LeBouquiniste l'a mis en envie.
Annotation :
« Matinée au Louvre ; matinée délicieuse. J'avais un petit Montaigne avec moi, mais n'en lisais que par instants, en marchant, et juste ce qu'il faut pour entretenir l'exaltation joyeuse de ma pensée.
Trop courte journée. »
[Montaigne est évoqué en 1934, le 11 février (Voltaire).]
Sagesse (1880)
Sortie : 1880 (France). Poésie
livre de Paul Verlaine
Annotation :
1er décembre 1905
« Après lecture, comme je rapproche cette suite de poèmes de Francis Jammes, de 'Sagesse' de Verlaine, Claudel déclare aussitôt que 'L'Église habillée de feuilles' est une œuvre bien supérieure (...). »'
Madame Bovary (1857)
Sortie : 1857 (France). Roman
livre de Gustave Flaubert
Annotation :
15 avril 1906
« Le nombre augmente... des choses que je me permets de penser, que je me permets un peu moins de dire, et que je ne permets aux autres de dire pas du tout. Par exemple : que le commencement de Madame Bovary est fort mal écrit. »
Correspondance (1800)
Sortie : 1800 (France). Correspondance
livre de Stendhal
Annotation :
8 décembre 1907
« Correspondance de Stendhal.
Stendhal n'a jamais été pour moi une nourriture ; mais j'y reviens toujours. C'est mon os de seiche ; j'y aiguise mon bec. »
L'Évolution créatrice (1907)
Sortie : 1907 (France). Essai, Philosophie
livre de Henri Bergson
Annotation :
28 juillet 1908
« Lecture de Bergson – que je n'ai pas poussée très loin (L'Évolution créatrice). Importance admirable de ce livre, par où peut s'échapper de nouveau la philosophie. »
Les Poésies de A.O. Barnabooth (1913)
Sortie : 1913 (France). Poésie
livre de Valery Larbaud
Annotation :
28 juillet 1908
« Amusants, ces poèmes de Valery Larbaud ['Propos de table de A. O. Barnabooth', 1908]. En les lisant, je comprends que dans mes Nourritures, j'aurais dû être plus cynique. »
Jude l'obscur (1896)
(traduction F. W. Laparra)
Jude the Obscure
Sortie : 1950 (France). Roman
livre de Thomas Hardy
LeBouquiniste l'a mis en envie.
Annotation :
4 octobre 1914
[Voir infra]
Tess d'Urberville (1891)
Tess of the d'Urbervilles
Sortie : 1891 (Royaume-Uni). Roman
livre de Thomas Hardy
Annotation :
4 octobre 1914
« Achevé Tess of the d'Ubervilles que j'avais commencé à Paris ; j'ai donc mis un peu plus d'un mois à le lire. J'admire ce livre plus que je ne l'aime, et ne comprends pas comment on peut le préférer à Jude l'Obscur. »
La Folie Almayer (1895)
(traduction Anne-Marie Soulac)
Almayer's folly, a story of an eastern river
Sortie : 1919 (France). Roman
livre de Joseph Conrad
Annotation :
7 décembre 1915
[voir ci-dessous]
Eugénie Grandet (1833)
Sortie : 1834 (France). Roman, Romance
livre de Honoré de Balzac
Annotation :
7 décembre 1916
« Sitôt achevé le Almayer's Folly de Conrad, je me plonge dans le Bible in Spain de Borrow. Rien ne peut exprimer l'amusement et la curiosité avec lesquels je me précipite dans un nouveau livre anglais d'un bon auteur que je ne connaisse pas encore ; amusement que, depuis longtemps, la littérature française ne pouvait plus me donner, ne me réservant plus, à proprement parler, de surprises. Comme lorsque je lus pour la première fois un Balzac (c'était Eugénie Grandet). »
22 mars 1931
« Relu d'un trait 'Eugénie Grandet' que je n'avais pas repris depuis le jour où je le dévorais, à seize ans, dans une grange de La Roque. C'est le premier Balzac que j'ai lu. Il ne me paraît pas des meilleurs, ni mériter du tout la faveur insigne qu'on lui accorde. »
Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734)
Sortie : 1734 (France). Essai, Histoire
livre de Montesquieu
Annotation :
16 janvier 1916
« Je me rends compte que l'atmosphère dans laquelle j'ai vécu depuis plus d'un an est la plus déprimante qui soit. Devant ce défilé continu de misères qui sans cesse me tiraient le cœur, je prenait honte de toute supériorité et me redisais avec l'Eucrate de Monstequieu : « Pour qu'un homme soit au-dessus de l'humanité, il en coûte trop cher à tous les autres. » »
Montesquieu est à nouveau évoqué le 1er février 1942 (Tacite).
L'Évangile selon Jean
(traduction Jean Grosjean)
To kata Iōánnēn euangélion
Récit, Art de vivre & spiritualité
livre
Annotation :
18 janvier 1916
« (...) je relis le début du XVe chapitre de l'Évangile de Jean et ces paroles s'éclairent soudain pour moi d'une lumière affeuse :
« Si quelqu'un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, et il sèche ; puis on ramasse les sarments, on les jette au feu, et ils brûlent. »
Vraiment n'étais-je pas « jeté au feu », et déjà en proie aux flammes des plus abominables désirs ?... »
Journal intime
Sortie : 3 novembre 2010 (France). Biographie
livre de Sophie Tolstoï
Annotation :
19 août 1917
« Je m'efforce de lire le 'Journal intime' de Tolstoï, que j'ai fait venir ici sur les conseils de Igor Stravinski – mais je n'y prends aucun plaisir, n'en tire aucun profit. »
Lettres à Fanny et autres correspondants
Sortie : octobre 1993 (France).
livre de John Keats
LeBouquiniste l'a mis en envie.
Annotation :
30 octobre 1917
« Je me repose avec Keats, reprenant ses lettres avec infiniment de joie : 'Better be imprudent moveables than prudent fixtures' ('Lettres', II, p. 80). »
29 mai 1923
« Le triomphe de l'objectivité, c'est de permettre au romancier d'emprunter le « je » d'autrui. J'ai donné le change pour avoir trop bien réussi ; certains ont pris chacun de mes livres pour des confessions successives. Cette abnégation, cette dépersonnalisation poétique, qui me fait ressentir les joies et les douleurs d'autrui beaucoup plus vivement que les miennes propres, nul n'en parle aussi bien que Keats ('Lettres') »
Oeuvres (1936)
Sortie : 1 mai 1936. Essai
livre de Jacques-Bénigne Bossuet
Annotation :
30 octobre 1917
« Jamais je n'ai moins aspiré au repos. Jamais je ne me suis senti plus soulevé par cet excès des passions dont Bossuet fait l'apanage de la jeunesse, dans cet admirable 'Panégyrique de saint Bernard' que je relisais ce matin. »
Lecture, le même jour, de 'The Shaving of Shagpat' (1856) ['Shagpat rasé' (1921)] de George MEREDITH (non référencé sur SC).
Cinq Excentriques Anglais
Eminent Victorians
Sortie : 1918 (France). Biographie
livre de Lytton Strachey et L. Strachey
LeBouquiniste l'a mis en envie.
Annotation :
Par défaut, en lieu et place de 'Eminent Victorians' (1918).
[Voir ci-dessous]
Souvenirs d'enfance et de jeunesse (1883)
Sortie : 1883 (France). Autobiographie & mémoires
livre de Ernest Renan
Annotation :
20 octobre 1918
« Je lis la vie du cardinal Manning dans Eminent Victorians de Lytton Strachey, et les Souvenirs de Renan. Je ne supporte ni la flaccidité de sa pensée ni l'aménité de son style. Mais ce livre me paraît néanmoins d'une grande importance. »
Men and Women (1855)
Sortie : 1855. Poésie
livre de Robert Browning
Annotation :
26 octobre 1918
[Voir ci-dessous]
La Légende des siècles (1883)
Sortie : 1859 (France). Poésie
livre de Victor Hugo
Annotation :
26 octobre 1918
« Et tout en lisant Browning ('Saül', 'Fra Lippo Lippi', 'Andrea del Sarto', etc.), je pensais : mais nous avons Victor Hugo. Alors, ce matin, je reprends 'La Légende des siècles' (volume II de la petite édition définitive) et j'ai fait un grand effort pour lire « Éviradnus ». Consterné par la niaiserie gigantesque de ces vers sublimes. Imaginer un étranger noyé là-dedans ! En plus de l'intérêt du métier, que reste-t-il ? n'en déplaise à Souday. De beaux vers, d'admirables vers (l'enveloppe de la chanson d'« Éviradnus » est d'une extrême beauté – et même de qualité particulièrement rare) mais d'une beauté presque uniquement verbale et sonore. On n'imagine rien de plus creux, de plus absurde... ni de plus splendide »
Le Paradis perdu (1667)
Paradise Lost
Sortie : août 1991 (France). Poésie
livre de John Milton
Annotation :
[1918]
« RELIGION. L'enfer – aussi bien que le paradis – est en nous. Milton l'exprime admirablement en ce vers, lorsqu'il fait dire à Satan même :
'Wich way I fly is Hell ; myself am Hell.'
(Paradise Lost, IV, 75.) »
['Par quelque chemin que je fuie, il aboutit à l'enfer ; moi-même je suis l'enfer (...).' (Trad. Chateaubriand)]
La Russie dans l'ombre
Sortie : 1 août 1991 (France). Récit
livre de H. G. Wells
Annotation :
16 janvier 1921
[En lieu et place d'un recueil d'articles de Wells]
« Je lis les articles de Wells sur le bolchévisme* (parus dans le 'Progrès civique') avec l'intérêt le plus vif, et cette sorte d'embrasement de l'esprit qu'on éprouve lorsqu'on reconnaît en autrui sa propre pensée encore incertaine, dégagée, affermie et comme assagie. »
* Wells s'est rendu en Russie, où il fût reçu par Lénine, en 1920.
L'Adolescent (1875)
(traduction André Markowicz)
Подросток (Podrostok)
Sortie : 1998 (France). Roman
livre de Fiodor Dostoïevski
Annotation :
1er décembre 1921
Voir infra.
Les Possédés / Les Frères Karamazov
(traduction Pierre Pascal)
Roman
livre de Fiodor Dostoïevski
Annotation :
1er décembre 1921
Les Possédés, 1870
Les Frères Karamazov, 1879-80
Voir ci-dessous
L'Idiot (1870)
(traduction Pierre Pascal)
Sortie : 1870.
livre de Fiodor Dostoïevski
Annotation :
1er décembre 1921
« Achevé le premier volume de 'L'Idiot' ; mon admiration n'est plus tout à fait aussi vive. Les personnages grimacent à l'excès et 'coïncident', si je puis dire, trop facilement ; ils ont perdu pour moi beaucoup de leur mystère ; pour un peu je dirais que je les comprends trop bien ; c'est-à-dire que je comprends trop le parti que Dostoïevski prétend tirer d'eux. Il y a dans ce livre des passages incomparables et chargés d'un extraordinaire enseignement ; enfin certains personnages sont prodigieusement réussis ; ou, plutôt (car tous les portraits sont admirables), certains propos de ceux-ci – en particulier ceux du général Ivolguine et de la générale Epantchine. – Mais mon impression se confirme : je préfère 'Les Possédés' et les 'Karamazov' ; peut-être même 'L'Adolescent' (sans parler de certains récits plus courts). Mais je crois que 'L'Idiot' est particulièrement fait pour plaire aux jeunes gens et, de tous les romans de Dostoïevski, c'est celui-là que je leur conseillerais de lire d'abord »
Le Mariage du Ciel et de l'Enfer
(traduction André Gide)
The Marriage of Heaven and Hell
Sortie : 1790 (France). Poésie
livre de William Blake
LeBouquiniste a mis 8/10.
Annotation :
16 janvier 1922
« Charlie Du Bos m'envoie The Marriage of Heaven and Hell que je lui avait dit que je désirais lire, assuré que j'étais d'y trouver une révélation et une confirmation de certaines pensées qui s'agitent en moi depuis longtemps. La rencontre de Blake est pour moi de la plus grande importance. Déjà je l'avais entrevu, durant la première année de la guerre (...). Comme un astronome qui suppute l'existence d'un astre dont il ne perçoit pas encore directement les rayons, je pressentais Blake, mais ne me doutais pas encore qu'il formait constellation avec Nietzsche, Browning et Dostoïevski. La plus brillant étoile, peut-être, de ce groupe ; assurément la plus étrange et la plus reculée. »