Cover Luis Buñuel - Commentaires

Luis Buñuel - Commentaires

Iconoclaste, provocatrice et grave à la fois, marqué par un souci de faire éclater les normes narratives et les frontières étanches entre le rêve, l’imaginaire et la réalité, le cinéma de Buñuel demeure l’une des études les plus profondes de l’imbrication entre inconscient, ordre ...

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20 films

créée il y a plus de 12 ans · modifiée il y a environ 7 ans
Un chien andalou
7.2

Un chien andalou (1929)

16 min. Sortie : 6 juin 1929. Fantastique, Épouvante-Horreur, Muet

Court-métrage de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Le premier court-métrage de l’artiste développe d’emblée l’expression centrale du désir et de son empêchement, qui excède toute rationalité, toute logique, toute idéologie ou conviction. Guidé par l’inconscient, il vise à briser la quiétude mentale du spectateur et à montrer comment cet instinct surmonte les obstacles qui se dressent sur sa route, les tabous de la morale et de pudeur, symbolisés par des potirons, des curés, un piano dans lequel pourrissent des charognes d’ânes. C’est un manifeste surréaliste qui conserve son pouvoir de fascination, ses puissants effets réactifs, et dont l’écriture automatique, le montage par associations d’idées, les enchaînements délirants, les visions psychiques, la force iconoclaste des images pulvérisent les lois de la réalité, de l’espace-temps, du principe d’identité.

L'Âge d'or
7.1

L'Âge d'or (1930)

1 h. Sortie : 28 octobre 1930 (France). Comédie dramatique

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Buñuel renchérit dans la subversion et la violence contestataire au service de la révolution, bat en brèche les bonnes mœurs, le bon goût et le bon sens en un hymne à la toute-puissance de l’amour fou (deux êtres y sont aimantés dans une attraction qui annule tout assujettissement aux lois de l’espace et du temps), seule force capable de détruire la morale bourgeoise de l’Église, de l’armée ou de la famille. Explosion d’un érotisme imprévisible, onirique, dément, à travers le doigt bandé d’une femme, un verre renversé, un baiser sur la bouche, un arbre en feu, un festival de pâmoisons, la procession des personnages orgiaques du marquis de Sade, un paso-doble exaltant. Dans ce pamphlet incendiaire, l’Eros frustré conduit au carnage, métaphore des battements de cœur et du chahut des pulsions.

Terre sans pain
7

Terre sans pain (1933)

Las Hurdes, tierra sin pan

30 min. Sortie : décembre 1933 (Espagne). Essai

Documentaire de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Insensible aux valeurs porteuses d’un humanitaire coulé dans un même formatage compassionnel, le seul documentaire de Buñuel, dur comme un caillou, est porté par la certitude que la réalité est souvent grosse d’un irrationnel qu’il suffit de voir et d’accueillir. En fixant sur pellicule le quotidien misérable des habitants de Las Hurdes, région enclavée de l’Estrémadure, il impose au regard une violence crue renforcée par la neutralité entomologique du commentaire et la musique distanciée de Brahms. La fillette agonisant sur le tas de gravats, l’âne dévoré par les abeilles, les difformités consanguines des crétins qui se cachent dans les hauteurs des montages constituent autant d’images rudes, puissantes, d’une totale étrangeté, où la détresse la plus terrible atteint les limites de la bestialité.

Los Olvidados
7.8

Los Olvidados (1950)

1 h 25 min. Sortie : 14 novembre 1951 (France). Policier, Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 4/10.

Annotation :

Avec ce pendant fictionnel de "Terre sans pain", dont l’absence radicale de bons sentiments fait toute la différence avec le néoréalisme contemporain, Buñuel se plie à une inspiration sociale marquée d’un réalisme âpre et funeste. Il constate, enregistre les faits avec une objectivité exempte du moindre frémissement. La description de l’univers de la rue est assez saisissante, valant comme envers de la civilisation policée, soulignant la spirale dans laquelle la misère enferme les enfants qui souffrent et se déchirent férocement sous l’œil impuissant et complice des adultes. Un film très noir, au pessimisme terrible, parce que le mal y est envisagé comme inhérent à la nature humaine et que même la poésie qu’elle délivre exsude quelque chose d’atroce, de sordide. Je n’y suis pas forcément très sensible.

Susana la perverse
6.4

Susana la perverse (1951)

Susana, demonio y carne

1 h 26 min. Sortie : 24 novembre 1952 (France).

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Le titre français est la formulation d’un mensonge. Car si cette pulpeuse Susana, qui préfigure l’ange du "Théorème" de Pasolini, séduit tous les hommes de l’hacienda dans laquelle elle s’est réfugiée, c’est avec une application de brave petit soldat, sans une once de perversité. À la fois trou noir et reflet de ceux qui la convoitent, elle provoque les désirs et les jalousies, attise les bons et les mauvais sentiments, met en crise le lien social, sème la discorde dans l’ordre familial pour mieux survivre, fissure le vernis fragile des apparences. L’ironie aidant, il suffirait d’un léger changement de perspective pour que le registre mélodramatique relève du vaudeville. Quant au dénouement moralisant que le cinéaste dit avoir regretté, il dispense un happy end en trompe-l’œil qui ne peut abuser que les plus crédules.

El
7.4

El (1953)

1 h 30 min. Sortie : 2 juin 1954 (France). Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La mystification chez Buñuel n’est pas séparable de la poésie : si le sens se dérobe, ce n’est pas juste par provocation et refus des conventions mais aussi pour dire la réalité comme un mystère. En racontant la dégradation progressive d’un jaloux maladif qui rend la vie de son épouse impossible puis sombre lui-même dans la folie, il fait glisser l’étude clinique vers une ironie grinçante et élargit l’exploration des malheurs du héros aux dimensions d’un mal universel. Psychodrame lacanien, étude minutieuse d’un cas de paranoïa qui accumule les symptômes œdipiens, fétichistes, obsessionnels sans nuire à la complexité du personnage, l’œuvre donne également une première forme à l’un des grands enjeux du cinéma moderne : faire évoluer la focalisation projective du spectateur au cours du récit.

La Vie criminelle d'Archibald de La Cruz
7.3

La Vie criminelle d'Archibald de La Cruz (1957)

Ensayo de un crimen

1 h 29 min. Sortie : 27 avril 2022 (France). Comédie, Policier, Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

On est dans la continuité de l’opus précédent, tant par l’articulation entre documentaire et fiction, désir et interdit religieux, que par la description précise du comportement d’un homme obsédé par l’envie compulsive d’assassiner les femmes qu’il croise afin de retrouver l’émoi érotique de la scène initiale. Fortement imprégné d’humour noir, mû par la croyance surréaliste selon laquelle il existe des effets de vases communicants entre réel et imaginaire, le film dresse le portrait du héros buñuelien par excellence : marqué par un fétichisme obsessionnel, par des frustrations aliénantes, par des fantasmes de possession impossible. L’aspect morbide du sujet est partiellement désamorcé par la dérision féroce de son traitement, dans une esthétique travaillée qui renvoie à la tradition du film noir hollywoodien.

La Mort en ce jardin
6.2

La Mort en ce jardin (1956)

1 h 44 min. Sortie : 21 septembre 1956. Aventure, Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Pourchassé suite à une révolte matée, un groupe de personnages très divers s’enfonce dans la jungle amazonienne, éprouvant bientôt les sévices de l’incertitude, de l’angoisse, de la faim et de la folie. Buñuel déchaîne sa vision féroce des rapports humains et montre que le bien et le mal circulent librement en chacun, soumis à d’incessantes inversions de polarité. Sa manie de la destruction des clichés assure une vigueur étonnante à la confrontation des idées et des comportements, et offre à cette amère odyssée un collier d’images improbables dictées par la logique du rêve : femme se promenant en bijoux et robe de soirée entre les décombres d’un avion, Champs-Elysées s’animant au milieu d’une flore tropicale, longs cheveux pris dans les arbres, myriades de fourmis dévorant une dépouille de serpents…

Nazarin
7

Nazarin (1959)

Nazarín

1 h 34 min. Sortie : 30 novembre 1960 (France). Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Surprise : celui que la critique postsurréaliste cataloguait comme un "bouffeur de curés" filme avec gravité et compréhension le parcours d’un humble prêtre des pauvres, confronté à la circulation du mal et à l’impossibilité de peser, par ses actes, sur le réel. Buñuel filme un cheminement de conscience, déplace le champ des interdits et des fantasmes sur un domaine plus parabolique (l’expérience de Nazarin, marchant pieds nus accompagné de deux pécheresses repenties qui voient en lui un saint, est dotée d’une forte connotation christique), sans rien céder à son goût de la contradiction et de l’équivocité. La grâce est-elle l’envers du libre-arbitre ? Nos actes reflètent-ils notre volonté ? Les réponses appartiennent à chaque spectateur, que les images du film auront interrogé.

La fièvre monte à El Pao
6.2

La fièvre monte à El Pao (1959)

1 h 37 min. Sortie : 5 décembre 1959 (France). Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Film mal-aimé, considéré par l’auteur lui-même et beaucoup de ses admirateurs en parent pauvre. On peut trouver ce traitement injuste tant s’y manifeste vigoureusement la conscience politique d’un cinéaste à mi-chemin de Brecht et de Camus – même s’il n’est jamais meilleur que lorsqu’il transcende le réel au lieu, comme ici, de s’y plier. Dans une archétypale dictature fasciste, un jeune idéaliste ruse, finasse, conseille, nuance, transige, calcule ses stratégies sans s’apercevoir qu’il fait le jeu du pouvoir établi qu’il entend renverser. Parce qu’il est le contraire d’un Machiavel, il finira par comprendre que le sang du sacrifice est le seul critère de la pureté d’une révolte. Telle est la morale de cette œuvre amère, pessimiste, engagée contre toutes les formes de tyrannie, d’opportunisme et de résignation.

Viridiana
7.4

Viridiana (1961)

1 h 30 min. Sortie : 4 avril 1962 (France). Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Parcours d’une jouvencelle pieuse et charitable faisant le douloureux apprentissage de la nature humaine. Buñuel rejoue la problématique du goût, du rejet et de la terreur des choses sacrées, et décline ses obsessions relatives au sexe, à l’angélisme et aux frustrations qui en découlent. Créant des paradoxes moraux qui seraient plaisants s'ils n'étaient tragiques, imaginant des visions de poète que l'on a dit blasphématoires et impies, il montre, en une succession de sarcasmes ironiques qui sont autant de cris de révolte, la réponse vengeresse et atroce des nécessiteux après des siècles de soumission. Cette fulgurante métaphore politique constitue la plus subversive des charges contre l’Église et l’état d’une Espagne aveuglée, qui atteint son apogée dans l’extraordinaire séquence de l’orgie, avec ses images embarrassantes, terribles et indélébiles.
Top 10 Année 1961 :
http://lc.cx/BMA

L'Ange exterminateur
7.4

L'Ange exterminateur (1962)

El ángel exterminador

1 h 33 min. Sortie : 1 mai 1963 (France). Drame, Fantastique

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Au confluent de la satire sarcastique et de l’inspiration surréaliste de ses débuts, il s’agit de l’une des œuvres les plus représentatives et, objectivement, les plus achevées de l’auteur. Pour raconter les mésaventures des naufragés de la rue de Providence, soumis à l’arbitraire d’une claustration inexplicable, ce dernier se libère des chaînes du rationnel, ne s’encombre d’aucun alibi anecdotique, et développe une construction géométrique fondée sur la réitération contradictoire d’une situation donnée. Huis-clos tragique et burlesque à la fois, où l’enfer n’est pas seulement chez les autres mais aussi en chacun de ceux qui portent un masque et qui font du mensonge et du faux-semblant un credo existentiel, l’œuvre stigmatise avec une formidable virulence la détérioration progressive du vernis social.
Top 10 Année 1962 :
http://lc.cx/Bs6

Le Journal d'une femme de chambre
7.3

Le Journal d'une femme de chambre (1964)

1 h 37 min. Sortie : 4 mars 1964. Policier, Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Trente ans après les attaques des camelots du roi contre "L’Âge d’Or", Buñuel règle ses comptes avec Action Française en transposant le roman de Mirabeau dans la France rurale et fascisante de l’entre-deux-guerres. L’ignoble brochette est gratinée : militaire en retraite, dame frigide, vieux gâteux constituent autant de spécimens des eaux troubles où nage l’héroïne dans le seul but de se faire une place au soleil. Il est encore question d’aliénation à un héritage culturel, d’impuissance, de désir inassouvi surtout, qui développe une logique aussi déroutante que la circulation du mal. C’est en confrontant cette femme de chambre aux frustrations diverses de la bourgeoisie de province que l’auteur développe la portée subversive d’une étude de mœurs chargée de vitriol, d’un vaudeville de la classe d’"Ubu-Roi".

Simon du désert
7.1

Simon du désert (1965)

Simon del desierto

45 min. Sortie : 15 mars 1969 (France). Comédie, Drame, Fantastique

Moyen-métrage de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Par sa durée compressée, le minimalisme de son argument et l’allégresse de son développement, ce film assez jubilatoire impose à nouveau la férocité incendiaire de l’expression buñuelienne : de la fourmi à la chèvre, de la chèvre au nain, du nain au moine, toutes les figures sont tendues dans le même geste de démystification. En quarante deux minutes d’images percutantes, le cinéaste crée des personnages, évoque une époque, raconte une histoire, règle ses comptes avec Dieu et le diable, intrigue, surprend et stimule. La religiosité mystique en prend méchamment pour son grade tout au long d’une succession de séquences iconoclastes, drôles et corrosives qui ridiculisent le dogmatisme de l’anachorète déconnecté du monde sensible, et dont la désinvolture même est le fruit d’un parfait mûrissement.

Belle de jour
7.2

Belle de jour (1967)

1 h 40 min. Sortie : 24 mai 1967. Drame, Romance

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Un des films les plus troublants du cinéaste, dans la manière dont il juxtapose la volonté de souillure et de domination avec celle de préserver à tout prix la pureté de son héroïne, qui prend conscience de son désir de femme grâce aux voies opposées que les deux hommes lui proposent. D’une certaine manière, le cinéaste creuse un sillon ouvert par Hitchcock (le chignon de Séverine renvoie à celui de Marnie, autre frigide). Là encore, l’étude est clinique tout en introduisant à l’univers mental de la protagoniste, à ses fantasmes masochistes, au travers de fascinantes images distanciées qui abandonnent la psychologie, la sociologie et autres béquilles de la vraisemblance romanesque. Réalité, souvenirs et rêves éveillés se mêlent, traversés comme souvent des questions de la chrétienté et de la bourgeoisie.
Top 10 Année 1967 :
http://lc.cx/BCh

La Voie lactée
6.7

La Voie lactée (1969)

1 h 42 min. Sortie : 15 mars 1969. Comédie dramatique

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Deux clochards-pèlerins s’en vont arpenter la route de Paris à Saint-Jacques de Compostelle ; ils vivront bien des péripéties contemporaines, bibliques ou fantastiques dont l’auteur, ayant constaté toutes les hérésies possibles et imaginables, tirera une leçon de scepticisme. On peut considérer ce film comme le premier volet d’une trilogie de la contradiction et de l’absurde, interrogeant la dialectique de la réalité, du hasard et de la morale individuelle. Son récit picaresque téléscope époques, croyances et querelles théologiques, réactive l’iconographie religieuse pour en révéler l’ambiguïté, refuse les simplifications, les vérités figées, les oppositions tranchées, célèbre le difficile combat pour la liberté de l’esprit. On peut néanmoins trouver la comédie moins mordante, moins incisive que d’accoutumée.

Tristana
6.9

Tristana (1970)

1 h 39 min. Sortie : 29 avril 1970 (France). Drame

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Buñuel disait avoir mis beaucoup de lui-même en Don Lope, libéral attaché à la supériorité de la passion sur la sagesse. Malgré la sympathie qu’on l’on peut éprouver à son encontre, ce personnage impose pourtant ses désirs à un être démuni et docile, en confondant leurs libertés respectives. C’est à nouveau le surgissement de la pulsion refoulée que l’artiste explore, le travail souterrain d’un inconscient dicté par la frustration, les interdits sociaux, le fétichisme sexuel – infirmité et prothèse y sont des stimulateurs érotiques. Mais la perversité des êtres est mystérieuse, car tandis que le cœur de l’héroïne s’assèche et que le vieil anticlérical reçoit les curés autour du café, s’inversent les rapports de domination et d’humiliation, les places du bourreau innocent et de la victime consentante.

Le Charme discret de la bourgeoisie
7.2

Le Charme discret de la bourgeoisie (1972)

1 h 42 min. Sortie : 15 septembre 1972. Comédie

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Six individus s’évertuent à dîner et s’en voient empêchés par le surgissement absurde d’un événement inattendu. Situation réitérée tout au long d’une construction complexe d’emboîtement des réalités qui autorise toutes les digressions et pousse à fond sa logique gigogne, en une suite d’éclairs de malice et de pirouettes débridées : l’un rêve qu’un autre rêve que… Tout cela est absolument jouissif, dessinant par l’humour noir et le passage de la veille au fantasme un précis de décomposition de la frustration et du rationalisme. Les scènes mémorables (tel ce moment où nos héros se retrouvent sur la scène d’un théâtre sans comprendre pourquoi) s’enchaînent avec une fluidité trouée par des gros plans rugueux et la vision récurrente des protagonistes marchant sur la route déserte de leur désir inaccompli. Un sommet.
Top 10 Année 1972 :
http://lc.cx/AUa

Le Fantôme de la liberté
7.3

Le Fantôme de la liberté (1974)

1 h 44 min. Sortie : 11 septembre 1974 (France). Comédie

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Buñuel et son scénariste Jean-Claude Carrière approfondissent cette exonération des règles supposées de l’écriture dans ce nouveau focus décapant sur les habitudes sociales, fidèle, par son imagination en liberté, ses principes d’inversion, son dérèglement permanent, son abolition des contraires, à l’esprit surréaliste, dont il réactive le principe du cadavre exquis. Libre d’accès comme un cimetière mais parsemée de téléphones donnant sur l’irréconciliable et le ténébreux, l’œuvre frustre volontairement l’attente du spectateur, l’encourage à rompre avec ses habitudes de regard et de compréhension, et pousse à l’extrême l’éclatement des règles narratives au profit d’une composition musicale, souterraine, secrète, qui baigne le plus souvent dans un étrange et angoissant climat de violence feutrée.

Cet obscur objet du désir
7.1

Cet obscur objet du désir (1977)

1 h 43 min. Sortie : 17 août 1977. Comédie dramatique

Film de Luis Buñuel

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Le désir du titre ne peut s’exprimer que dans la soustraction permanente de son objet, son empêchement réitéré : comme dans "Le Charme discret de la bourgeoisie", c’est aux tourments de la frustration que s’intéresse Buñuel à travers ce dernier film, grave et ludique à la fois, cerné par l’absurde d’un monde dans lequel il ne se reconnaît plus. L’idée de faire jouer l’héroïne par deux actrices opposées souligne de manière lumineuse le vacillement de l’ordre masculin social, ébranlé par l’énigme d’une séduction dont on ne connaîtra jamais les motivations. Semblable à la brodeuse en vitrine de l’ultime image, ravaudant un voile maculé de sang, il y a au soir de sa création l’éclat limpide d’un mystère sans clé, un style tellement épuré qu’il devient transparent comme du cristal. Belle sortie, donc.

Thaddeus

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