Mon Top 1985

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Curieusement j'étais jusqu'alors incapable de noter ce Tarkovski, que je considère pourtant comme le plus grand parmi les plus grands. Comme s'il me manquait un élément, comme si j'avais l'impression d'être en quelque sorte passé un peu à côté.

Et là, en le revoyant en salles dans une copie (merveilleusement) restaurée, l'évidence m'a sauté aux oreilles : c'était donc lui l'intrus du premier visionnage, celui qui m'avait dérangé alors qu'il est un protagoniste essentiel du film : le son, ou plutôt LES sons, décalés, sans justification formelle, mais qui deviennent rapidement aussi hypnotiques que les images bouleversantes offertes par le génie russe.

Je vais vous faire un aveu : j'ai pleuré durant ce film. Non face à une situation, un dialogue, un personnage , mais face à un acte de cinéaste, que les malins actuels sont en train de tuer à force de le galvauder : le plus beau plan-séquence de l'histoire du cinéma, parce que presque physiquement inhumain, autant pour le spectateur que pour le personnage et donc l'acteur.

Jamais probablement la foi, la spiritualité, la poésie, la philosophie, la politique et la création de l'artiste n'ont été ainsi réunis dans un seul objet : une bougie manquant à chaque seconde de nous signifier à tous le mot "Fin".

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"Ma vie de chien" de Lasse Hallström ou le prodige de l’enfance filmée, poétique, léger, féerique malgré la douleur. Du Bergman sans le sadisme, la cruauté de celui-ci envers ses personnages.

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Pour finir cette journée sur un conseil, si vous en avez la possibilité car je sais que les copies ne se bousculent pas pour l'instant, foncez voir le premier Coen en version restaurée.

C'est une bombe à tous les niveaux, encore plus fort que dans mes souvenirs, et peut-être même ce que les frangins ont fait de plus incroyable. Fou, drôle, excessif, radical, la rage au ventre, "Blood Simple" ne débande pas de la première à la dernière seconde, la mise en scène est un festival d'inventivité fauchée, le travail sur le son est époustouflant et donne le frisson, et Frances McDormand est totalement au-dessus du game...

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Curieusement je n'avais jamais vu ce film pourtant typique de ceux que je chopais par dizaine dans mon vidéo-club durant mon adolescence.

Bilan des courses : j'ai pris mon pied devant ce truc terriblement 80's, et qui fait d'ailleurs son âge, qui en fait des caisses aussi, à l'image d'un Mickey Rourke qui cabotine comme un malade, où la musique surligne surligne et surligne, mais qui sera plus que regardable dans 120 ans pour une unique raison nommée Cimino et sa mise en scène tout simplement magistrale.

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Avant que le monsieur ne soit sélectionné dans tous les festivals, qu'on ne lui dise qu'il était un immense réalisateur, Hou Hsiao-hsien a été le précurseur de la Nouvelle vague taïwanaise, et ce "Un temps pour vivre, un temps pour mourir" est une splendeur dénuée de toute prétention. Dans ses "œuvres de jeunesse", celui qui s'est un jour pris pour un autre filmait la douleur avec douceur, le temps qui passe, les tumultes de la vie, le tout avec une grâce infinie.

On comprend mieux comment un Edward Yang et ses sublimes "A Brighter Summer Day" et "Yi Yi" ont pu exister, ils avaient un glorieux aîné qui leur avait simplement montré la voie.

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Louis Malle signe là un documentaire magistral, témoignant encore aujourd'hui de ce qu'a représenté l'avènement de Reagan pour une certaine Amérique, le basculement vers le tout financier au détriment de tout humanisme, on se croirait un peu dans "Witness" de Peter Weir que serait venu ausculter Frederick Wiseman.

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Je disais hier tout le bien que je pensais du "Mephisto" du Hongrois István Szabó, et ce "Colonel Redl", réalisé quatre ans plus tard, est tout aussi impressionnant et partage avec lui bien des choses, que ce soit dans le fond ou dans la forme. La Grande Histoire se mêle à l'intime, au psychologique, il y a quelque chose de vertigineux dans ce récit et la manière de l'orchestrer. Vertigineux comme le jeu du fou furieux Klaus Maria Brandauer, qui semble à nouveau se régaler dans le monde terrifiant de Szabó.

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C'est ça les grands réalisateurs, ils font semblant de faire un film et en font un autre, ils esquissent un portrait et en produisent un autre. C'est ainsi que Wim Wenders promet Ozu et dérive dans Tokyo, du portrait d'artiste en pointillés esquissé il s'égare pour notre plus grand bonheur vers une œuvre inclassable à la Chris Marker, d'ailleurs croisé ici, plus sociologique que biographique.

Malgré tout l'amour pour un immense cinéaste transpire à chaque seconde, la passion pour un pays aussi, que Wenders célèbrera à nouveau 38 ans plus tard dans le si doux "Perfect Days".

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Ça fait du bien de voir un ancien Kusturica, avant celui devenu pour moi quasiment irregardable, celui qui a fait du bruit et de la fureur, du tumulte, du mouvement hystérique, une recette. Ici c'est plein d'humanité, de tendresse, de compassion pour ceux qui fautent, et même politiquement c'est pondéré (A ce niveau aussi le bonhomme a bien changé). Bref cette Palme d'or 85 est certes un grand film sur l'Histoire, sur un peuple, mais surtout sur l'amour d'un fils pour son père.

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Paul Schrader a certes une filmographie faite de hauts et de bas mais quand il était en haut il ne faisait pas les choses à moitié.

Les quatre chapitres de la vie de "Mishima" sont à cette image, il y a parfois quelques descentes mais quand ça grimpe, en particulier dans l'émotion que dégagent les parties en noir et blanc, c'est d'une puissance poétique et philosophique rare. Et cette partition de Philip Glass, les poils les poils les poils !

Comme quoi on peut faire du biopic totalement fidèle à son sujet sans pour autant verser dans le conformisme frileux.

Ou la différence entre des metteurs en scènes et des enregistreurs d'images...

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A 11 ans, et pendant très très longtemps, j'ai vécu mes nuits menotté à Giraudeau et Lanvin, j'ai porté un marcel parce que j'avais des tablettes de chocolat à faire passer Christiano Ronaldo pour Éric Zemmour et surtout j'ai commis le plus beau casse de l'histoire du cinoche français. Et malgré tout ça, je suis resté hétérosexuel, à n'y rien comprendre...

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Si un jour vous avez la possibilité d’assister à une Masterclasse de Mister John Landis, foncez, cet homme est généreux, instruit, drôle... https://twitter.com/takeshi2922/status/1143521896870436866

Juste avant ce très beau moment j'ai enfin découvert ce film un peu perdu de vue, énorme flop à sa sortie en 1985 alors qu'il réunissait pourtant un sacré duo de stars : Jeff Goldblum et Michelle Pfeiffer. C’est pourtant délicieusement 80’s, avec ses musiques, ses fringues, et surtout ses seconds rôles improbables, comme toujours chez Landis qui adorait s'offrir ces petits cadeaux, Bowie, Cronenberg ou encore Vadim. Fun en diable, rétro, pétillant.

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Je ne me souvenais pas à quel point ce film était Verhoevenien en diable, il est même amusant de tracer des parallèles entre deux de ses potacheries païennes, cette "Chair et le Sang" et "Benedetta" : on y croise une fille possédée (?), de la sexualité débridée avec moults symboles et même l'utilisation détournée d'objets (ici un crucifix là un bélier qui semble avoir été taillé de la même façon et qui défonce... une porte), la peste et la religion bien entendu, le plaisir de la provocation et du quinzième degré via la crudité, et ce kitsch totalement assumé.

Bref Verhoeven a toujours été un ado, pour le meilleur et pour le pire, et quand il te glisse un hommage à "Apocalypse Now" tu te dis qu'avec lui le meilleur l'emporte quand même souvent...

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Blake Edwards est un grand réalisateur dont il faut inspecter le filmographie de fond en comble, pour par exemple débusquer ce type de petite comédie romantique pas si connue, totalement délicieuse, et comme souvent chez lui assez irrévérencieuse. Avec un trio d'acteurs formidable, des situations plus ubuesques les unes que les autres, et une tendresse folle. Tendresse au combien contagieuse...

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Le nom de Francis Reusser, acteur/réalisateur suisse, sera resté chez nous quasiment inconnu, et ses films presque tout autant. Et pourtant cet homme savait sortir des sentiers battus avec un talent peu commun. Que ce soit "Seuls" ou ce "Derborence" on est dans des objets insaisissables mais envoûtants.

Bien sûr ici le surjeu est compliqué à aborder, mais quel sens du cadre, de l'espace, c'est par instants à couper le souffle esthétiquement, et les musiques de Rossini et des Voix bulgares belles à pleurer.

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Y'a pas à dire, le Clint est plus à son aise avec un flingue dans les mains qu'avec un ballon ovale. Et j'oserais même affirmer que quand en plus il monte à cheval alors là tout tourne rond. (Pourvu que ce jeu de mots pourri ne lui donne pas envie de faire un biopic sur Maradonna !)

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J'ai abordé ce "Détective" non sans une certaine fébrilité : parce que Johnny dans un Godard des années 80, loin d'être sa meilleure période, ça pouvait piquer.

Et pourtant, même si c'est daté, même si on n'est pas si loin par instants d'une "Beineixerie", ce truc a un charme fou, Godard fait du Godard, et puis il y a Jean-Pierre Léaud, et ça c'est un point de plus direct.