Pictures (2022)
135 films
créée il y a environ 3 ans · modifiée il y a presque 2 ansDouze Hommes en colère (1957)
12 Angry Men
1 h 36 min. Sortie : 4 octobre 1957 (France). Policier, Drame
Film de Sidney Lumet
Paul_ a mis 8/10.
Annotation :
3 janvier
Revu.
Très bien marché sur mes élèves. (D'ailleurs ça m'a fait penser à leurs conseils de discipline...) Toujours passionnant cette obsession de couper les cheveux en quatre, ces « et si ? » infinis qui font l'apologie du doute aux dépens de la conviction. Le rythme est magistral, Fonda est magnifique et nimbé d'une aura presque divine. Mais c'est vrai que la fin aurait pu être différente – spoiler –, peut-être plus belle encore si le dernier juré n'avait pas cédé à l'opinion générale ?
Licorice Pizza (2021)
2 h 13 min. Sortie : 5 janvier 2022 (France). Comédie dramatique, Romance
Film de Paul Thomas Anderson
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
6 janvier
Au cinéma.
Oui, les deux acteurs ont le charme de leur physique singulier, et font très bien les sourires langoureux. La différence d'âge entre leurs personnages est intéressante, et assez rare au cinéma. Mais, hormis ces moments où le film joue à être un film – avec ses seconds rôles parfaits, entre autres Sean Penn et Bradley Cooper –, son scénario en roue libre m'a paru convenu, justement, en ce qu'il fait tout pour ne pas l'être. L'emballage est soigné, mais le désordre qu'il dissimule me semble assez artificiel, et me laisse un goût rance d'indie, à l'image de ce chassé-croisé amoureux à la fin, déjà vu mille fois.
My Fair Lady (1964)
2 h 50 min. Sortie : 23 décembre 1964 (France). Drame, Comédie musicale, Romance
Film de George Cukor
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
9 janvier
Au cinéma.
Outre son côté théâtre filmé un peu daté – on pouvait en attendre plus d'un film des années 1960 en matière de mise en scène, même si Cukor, on le sait, est surtout un réalisateur de l'âge d'or hollywoodien – et ses numéros musicaux lourdingues et pas toujours justifiés, le film est surtout intéressant pour son sujet bourdieusien en diable : comment le langage peut nous marquer socialement, peut-on rester soi-même quand on en change, etc. À ce titre on attend donc avec impatience l'évolution du personnage d'Audrey (aussi parce que son accent de petite fleuriste est insupportable), et c'est un bonheur quand elle arrive enfin, avec d'abord la magnifique séquence du bal – superbes couleurs et costumes dans la copie restaurée du film – et puis la fin, dont le discours sur les relations hommes-femmes est plus moderne qu'il n'y paraît, et où les sentiments refoulés du personnage de Rex Harrison vont éclater.
En attendant Bojangles (2022)
2 h 04 min. Sortie : 5 janvier 2022. Drame
Film de Régis Roinsard
Paul_ a mis 4/10.
Annotation :
10 janvier
Au cinéma.
Je ne sais plus quel sort faire de ce type de films, et je regrette sans doute de ne plus pouvoir les apprécier simplement, sans les intellectualiser, sans arrière-pensée parasite. Parce qu'en un sens, oui, c'est efficace et bien fait, les visages se tordent, les larmes montent aux yeux, on veut bien y croire un moment, mais que reste-t-il de tout cela ? C'est l'éternel problème des émotions prêtes à consommer : on est pris au piège des sentiments du film, de sa fausse pudeur, et il nous laisse avec la singulière sensation de s'être fait floué. La métaphore d'un certain cinéma fast-food fonctionne malheureusement bien ici.
Don't Look Up - Déni cosmique (2021)
Don't Look Up
2 h 18 min. Sortie : 24 décembre 2021. Comédie dramatique, Science-fiction
Film de Adam McKay
Paul_ a mis 4/10.
Annotation :
12 janvier
On en fait tout un foin pour ce film aux meilleures intentions du monde mais qui n'en reste pas moins médiocre. La métaphore de la comète est séduisante (et encore, comme on a pu justement le remarquer, elle vient du dehors, contrairement au réchauffement climatique dont nous sommes directement responsables), et il y a bien deux-trois bonnes idées mais elles sont complètement noyées dans un scénario grossier et une réalisation foutraque. D'abord la satire n'est pas subtile pour un sou, et entre la présentatrice TV odieuse, l'entrepreneur mégalo ou les étudiants babos altermondialistes, on ne s'est vraiment pas foulé pour les personnages. DiCaprio est insignifiant, toutes les blagues de Jonah Hill sont absolument gênantes, seule Meryl Streep amuse un peu dans une version féminine de Trump. Le traitement des écrans et des réseaux sociaux fait boomer. En somme ça fait long le sketch où l'Amérique règle ses comptes. Et outre son montage affreux, on se croirait encore dans la satire avec cette fin niaise au possible qui voit nos héros se réunir autour des bonnes vieilles valeurs de la patrie. Je veux bien que ce film soit adressé à l'autochtone primaire mais alors il n'y a pas de raison pour qu'on soit tous ici dans un tel déni cinématographique...
La Corde (1948)
Rope
1 h 20 min. Sortie : 22 février 1950 (France). Policier, Drame, Thriller
Film de Alfred Hitchcock
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
14 janvier
Hitchcock, à l'image de ses personnages obsédés par le crime parfait, rêve de faire le film parfait. La conscience de la prouesse technique, de ces plans-séquences au cordeau peut tétaniser au début, mais on finit par se laisser aller et jouir de ce ton délicieusement cynique et moderne, tout en admirant la fluidité de la mise en scène. Et si les soupçons du personnage de James Stewart naissent un peu trop facilement, ils contribuent aussi à installer rapidement cette atmosphère paranoïaque digne de Crime et Châtiment (les motivations de nos deux héros, se targuant d'une humanité supérieure, rappellent d'ailleurs celles de Raskolnikov). La fin, mis à part un discours assez surprenant, est particulièrement belle dans sa mise en scène très théâtrale.
Le Rayon vert (1986)
1 h 39 min. Sortie : 3 septembre 1986. Drame, Romance
Film de Éric Rohmer
Paul_ a mis 9/10.
Annotation :
15 janvier
Un Rohmer moins maniéré, plus naturaliste, alors forcément ce n'est pas pour me déplaire. Rarement un film m'aura autant fait ressentir la solitude de son personnage, en rendant cette forme d'errance qu'on a tous connue, l'angoisse de rester à Paris l'été, et la triste beauté des voyages seul – parce qu'on ne peut pas la partager avec d'autres. C'est un éloge paradoxal de la sensibilité, un hommage à la personnalité de Delphine, « idiote » au sens de Dostoïevski, et qu'on ne peut que comprendre à défaut de s'identifier totalement à elle. C'est aussi un film sensoriel, où les éléments naturels sont prégnants, et où le français, comme souvent chez Rohmer, est chanté en différents accents, parisien, biarrot, suédois (« pour trouver quelqu'un qui est correct, qui est bien, il ne faut pas montrer ton propre cœur tout de suite »). Je vois maintenant de plus en plus l'influence que tout cela a pu avoir sur le Kechiche de Mektoub, dans cet amour de la parole, mais aussi dans ces rencontres entre inconnus, et en particulier ici dans le point de vue extérieur de Delphine, au moment de cette déchirante scène de drague, qui ressemble à celui d'Amin et/ou de Charlotte. Bref, il faut être vraiment artiste pour construire un personnage aussi beau.
Mektoub, My Love : Canto uno (2018)
3 h 01 min. Sortie : 21 mars 2018 (France). Comédie dramatique, Romance
Film de Abdellatif Kechiche
Paul_ a mis 10/10.
Annotation :
18 janvier
Revu – au cinéma.
Quatrième fois et c'était comme la première. Kechiche fait pâlir la nature, et son film est infini comme le collier d'Ophélie. (S'il y a des films de gourmet, celui-ci est un film de goinfre : on se repaît des dialogues, des visages et des corps à n'en plus finir.) Mais infini aussi au sens de pas terminé : leakez Intermezzo, sortez Due, mais pitié faites quelque chose !
Haut bas fragile (1995)
2 h 49 min. Sortie : 12 avril 1995. Comédie, Drame, Comédie musicale
Film de Jacques Rivette
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
19 janvier
Au cinéma.
Quel film étrange, où cohabitent des moments de grâce, et d'autres beaucoup plus... douteux. Est-ce le résultat de ce scénario improvisé par les acteurs ? En tout cas le film semble hésiter entre l'intrigue sérieuse et la pure fantaisie, et il y a de vraies belles idées narratives, des idées de nouvelles (le film aurait pu s'appeler Certaines femmes) mais Rivette prend toujours un malin plaisir à les tuer dans l'œuf, pour notre plus grande frustration. C'est un film qui ne fait pas sens, sans non plus s'adresser vraiment aux sens, et qui laisse avec une sensation amère d'arbitraire. Mais de ces trois longues heures hasardeuses, je retiendrai une filature amoureuse dans un parc parisien comme chez Rohmer, un tripot lynchien géré par un patron terrifiant répondant au nom d'Alfredo Garcia, et la présence émouvante d'Anna Karina pour un film qui évoque aussi les Godard des années 1980.
La Panthère des neiges (2021)
1 h 32 min. Sortie : 15 décembre 2021. Nature, Animalier
Documentaire de Marie Amiguet et Vincent Munier
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
23 janvier
Au cinéma.
Je suis frustré parce qu'à mes yeux il y aurait eu matière à faire quelque chose de plus marquant. Déjà le photographe remarque au début du film qu'on a pu reprocher à son travail d'être « trop » beau, de ne pas ménager une place au laid, et j'ai hélas vraiment eu cette impression tout au long du film que les plans, tous d'une beauté à couper le souffle, finissaient par s'annuler au contact les uns des autres, et que cette beauté nous devenait au bout du compte presque indifférente. Syndrome documentaire animalier donc, et que le film a la mauvaise idée de vouloir dissimuler avec le commentaire de Tesson, tantôt d'une banalité confondante (les réflexions sur la décrépitude de la civilisation...), tantôt, et c'est pire encore, d'un lyrisme pompeux complètement déplacé (où l'on se compare à Prométhée). On se serait bien passé de la caution « intellectuelle » et marketing, et surtout on aurait volontiers apprécié, non pas une réflexion sur le medium du documentaire – ce serait trop demander – mais au moins un montage qui fasse un peu plus sentir le temps de l'affût. Car finalement ce n'est jamais un apprentissage de la patience pour le spectateur, la panthère est « spoilée » très tôt, les plans sont brefs comme il convient, et le butin de la lente chasse de nos deux hommes nous tombe régulièrement tout cuit. Et même quand l'animal finit par prendre la pose sous l'œil mouillé du photographe, je ne suis pas tellement ému parce qu'en réalité on ne m'a jamais vraiment convié à prendre part aux préparatifs. Impossible de ne pas penser à Marker et à ce qu'il en aurait fait (la place du spectateur donc, la photo comme une chasse, mais aussi le « on ne sait jamais ce qu'on filme »), privilégiant sans doute, j'invente une typologie, des images « pour soi » à ces images « en soi ». Et évidemment tout cela ne vaut pas non plus un bon vieux Herzog.
Punch-Drunk Love - Ivre d'amour (2002)
Punch-Drunk Love
1 h 35 min. Sortie : 22 janvier 2003 (France). Comédie dramatique, Romance
Film de Paul Thomas Anderson
Paul_ a mis 4/10.
Annotation :
25 janvier
Au cinéma.
Le film n'est sûrement pas inintéressant si on fait l'effort de se plonger dans un cerveau autiste, je n'en ai pas eu le courage... En fait j'ai du mal à voir la valeur ajoutée par rapport à une simple comédie, je trouve ça un peu facile, le costume bleu, l'harmonium et le pudding posés là, la musique dissonante, les coups de poings dans le mur, les dialogues uniquement constitués d'insultes pour faire drôle... Le comportement du personnage féminin aussi me paraît complètement irrationnel. Mais jurisprudence After Hours, j'avais déjà remarqué chez moi une insensibilité particulière au traitement par le rire de personnages de losers et/ou de marginaux.
L'Art d'aimer (2011)
1 h 25 min. Sortie : 23 novembre 2011 (France). Comédie romantique
Film de Emmanuel Mouret
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
26 janvier
Il faut sans doute déjà connaître un peu son réalisateur pour apprécier ce film qui autrement pourrait passer pour un vulgaire épisode de Scènes de ménage. On peut alors retrouver avec plaisir ce langage suranné, ces variations musicales, ces itinéraires rohmériens. Comme souvent chez Mouret, il est moins question de l'art d'aimer que de l'art de désirer, puisqu'il postule le sexe comme un préalable à la naissance des sentiments. Mais ce qui est beau c'est que l'amour va venir se nicher dans les interstices, lors de cette magnifique scène où les deux amants (dont l'un est joué par Gaspard Ulliel) après avoir organisé leurs infidélités respectives, y renoncent finalement et attendent dos à dos et en proie à leur terrible imagination que l'un trompe l'autre, ou encore dans cette idée simple, dans le dernier segment, de faire naître un couple dans l'obscurité.
Les Promesses (2021)
1 h 38 min. Sortie : 26 janvier 2022. Drame
Film de Thomas Kruithof
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
29 janvier
Au cinéma.
Toujours cette fâcheuse tendance à vouloir emprunter aux codes du thriller pour faire un film politique, même sur un sujet assez social comme c'est le cas ici. Autrement ça fait du bien de voir un regard sain sur la banlieue, loin des fantasmes actuels, et qui pose des questions intéressantes sur la « vraie » politique, au sens de la gestion de la cité, par exemple celle de savoir si on peut mener à bout un projet sans renoncer à ses idéaux ou à ses ambitions personnelles. Rien de très original non plus, mais le film a le mérite d'être sobre et anti-spectaculaire, à la limite du documentaire parfois, même s'il a aussi le défaut de ses qualités, à savoir l'absence de mise en scène. Le scénariste est co-auteur de Baron Noir et ça se sent, on dirait un épisode de série qui se serait retrouvé projeté en salles.
Toni (1935)
1 h 24 min. Sortie : 22 février 1935 (France). Policier, Drame, Romance
Film de Jean Renoir
Paul_ a mis 8/10.
Annotation :
29 janvier
Le film a très vite quelque chose d'une mythologie, du récit originel, de l'immigration mais aussi de l'amour, avec ses ellipses dévastatrices et ses gros plans sublimes dans cette Provence aux allures d'Arcadie, dont on sentirait presque le parfum des pinèdes, et où tout le monde parle encore le même « boniment », comme le suggère le carton en préambule évoquant Babel. Renoir s'y distingue à nouveau par sa cruauté caractéristique, en nous plaçant du point de vue de ce Toni attachant quoique immoral. C'est donc une tragédie selon Pagnol, mais avec la mise en scène d'un peintre, mon seul petit regret étant que la tragédie me touche peu ici.
Introduction (2021)
Inteurodeoksyeon
1 h 06 min. Sortie : 2 février 2022 (France). Drame
Film de Hong Sang-Soo
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
3 février
Au cinéma.
Le meilleur cinéaste des rêves, avec Buñuel et Lynch ? Il y avait déjà celui de Seule sur la plage la nuit, mais j'ai trouvé celui-ci plus beau encore, jusque dans ses clefs psychanalytiques. Évidemment pas de plan raccord sur un réveil en sursaut, la sueur au front, mais une simple coupe, pour maintenir l'ambiguïté. Et puis la traditionnelle scène de beuverie au soju. On y est bien, tellement bien qu'on s'y assoupit, mais on sait maintenant que ça fait partie de l'expérience. HSS fait toujours son petit bonhomme de chemin, et son cinéma reste précieux parce que le spectateur est constamment invité à y prendre part, en prolongeant par des pointillés les lignes narratives qui lui sont proposées. Son film que je préfère depuis Le Jour d'après.
Vitalina Varela (2019)
2 h 04 min. Sortie : 12 janvier 2022 (France). Drame
Film de Pedro Costa
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
5 février
Au cinéma.
On croirait du Rembrandt animé, chaque plan est une toile de maître : portraits, natures mortes, anamorphoses avec ces grands angles qui, comme chez un Sokourov, transforment les personnages en fantômes. Ce sont même des zombies revenant d'un cimetière dès l'incroyable scène d'ouverture, et j'ai beaucoup aimé cet emprunt de Costa à différents genres, avec le débarquement de Vitalina qu'on dirait tout droit sorti d'un film de science-fiction, ou encore la reconstruction de l'identité du défunt qui ressemble à une enquête policière. Malheureusement le film s'essouffle sur la longueur et semble manquer de fond. Quelque chose me gêne dans les dialogues – ce n'est jamais bon signe – peut-être trop explicatifs, trop redondants par rapport à ce qui est montré. Je ne suis pas touché par le deuil de Vitalina, ou alors je me force à l'être, à l'image de ces plans d'une beauté surréelle mais démonstrative. Pour le dire crûment, on dirait parfois une expo photo. Cependant cela n'enlève en rien au fait que ce film fait partie d'une poignée littéralement intemporels, qui semblent n'appartenir à aucune époque, et que les spectateurs du futur auront bien du mal à resituer.
The Souvenir - Part I (2018)
The Souvenir
1 h 59 min. Sortie : 2 février 2022 (France). Drame, Romance
Film de Joanna Hogg
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
8 février
Au cinéma.
Le scénario brouille d'abord les pistes de manière intrigante, en ne faisant pas un événement de la rencontre et en se permettant quelques ellipses audacieuses, avant que le film ne s'enlise dans une mise en scène d'intérieur finalement beaucoup plus convenue qu'elle voudrait l'être. Les personnages me sont antipathiques – ça m'a fait penser à Phantom Thread, toujours du mal avec les relations toxiques au cinéma – et cette posture arty m'a dérangé. Et puis c'est un cinéma bien morne et qui manque cruellement de chaleur.
The Souvenir - Part II (2021)
The Souvenir: Part II
1 h 48 min. Sortie : 2 février 2022 (France). Drame
Film de Joanna Hogg
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
8 février
Au cinéma.
Même si cette deuxième partie est plus aimable grâce à sa mise en scène moins rigide, elle me paraît surligner, à travers le tournage, ce qui était implicite dans la relation des personnages et qui faisait tout l'intérêt de la première partie. Mis à part le dernier plan intéressant qui sème le doute, l'art semble uniquement envisagé pour sa vertu thérapeutique (à l'image de ce plan assez grossier, pendant le délire visuel et gratuitement cinéphile de la fin, qui voit la réalisatrice tirer sur le fantôme de son amant avec une caméra), dans une perspective que je trouve assez limitée. Et puis, en apprenant brièvement l'histoire de Hogg après le film, je me suis rendu compte que cette double mise en abyme, comparable finalement à une autofiction, m'indifférait pas mal.
Mort sur le Nil (2022)
Death on the Nile
2 h 14 min. Sortie : 9 février 2022 (France). Policier, Drame
Film de Kenneth Branagh
Paul_ a mis 2/10.
Annotation :
11 février
Au cinéma.
Je me dis qu'il faut que je me calme avec le tout-venant des sorties récentes et je vais voir ça. Dégueulis d'effets spéciaux oranges dignes des pires graphismes de jeu vidéo (j'aurais dû me douter avec cette affiche...), jeu catastrophique – pauvre Emma Mackey embarquée dans ce naufrage, loin de ses moues mignonnes de Sex Education – et mise en scène grotesque, cynisme de pacotille qui insulte l'esprit britannique du roman, et surtout seconds rôles inexistants, ce qui est tout de même embêtant pour un whodunit ! J'ai eu la bonne idée, et qui ne m'arrive normalement jamais, de sortir de la salle à la moitié.
Voyage en Italie (1954)
Viaggio in Italia
1 h 25 min. Sortie : 20 décembre 1954 (France). Drame, Romance
Film de Roberto Rossellini
Paul_ a mis 9/10.
Annotation :
13 février
Au cinéma.
Je suis presque surpris d'aimer autant, parce que c'est un cinéma assez sec et qui peut paraître parfois nonchalant et presque brouillon, ce qui explique peut-être les avis contrastés ici. Mais le film m'a surtout ravi après coup, et trois scènes surnageront désormais dans ma mémoire comme des montagnes mythiques : le musée, les ruines et la procession finale. Rossellini, l'air de rien, est en avance sur tout le monde, commence à filmer ce qu'on ne filme pas encore à l'époque, l'ennui existentiel, et annonce dans son analyse moderne du couple le meilleur d'Antonioni ou de Godard (Le Mépris semble être comme un remake de ce film). Les amants ne peuvent plus vivre en vase clos, l'environnement après la guerre influe plus que jamais sur les affects, et la grande Histoire va rendre bien vaine l'histoire de ce petit couple et de leurs mesquineries. Comment être soi, comment trouver sa place dans l'espace et dans le temps ? Homer et Joyce, Rossellini ne choisit pas ses noms au hasard, et la région de Naples, par son incroyable densité culturelle et historique, où les fumées de soufre émanant des volcans sont comme des couches du temps remontant à la surface, va agir comme un mille-feuille, comme un palimpseste révélateur d'une vérité dont nos deux personnages vont finir par accoucher après un travail inconscient. Et ce travail semble en même temps celui du réalisateur lui-même avec son film, dans les conditions de tournage chaotiques que l'on connaît, et qui rappellent la fameuse phrase de Rivette, selon laquelle un film n'est jamais que le documentaire de son propre tournage. Et voilà maintenant que je regrette beaucoup de ne pas avoir eu le courage de me lever les dimanches matins précédents pour assister aux autres séances du cycle Rossellini donné par le Louxor...
Une femme disparaît (1938)
The Lady Vanishes
1 h 36 min. Sortie : 26 mars 1952 (France). Thriller
Film de Alfred Hitchcock
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
17 février
Hitch joue avec le médium filmique en sollicitant la mémoire du spectateur, mélange les genres comme jamais, prophétise la politique, se moque de la morale... Tout est déjà là. Je suis quand même un poil déçu, le film est très ludique dans ses intentions mais plus laborieux dans sa réalisation, et semble démarrer véritablement au bout d'une heure. Mais la paranoïa, les personnages secondaires et la fin, avec ce baiser, sont magnifiques. Dans le même genre et pendant les mêmes années du maître, je crois lui préférer Les 39 Marches que j'avais trouvé encore plus jouissif.
Le Crime de l'Orient-Express (1974)
Murder on the Orient Express
2 h 08 min. Sortie : 16 avril 1975 (France). Policier, Thriller
Film de Sidney Lumet
Paul_ a mis 5/10.
Annotation :
18 février
12 Angry Men and Women. Toujours cette prédilection pour le huis clos et le monologue chez Lumet. Si le casting est évidemment royal, la mise en scène, figée et bavarde, plonge le film dans un rythme soporifique. Albert Finney est marrant deux minutes mais accapare trop la caméra, s'épuise et nous épuise. Comme une vieille odeur de téléfilm.
L.A. Confidential (1997)
2 h 13 min. Sortie : 8 octobre 1997 (France). Policier, Drame, Thriller
Film de Curtis Hanson
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
20 février
Rien de mieux qu'un bon vieux polar des années 1990 pour une chouette catharsis. Beaucoup de sympathie pour celui-ci, entre la reconstitution magnifique, le trio parfait (il y a un vrai plaisir à naviguer entre les trois) et le scénario complexe mais parfaitement lisible. La polarisation bad cops/good cops et l'absence de moments de bravoure dans la mise en scène ne me rendront sans doute pas le film particulièrement mémorable, mais en tout cas il m'a donné envie de lire Ellroy.
Les Rendez-vous d'Anna (1978)
2 h 08 min. Sortie : 8 novembre 1978. Drame
Film de Chantal Akerman
Paul_ a mis 8/10.
Annotation :
21 février
Encore une histoire de fantômes, où les quais déserts des gares ont la puissance évocatrice de paysages apocalyptiques. Le film de Chantal Akerman est d'abord formel, avec ces longs plans fixes dont la symétrie – Wes Anderson n'a rien inventé –, la composition, la perspective sont simplement splendides. Et puis il y a ce jeu bressonien, cette diction d'automate qui semble vouloir nous rappeler qu'un film ce n'est pas la vie, qu'un film sert à filmer la vie à l'extrême, ou en accentuant un de ses aspects, avec un parti pris. Akerman a pris celui de la solitude, et elle montre donc des choses qu'on ne voit pas dans la vie, des conversations impossibles avec des inconnus (parce qu'Anna, en parfaite auditrice, laisse advenir les monologues), un lit que l'on partage nue avec sa mère, un chant impromptu... L'errance d'Anna, de rendez-vous en rendez-vous, ressemble à une triste métaphore de la vie. On dirait aussi parfois l'adaptation d'un roman de Duras. Un grand film, hallucinant de maîtrise et de maturité à tous les niveaux, alors même que Chantal Akerman n'a encore que 28 ans.
La Bête humaine (1938)
1 h 40 min. Sortie : 23 décembre 1938 (France). Policier, Drame
Film de Jean Renoir
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
22 février
Le moins Renoir des Renoir ? Le noir et blanc est certes magnifique, et sublime les scènes de train, comme lors de cette incroyable ouverture sans dialogues. La métaphore de la locomotive, rugissant comme la bête, fonctionne à merveille pour symboliser l'homme aliéné par la machine. Mais c'est comme si le naturalisme littéraire éloignait le film du naturalisme cinématographique qui a donné le meilleur de Renoir. À l'encombrant appareil physiologique de Zola, viennent s'ajouter une musique superflue et des effets trop dramatiques. Simone Simon n'est pas très convaincante (tout comme Renoir lui-même, toujours aussi mauvais acteur). Et on sent que le jeu de l'adaptation rend le scénario incomplet, il manque peut-être une scène pour insister sur le caractère bestial du personnage.
Onoda (2021)
2 h 47 min. Sortie : 21 juillet 2021. Drame, Guerre, Biopic
Film de Arthur Harari
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
23 février
Je suis toujours un peu moins client de ces films basés sur une histoire vraie, où le sujet, parce qu'il n'est jamais banal, prend souvent le dessus sur la façon dont il va être raconté. Le cinéma ne devient plus alors ce monde autonome, il garde un pied dans le réel (sans qu'on soit non plus dans un documentaire qui le prendrait à bras-le-corps), ce qui peut s'avérer un peu décevant. Ceci étant dit, le film est plein d'intentions louables par ailleurs : le traitement anti-spectaculaire de l'action et cette manière de prendre son temps, de faire confiance au spectateur (même si les scènes auraient pu être encore plus étirées à mon goût : j'aurais aimé plus de « petits riens », finalement on est souvent dans de l'utile à la Koh-Lanta). Et à part des mouvements de caméra assez moches, on dirait parfois un film des années 1970, c'est rassurant de savoir qu'un tel cinéma reste possible – même si en l'occurrence le classicisme du film a tendance à virer à l'académisme. En tout cas c'est un beau et courageux projet de tournage qu'a réussi Harari.
Diamant noir (2016)
1 h 55 min. Sortie : 8 juin 2016. Drame, Film noir
Film de Arthur Harari
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
24 février
Le film semble d'abord assez prévisible en sillonnant des terrains (la vengeance familiale, le braquage qui tourne mal) qui nous sont bien connus depuis grosso modo Le Parrain et Un après-midi de chien. Mais en même temps on sent assez vite quelque chose de vénéneux, une tension qui nous happe. C'est comme, si au fur et à mesure qu'il avance, le scénario nous disait « c'est plus compliqué que ça », et le diamant noir du titre va évidemment représenter ce héros fascinant – Niels Schneider est parfait – dont on peine à percer le mystère parce qu'il ne laisse pas passer la lumière, et dont l'action va s'avérer sans cesse diffractée au contact des obstacles qu'il rencontre, comme l'onde dans la pierre. Les personnages changent selon l'angle depuis lequel on les regarde, et même cette famille de riches diamantaires détestable à première vue nous devient presque attachante à la fin. L'intrigue alimente ainsi constamment le spectateur en lui donnant à penser, et c'est un vrai tour de force de proposer des personnages aussi complexes pour un premier film.
Le Hasard (1987)
Przypadek
2 h 02 min. Sortie : 10 janvier 1987 (Pologne). Drame
Film de Krzysztof Kieslowski
Paul_ a mis 6/10.
Annotation :
27 février
J'aurais adoré adorer... Comme pour La Double Vie de Véronique (le seul autre Kieslowski que j'ai vu), la photo est superbe, je trouve cela très intéressant objectivement mais le film me touche peu. Il y a déjà comme une horizontalité, une absence de hiérarchie dramatique entre les scènes, qui complique la tâche du spectateur, habitué aux canons scénaristiques occidentaux, lorsqu'il s'agit de déterminer ce qui est important ou non. Je comprends pourtant cette idée de reproduire la contingence de la vie du héros sur l'expérience du spectateur. Mais l'artifice du concept me rebute un peu aussi, même quand commencent à se dessiner des liens entre les parties, qui ont quelque chose d'émouvant du point de vue de la métempsychose, mais derrière lesquels je vois trop les clins d'œil de l'auteur. Et puis j'ai remarqué de toute manière que ces films dans lesquels les personnages sont privés de libre arbitre me tétanisent un peu.
Le Château ambulant (2004)
Hauru no ugoku shiro
1 h 59 min. Sortie : 12 janvier 2005 (France). Animation, Aventure, Fantasy
Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki
Paul_ a mis 7/10.
Annotation :
28 février
J'emprunte toujours le même chemin avec Miyazaki : d'abord émerveillé par les trouvailles géniales, les incessantes métamorphoses et, en l'occurrence, le fétichisme Belle Époque, puis inévitablement laissé sur le bas-côté par la surenchère dans le fantastique et la résolution finale. Le plaisir de prendre un petit-déjeuner préparé par Calcifer me suffisait amplement.
À l'ouest des rails (2004)
Tie Xi Qu
9 h 11 min. Sortie : 9 juin 2004 (France). Société
Documentaire de Wáng Bīng
Paul_ a mis 9/10.
Annotation :
3 mars
« Filme cet endroit. Bientôt, il n'en restera plus rien. » J'écris cette annotation dans le train, et les images du film se superposent encore aux paysages que je traverse. Mon neveu de 10 ans m'a accompagné pour la dernière heure de Rails : « Est-ce qu'avant il y avait plus d'action ? » Non, pas vraiment. En fait, c'est un peu la même histoire que celle d'Onoda : des gens continuent de travailler, d'essayer de vivre, mais pour rien. Ou pour si peu : pour un air de musique, pour un porno regardé entre collègues, pour une lettre d'amour. Bobo et Whitey, le vieux Du et son fils, à la fois si loin et si proches de nous, sont plus hauts en couleur que tous les personnages de fiction. (Et comme chez Béla Tarr, ces personnages sont souvent filmés de dos, en train de marcher.) De Wang Bing, invisible et mutique comme un extraterrestre, on n'entendra jamais qu'un mot, on ne verra jamais que l'ombre, comme s'il nous disait : comment tenir un quelconque discours, sans risquer de perdre son humilité, face à un réel aussi débordant, aussi dévorant ?