Quentin Tarantino

Annotation :

Scène par scène, le film est assez brillant, évidemment. Chaque dialogue est d'une perversité géniale, chaque parole trouve écho dans un rouage qui se tord au moment où elle est prononcée, et contrairement à ses deux Kill Bill, Tarantino a laissé tomber la vulgarité.

Mais après la fin, que faut-il tirer de cette joute de deux heures et demi tirée entre personnages plus insupportables les uns que les autres ? Il pourrait y avoir Mélanie Laurent mais sa tronche est impayable. Il pourrait y avoir Brad Pitt mais c'est un sadique, et sa bande également. Quant aux nazis, ils pourraient avoir du vice, du trouble : ils sont charmants, élégants, mais Tarantino rappelle à chaque fois que ce sont des nazis lors de leur dernière parole, où ils se trahissent à chaque fois, à coup d'injures, de perte de sang froid. C'est un fait qui est ce qu'il est : il ne peut pas y avoir de bon nazi. Mais le problème de ce film, c'est qu'il n'y a pas de bon personnage tout court.

À quoi bon ? La plus belle scène du film, celle de l'étranglement de Diane Krüger finit elle aussi par poser question : elle n'a plus de logique au sein du ressort du retournement de Landa.

Annotation :

Après une magnifique poignée de scènes extraordinaires, dialoguées avec un talent d'orfèvre, tranchées au rasoir, Tarantino revient à ses démons dans un épilogue de vengeance hyperbolique. Tout y passe, de la violence comme exutoire au sadisme le plus barbare. Tarantino est intelligent, alors, s'il faut se réjouir de la douleur de quelqu'un, autant faut-il que ce soit celle d'un salopard de marchand d'esclaves... Quel niveau !

La vulgarité de tous les plans autour du personnage féminin (le flashback des coups de fouet, le cauchemar absolu) est rédhibitoire également.

Annotation :

Il est plutôt pas mal celui-ci, il est très bien filmé et certains dialogues sont parmi ce que Tarantino a fait de mieux. Le rythme est excellent : rare de noter que pour un film de plus de 150 minutes, on ne s'ennuie jamais.

Mais pourquoi toujours ce mauvais goût lors des exécutions ? Tarantino a vu et adoré Hara-Kiri, les proto-western de Kurosawa, les films de Leone, mais c'est sur ce point-ci que la différence se fait : d'un côté, les maîtres, et de l'autre le puceau qui se régale en cumulant les encarts geeks par pulsion masturbatoire.

Annotation :

Qui pourrait encore douter que Tarantino est anormalement doué ? Personne. Il sait filmer, écrire, réaliser, créer, façonner et faire vivre. Cet énième opus est une nouvelle réjouissance, rigoureusement produite, intelligente et nostalgique, ressuscitant les fantômes glamours et sordides d’une Los Angeles bouillonnante à la fin des années 60. Le tout se tient, est plutôt divertissant, mais pourquoi !? pourquoi conclure sur l’habituelle orgie de violence cathartique, exagérément sanglante et trash ? Tarantino a un stratagème ; il réserve les pires supplices aux grandes ordures de l’Histoire, il massacre Hitler, la Manson Family et les esclavagistes dans une forme de défouloir sadique, rédempteur. Parce qu’il tord l’Histoire, et y rajoute une bonne grosse dose de fun excessif ("ahah t’as vu comme c'est drôle un chien qui mord les couilles de Charles Tex Watson !"), les critiques ne lui tombent pas dessus, les philosophes non plus, sa déontologie reste acceptable : ces salauds l’ont mérité. Le moyen l’est moins : crânes fracassés, torches humaines, sévices inouïs, il ne recule devant rien pour étaler sa science du sanguinolent destroy (et ça dure !). Il y a fort à parier que voir des tronches qui explosent le fait bander.