Rétrospective Lee Chang Dong

Réalisateur coréen de 6 films, Lee Chang Dong propose une carrière sans faute et une étonnante unicité thématique, esthétique dans les films. S'il est courant pour un réalisateur de trouver des points communs au sein de sa filmographie, j'ai été frappé par l'évolution et l'ensemble cohérent que ...

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6 films

créée il y a environ 3 ans · modifiée il y a environ 3 ans
Green Fish
6.5

Green Fish (1997)

Chorok mulkogi

1 h 51 min. Sortie : 7 février 1997 (France). Drame

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 7/10.

Annotation :

Premier film de LCD, Green Fish est trop classique pour être retenu. Toutefois il est annonciateur de tout le reste de la filmographie. Green Fish passe à côté de son potentiel pour proposer une intrigue centrale autour d'un homme qui intègre un gang revue et peu intéressante. LCD n'a pas encore trouvé cet équilibre propre à son cinéma, ses personnages sont filmés avec bien trop de distance pour susciter l'empathie. En revanche, le reste est la, mais relégué au second plan. Tout ce qui aurait pu être développé autour de la famille du protagoniste se passe dans le reste de son cinéma.
Un film sympathique, à réserver seulement aux fans aventureux ou les curieux.

Peppermint Candy
7.3

Peppermint Candy (1999)

Bakha Satang

2 h 09 min. Sortie : 10 août 2016 (France). Drame

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Peppermint Candy sonne comme l'évolution naturelle de Green Fish. L'image est beaucoup plus propre et revêt des tons agréable à l'œil. LCD développe plus en profondeur les thématiques liées à l'ancien régime de Chun Doo-Hwan.
Mais plus que ce portrait personnel sous fond de longue dynamique à l'échelle sociétale, LCD affirme pour la première fois son style de cinéma. Plutôt que de choisir un schéma classique de descente aux enfers, le film s'ouvre sur un suicide et retrace les vingt dernières années de vie de son protagoniste.
LCD forge son style. Film lent et étiré d'une grande densité, il y'aurait énormément de choses à reprendre sur Peppermint Candy, c'est aussi une des particularités du réalisateur, des films d'une grande richesse thématique et narrative qui se reposent sur une multitude d'éléments visuels. Peppermint Candy dresse donc tout plein de parallèles avec des plans bref, des objets qui reviennent selon les époques. Peppermint Candy ne dit rien, il montre et laisse au spectateur seul le choix de comprendre ou il veut être amené.
Si le film a un contexte violent et raconte une histoire tragique, il en ressort une grande poésie par moment. LCD refuse la traditionnelle déchéance, plus le film avance, plus il parvient à ressortir une certaine légèreté, jusqu'au point ou LCD filme une bulle de tendresse coupée du monde.

Oasis
7.6

Oasis (2002)

Oasiseu

2 h 12 min. Sortie : 12 novembre 2003 (France). Drame, Romance

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 9/10.

Annotation :

Oasis reprends le style de fin de Peppermint Candy et est construit entièrement sur des effets de décalage. LCD choisi de raconter une histoire d'amour entre une femme infirme et un homme atteint d'une forme d'autisme non pas pour faire un réquisitoire miséreux contre la vilaine société, mais avant tout pour filmer des scènes poétiques. LCD parvient à faire naître du beau en immergeant son spectateur dans une bulle de tendresse coupée du monde et de sa violence symbolique. Il pousse le principe assez loin avec certains passages oniriques d'une grande beauté une fois mis en contexte.
Si ce procédé de décalage était déjà présent dans Peppermint Candy, il va être à la base de la mise en scène d'Oasis et du reste de ses films.

Secret Sunshine
7.1

Secret Sunshine (2007)

Milyang

2 h 17 min. Sortie : 17 octobre 2007 (France). Drame

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Si Oasis fait naitre de la poésie de ses situations violentes, dans Secret Sunshine, LCD préfère utiliser le décalage entre sa protagoniste et le reste du monde pour susciter le malaise.
Le deuil est un genre très esseulé aujourd'hui. Secret Sunshine se démarque du reste des œuvres qui abordent ce sujet. Dès les premières minutes, LCD présente une femme qui tente d'oublier son chagrin. Il se débarrasse donc de plusieurs choses à raconter pour se concentrer réellement sur l'expérience de ses sentiments. Ainsi donc, Secret Sunshine présente 140 minutes d'errances et d'allers retours en plongeant son spectateur dans les tourmentes de sa protagoniste. Le ton général est très badant, mais comme à son habitude, il n'est jamais question d'un pathos de mauvais goût, malgré le sujet, Secret Sunshine propose la mise en scène très timide et discrète contrairement aux deux autres films précédents.
Secret Sunshine marque une grande évolution formelle dans l'utilisation de l'éclairage. Techniquement très propre avec des couleurs limpides, LCD affirme son esthétique avec l'usage d'un éclairage naturel.

Poetry
7.3

Poetry (2010)

Si

2 h 19 min. Sortie : 25 août 2010 (France). Drame

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Poetry a déjà les allures du film ultime de LCD, tant il est formellement impeccable. Difficile aussi de ne pas voir les emprunts thématiques de Peppermint Candy, le cadre de celui-ci et Secret Sunshine entremêlé, ou bien les procédés de mise en scène d'Oasis.
Le titre laisse présager le film le plus poétique de sa carrière. C'est en effet le cas et ici LCD va repousser une nouvelle fois les effets de décalage qu'il aime tant. Le film parle d'une retraitée qui tente tant bien que mal de se mettre à la poésie, en parallèle des problèmes qu'elle doit résoudre dans sa vie.
Le refus de LCD de faire un film classique joue plus que jamais sur la beauté et les thématiques de celui-ci. Il n'est pas question de faire un film sur la maladie, un film sur le suicide, un film sur des problèmes d'argent....LCD incorpore ces thèmes souvent traités en tant que genre à part entière et se refuse d'en faire le sujet principal du film. Je ne peux pas m'empêcher d'y voir un parallèle avec la protagoniste de son film déconnectée de ces sujets. Poetry est l'une des plus belles invitations à la poésie que j'ai pu voir. L'héroïne du film n'est préoccupée que par l'écriture de son poème, LCD dessine tout le long des contrastes entre la violence symbolique dont elle est victime et son obsession pour la poésie. C'est juste beau, le film fait ressortir de la poésie d'éléments très simple et invite à la contemplation dans un monde pourtant difficile. Jamais LCD n'avait autant immergé son spectateur dans le monde intérieur de son personnage. C'est personnellement mon préféré.

Burning
7.1

Burning (2018)

Beoning

2 h 28 min. Sortie : 29 août 2018 (France). Drame, Thriller, Film noir

Film de Lee Chang-Dong

Dfez a mis 9/10.

Annotation :

Alors la on touche son film ultime. Si Poetry pouvait déjà l'être, Burning pousse son cinéma encore plus loin. Esthétiquement très abouti, chaque plan de Burning semble être travaillé au millimètre près, mais malgré ça, LCD s'émancipe complètement d'une image trop cadrée, mathématique comme l'on peut trouver chez certains réalisateurs (coucou Wes Anderson). Il se dégage sans cesse une atmosphère indescriptible et envoutante tout au long de Burning, rien n'interrompt le rythme du film. Par je ne sais quel tour de magie, LCD, dans chaque scène, plans et dialogues, construit un film sensoriel sans jamais l'être, contemplatif sans jamais l'être, avec une curieuse atmosphère qui suscite à la fois le vertige, le malaise, le raffinement et la sérénité.
Burning est sans aucune surprise dans le prolongement des films de LCD, mais il pousse encore plus loin l'écriture de son personnage principal. S'il partage d'avoir perdu un être cher comme tous les personnages de LCD, ici le ressenti en terme de mise en scène est encore pire. LCD fait vivre une angoisse existentielle forte, à travers la solitude et l'errance perpétuelle de son personnage principal.
Burning est le genre de film qui hante son spectateur. Toutes les certitudes sont remises en question, le film accumule les mystères sans réponses à la fin, les coïncidences sans preuves. Le résultat est encore plus troublant quand on voit à quel point le film est ancré dans une certaine réalité pour certains jeunes en Corée du sud.
Tout est ambigüe dans ce film. LCD donne l'impression de toucher le réel, mais ce réel est vertigineux, imperceptible et angoissant.

Dfez

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