Top 10 Films selon temet-nosce

Annotation :

Il m'a fallu beaucoup de temps de réflexion pour au final me rendre compte que l'œuvre la plus importante et fondatrice de ma cinéphilie et en général de tout mon rapport à l'art est - et de loin ! - Eraserhead.

Ce film, ayant été mon premier contact avec l'univers de David Lynch et donc la porte d'entrée vers tout un pan du cinéma expérimental, m'avait profondément perturbé lors de mon premier visionnage, voire m'avait rebuté. Se bouffer une démarche aussi frontale et radicale dans la gueule à une époque où je n'étais pas éveillé à cette conception de l'art, forcément ça déstabilise et ça laisse perplexe.

Puis à force de découvrir le reste de la filmographie de David Lynch, puis d'autres auteurs qui s'en inspirent et commencer à développer un attrait pour les choses étranges, bizarres et absurdes, j'ai fini par regarder en arrière et me rendre compte qu'en fin de compte, le point de départ réside, je vous le donne en mille, en cet Eraserhead.

Les mois puis les années sont passées sans que je prenne la peine de le revoir, mais l'irradiation du film était sans précédent dans ma cinéphilie. J'avais des flashs du nombre complètement stupide de trucs marquants dans ce film, je revoyais des images de ce bébé cauchemardesque, de la femme du radiateur, de l'improbable coupe de cheveux de Jack Nance, et de manière générale de toute cette ambiance surréaliste proche d'être malsaine.

Restait donc la question de le revoir, puisqu'après tout je n'avais pas tant que ça apprécié mon visionnage alors que dans les faits c'est une œuvre fondatrice pour moi. J'étais même prêt à accepter qu'au final ça ne reste qu'une porte d'entrée et que ma nouvelle culture ait entaché ma fascination pour ce film. Et ben devinez quoi, non seulement la claque s'est avérée décuplée, et surtout TOUT m'a interpellé, fasciné, hypnotisé, et j'en suis ressorti pantois.

Depuis, difficile de trouver une autre œuvre qui a été aussi libératrice dans mon rapport à l'art, une autre œuvre qui m'a à ce point changé et avec laquelle j'ai développé une relation aussi précieuse.

Je lui dois tout.

Et donc voilà, Eraserhead est mon film préféré.

Annotation :

Une séance d'hypnose, voilà comment je résumerais mon expérience de As I Was Moving Ahead... D'appparance c'était un projet qui m'intriguait autant qu'il me rebutait car sa réputation est quasiment divine mais les quelques images que j'avais vues étaient intéressantes mais je me suis dit que ça serait quand même laborieux sur presque 5 heures.

Et je vous le donne en mille, j'ai été hypnotisé devant ce truc sur toute sa durée. Jamais j'ai décroché, jamais mon attention se concentrait sur autre chose, c'était un vrai face à face avec ce film. Et j'y ai laissé une part de moi.

Car Jonas Mekas ne raconte pas sa vie, il raconte LA vie. Son autobiographie est un prétexte pour parler de l'humain et de livrer une ôde à l'existence aussi belle qu'émouvante. C'est simple, je n'ai jamais autant pleuré devant un film que devant la dernière demi-heure de ce truc. Ça m'a refilé un vertige immense qui a puisé tellement profondément dans mon être qu'à tout bien penser je ne peux que le faire accéder à mon podium de tous les temps. Et pas troisième, je vous prie.

Annotation :

S'il faut citer un autre film qui a été fondamentalement important dans ma vie, c'est bien celui-là.

Alors oui c'est un choix évident. Mais je me rappelle l'avoir regardé ado à une époque où le cinéma, boarf c'est sympa mais c'était loin d'être une passion. Et donc oui je me suis mangé une claque qui m'a fait comprendre qu'un film peut transmettre des émotions totalement indicibles qui dépassent l'entendement et qui m'ont fait repenser mon humanité et ma place dans ce monde et surtout dans cet univers. J'ai été touché par la grâce, simplement.

Encore aujourd'hui je considère ce film comme le point de départ de ma cinéphilie, celui duquel je suis tombé de fascination en premier et qui m'a ouvert les portes à une galaxie d'œuvres. Le pire, c'est qu'en des années d'exploration du cinéma j'ai quand même eu du mal à me faire transcender à nouveau comme 2001 a su le faire, même après plusieurs visionnages.

Donc oui, un choix classique. Mais un choix logique compte tenu de la place centrale que ce film occupe dans ma vie.

Annotation :

À l'instar d'Eraserhead, Paranoid Park est un film qui m'a laissé perplexe - voire froid comme un glaçon - au premier contact. Puis suite aux coups de pieds d'un.e ami.e fan du film j'ai fini par me procurer le Blu-ray et lui donner une seconde chance, et là ça a été la révélation.

C'est simple, je ne trouve pas un seul autre film qui a réussi à aussi bien faire ressentir la spirale d'émotions indicibles qui guide l'âge le plus difficile : l'adolescence.

Depuis je l'ai encore revu et je me plais à le faire découvrir à d'autres connaissances, quand bien même le film est assez difficile d'accès. En ce qui me concerne c'est ma claque définitive en termes de Gus Van Sant qui a toute ma sympathie mais qui n'aura réellement su me transcender qu'avec cet incroyable chef-d'œuvre.

Et donc petite dédicace à Garance sans qui je n'aurais probablement jamais réhabilité ce film. Comme quoi une vision n'est pas toujours suffisante, surtout pour des films aussi particuliers et riches que ce Paranoid Park.

Annotation :

Certains trouveront de quoi redire sur le ton du film, trop froid, trop mécanique, manque de vie, tout ça. Certes, mais de une : est-ce qu'adapter un ton plus jouasse aurait collé à l'atmosphère et aux personnages ? Et de deux quand même c'est difficile de faire la fine bouche pour si peu quand à côté ce film a tant à offrir.

Du scénario impeccablement ficelé aux interprétations en or (Bourvil pour son dernier passage à l'écran brille de mille feux) en passant par cette mise en scène CHI-RUR-GI-CALE de monsieur Jean-Pierre Melville, il y a toutes les raisons du monde pour s'émerveiller devant un tel spectacle.

Le revoir est à chaque fois l'occasion de me reprendre la claque ultime. Plus qu'un chef-d'œuvre, pour moi ce Cercle Rouge incarne l'expression d'un art total et entier issu d'une vision unique en son genre.

Annotation :

De tous les artistes qui ont un jour eu l'idée de faire du cinéma, David Cronenberg est probablement celui dont la vision m'a le plus parlée parmi toutes. Il y a dans son approche du cinéma quelque chose de purement sensoriel, qui avance à l'instinct plus qu'à la raison. Lui-même le dit, il n'écrit pas ses films selon une structure pensée au préalable mais il avance sans trop savoir où en ne se concentrant que sur l'effet qu'il souhaite procurer au spectateur à un stade indéfini du film.

En cela, Vidéodrome en est juste le summum. En plus de porter un regard très lucide sur notre rapport à la violence et aux images, le film s'engage dès les premières secondes sur un terrain abstrait et cérébral, dont il en explorera toutes les limites sans jamais trop en faire.

Ainsi pour moi on est sur une proposition à la fois très dépouillée mais entière en tant que telle, une expérience obscure et profondément pénétrante qui me laisse sans voix à chaque fois. Le film peut en plus se targuer d'avoir des effets pratiques encore à couper le souffle aujourd'hui, mais cela est le cas de tous les autres films du maître.