Un éventail de sentiments.
« Amours à mort », voilà un titre fort, mais est-il pour autant accrocheur ?
Oui, sans aucun doute, puisqu'il est intrigant et c'est bien là son atout majeur car, quoi de mieux pour un livre que de donner envie de le lire ? Voilà donc déjà un bon départ.
Va-t-on y parler d'amour ? Probablement. Mais de quel genre ? Cela reste un mystère à la seule lecture de la couverture. Dès lors, pour le savoir, il ne nous reste plus qu'à y plonger le nez.
Dans ce recueil de nouvelles, il y a une réelle volonté de la part de l'auteur de décrire les différentes façons d'aimer et ce, en les mettant en scène. Ces mises en scène sont très réalistes; on est loin des romans à l'eau de rose pour adolescentes. Non, ici les personnages font la cuisine, du vélo, partent en vacances ... et tout autour de ces scènes de la vie quotidienne, on voit se greffer des sentiments forts et détaillés.
Le choix d'écrire sous la forme d'un recueil de nouvelles est sans nul doute un choix judicieux car il nous permet de passer, par cette cassure nette, d'un sentiment d'amour particulier à un autre pour que chacun de ceux-ci ne soit pas noyé dans une histoire trop longue et ennuyeuse. A chaque fois, on a droit à une sorte de mise à nu du personnage car ce qu'il ressent, ce qu'il pense, mais aussi ce qu'il fait, est décrit de manière forte et qui interpelle.
Même un petit sentiment qui pourrait paraître insignifiant peut avoir sa place et son histoire. On peut, par exemple, penser à l'histoire du cycliste qui, à force d'aimer regarder les filles dans la rue, comprend qu'une seule peut finir par attirer réellement son attention, lui qui ne fait du vélo que pour rouler derrière les filles qu'il trouve jolies se surprend lui-même finalement à n'en vouloir suivre plus qu'une.
L'auteur, Dominique Maes, né à Bruxelles en 1957, est un artiste éclectique aux multiples talents. En effet, il l'a démontré en tant que dessinateur pour enfants et pour adultes. Il a étudié à l'Académie des Beaux-arts de Bruxelles, puis à l'Institut Saint-Luc. C'est un auteur surprenant d'inventivité, qui aime être là où l'on ne l'attend pas. En effet, il va passer du statut d'auteur pour enfant, par l'élaboration d'albums, à celui d'écrivain pour adulte averti.
« Éventail de sentiments », mon titre d'article, je l'ai choisi car, selon moi, il résume à lui seul ce qu'il ressort du bouquin de Dominique Maes. En effet, c'est bien à un éventail de sentiments qu'on a droit tout au long du livre. Tout comme les éventails d'échantillons de couleurs que l'on peut trouver dans le rayon peintures des magasins de bricolage. La lecture du recueil nous fait passer d'une couleur à l'autre, d'un type de sentiment à l'autre, d'un état à un autre. Cela commence avec celui qui espère que l'amour, avec ces différences d'âge, peut fonctionner et continue avec ceux qui, eux, l'on trouvé, et ce depuis bien longtemps, en passant par l'amour blessé, perdu, retrouvé ... On passe donc en revue toutes les couleurs de l'amour de manière provocante, crue et parfois violente avec toujours ce sentiment de jusqu'au-boutisme mais l'écriture est aussi bien souvent émouvante.
« Elle sent la marée montante de ses larmes. Son regard s'embue. Sa bouche tremble. Ils n'osent rien se dire mais leurs bras s'ouvrent. Sans plus réfléchir, ils s'accrochent l'un à l'autre. »
Si je devais définir ce livre en un mot, je dirais de lui qu'il est CAPTIVANT, voir ENIVRANT. Pourquoi ? Tout simplement parce que, au début de chacune des nouvelles, je me demandais avec impatience quels sentiments y seront dépeints et j'avais hâte d'arriver au bout pour en connaître la fin. Et lorsque j'y arrivais, je voulais tout de suite découvrir la suivante et ainsi de suite. Treize nouvelles égale treize histoires égale treize univers totalement différents que j'ai aimé découvrir. Si le but de ce livre était de dépeindre de manière innovante et captivante toute la complexité de certains sentiments, alors, ce but est atteint.
Marie-Sophie Van Snick
« Amours à mort » de Dominique Maes
Éditions Murmures des soirs
2012, Esneux, Belgique
238 pages