Atlas des esclavages : De l'Antiquité à nos jours
Fiche technique
Auteur :
Marcel DorignyGenre : Culture & sociétéDate de publication (pays d'origine) : Parution France : 2 mai 2013Éditeur :
AutrementISBN : 9782746734975, 9782746734975Résumé : Extrait de l'introduction Les esclavages : définitions et représentations Une pratique universelle. L'esclavage est la négation de l'être humain pour le réduire à l'état de force de travail brut. Il n'est attaché ni à une civilisation, ni à un espace géographique, ni à une époque donnée : il a été l'une des formes les plus constantes, au fil de la longue histoire des civilisations, de la domination absolue d'hommes par d'autres hommes. L'esclavage, défini en termes juridiques, fait de l'individu la chose d'un maître qui dispose souverainement de son corps, de son travail et de ses biens. Il peut être vendu, loué, cédé à bail, à l'instar d'un animal. Au moment où cette définition juridique se codifie avec le droit romain, l'institution existe depuis plusieurs millénaires. Pour certains, elle se confond avec la structure familiale : «La propriété, dont la première forme, le germe, réside dans la famille où la femme et les enfants sont les esclaves de l'homme» (Karl Marx, L'Idéologie allemande). Pour d'autres, elle est conditionnée par la gestion des ressources dans les sociétés dites primitives : l'esclavage se développe dans les sociétés où la main-d'oeuvre n'est pas disponible volontairement. Dans le cadre d'une économie où les hommes travaillent pour subsister avec des moyens modestes, à la hauteur de leurs capacités physiques, où l'accès aux terres cultivables est largement ouvert à tous les membres d'une communauté, où chacun peut travailler pour lui-même, il n'y a pas de groupe individualisé de travailleurs. Il faut recourir à des contraintes extra-économiques, dont l'esclavage, pour mettre en valeur l'espace. Mais la plupart des analystes s'accordent sur le fait que la violence armée est globalement à l'origine de la mise en servitude. La guerre est grande pourvoyeuse d'esclaves : les esclaves pris dans les raids, pour les galères, dans la course, plus tard pour la traite atlantique, sont légion. Dans la péninsule Ibérique, au Moyen Âge, l'expression «esclave captif» est une tautologie. L'esclave est généralement un étranger. Dans la Rome des origines, le même mot désigne l'esclave et l'étranger. Le terme servus viendrait de servare, sens que l'on trouve encore dans «conserver» (garder en vie). Chez les anciens Hébreux, on ne peut réduire en esclavage que les personnes extérieures à la communauté : «Les serviteurs et servantes que tu auras viendront des nations qui vous entourent ; c'est d'elles que vous pourrez acquérir serviteurs et servantes. De plus, vous pourrez en acquérir parmi les enfants des hôtes qui résident chez vous, ainsi que de leurs familles qui vivent avec vous, et qu'ils ont engendrés sur votre sol : ils seront votre propriété et vous les laisserez en héritage à vos enfants après vous pour qu'ils les possèdent à titre de propriété perpétuelle. Vous les aurez pour esclaves, mais sur vos frères, les enfants d'Israël, nul n'exercera un pouvoir arbitraire» (Lévitique, XXV, 44-46). Esclavage et servage. Le terme servus est remplacé en Occident, autour de l'an mil, par le terme sclavus, qui vient du droit germanique. Il désigne plus particulièrement les populations des régions spécifiquement slaves ; mais son usage est étendu aux Arabes, aux Turcs ou aux Grecs. Le terme servus est de plus en plus réservé aux servi casati, d'anciens captifs que l'Église puis les aristocrates trouvaient plus profitable de doter d'une maison et d'un lopin de terre que de les prendre entièrement à leur charge comme les esclaves. C'est l'origine des serfs, tenanciers non libres mais dont le statut juridique ne se confond pas avec celui de l'esclave antique ; pas plus que celui des hilotes de Sparte. À côté des captifs, il faut également mentionner les asservis pour endettement, dans un rapport où toutes les ressources économiques sont bloquées et la main-d'oeuvre insuffisante. Dans certaines sociétés de pénurie, existait également la coutume des expositions d'enfants qui, s'ils ne mouraient pas, devenaient la propriété de qui les découvrait. Coexistent ainsi des non-libres absolus (esclaves stricto sensu), des libres absolus (les maîtres ou hommes libres) et des catégories intermédiaires où la libre disposition de la personne peut très bien coexister avec une condition de dépendance économique, ou un statut social inférieur à celui de l'esclave. Tel est le cas des colons antiques, des serfs médiévaux, des peones de l'Amérique hispanique, etc. Un mot de l'auteur L'esclavage est la négation de l'être humain pour le réduire à l'état de force de travail brute, de marchandise déshumanisée. Tel est le point de départ de cet Atlas, qui propose une vaste synthèse graphique et cartographique de l'histoire plurimillénaire de l'esclavage, depuis les sociétés antiques jusqu'à nos jours. Le coeur de l'Atlas est cependant centré sur l'esclavage colonial pratiqué par les puissances européennes pour mettre en valeur leurs colonies des Nouveaux Mondes, entre la fin du 15e siècle et le milieu du 19e siècle. La traite atlantique est mesurée et cartographiée, les sociétés esclavagistes sont présentées à travers la démographie, le travail, la mortalité ; les formes multiples de résistances à la servitude sont mises en valeur, ainsi que l'essor des mouvements abolitionnistes à partir du 18e siècle. Les processus de «sortie de l'esclavage», inaugurés sous la Révolution française et poursuivis jusqu'aux années 1880 (Cuba, Brésil) font l'objet de cartographies spécifiques. Enfin, l'existence de l'esclavage au début du 21e siècle, sous des formes variées, fait l'objet de la dernière partie de cet Atlas.