Régis Debray conseille son fils qui hésite entre les filières scientifique, littéraire et économique proposées par le lycée. Bizarrement, aucune mention n’est faite des filières techniques et professionnelles. Après tout, ce serait changer de classe sociale. La France du XXIe siècle est-elle une nation (la question pourrait s’arrêter là) où l’on change de classe sociale ? Ou du moins, dans la hiérarchie qu’on en fait, a-t-on vu des familles de classes supérieures vouloir dégrader leur position sociale ? Mais peu importe, en réalité : le livre, court, a déjà beaucoup à dire. Comme toujours avec l’auteur, les pages sont denses, et les idées se succèdent rapidement, condensées dans des formules chocs qui témoignent d’une réelle virtuosité dans la maîtrise de la langue française. Je le dis, la plume à l’origine de cet essai est l’une des plus remarquables
de l’époque.
Sur le fond, l’auteur, déployant les potentialités de chaque filière, y trouve un prétexte pour commenter ce que furent sa vie, la France (le monde), et le lien entre les deux. L’auteur est dur avec l’époque, raillant tant le matérialisme cupide de dirigeants politiques dénués de rêve, que l’idéalisme déconnecté d’intellectuels trop dépourvus d’humilité pour ne pas être dogmatiques. Finalement, le mieux resterait la filière scientifique, seule à dispenser des savoirs solidement établis, loin de la volatilité des théories littéraires ou politiques. Mais peut-être l’auteur, qui, de son aveu, ne connaît pas la filière, en a-t-il une vision faussement positive, l’herbe étant toujours plus verte ailleurs.
Un bel essai donc, court et dense, mais qui, je crois, n’apporte pas grand-chose de nouveau par rapport à ce qui a été publié avant par l’auteur.