Waleed Al-Husseini revient sur son expérience de prisonnier d’opinion en Cisjordanie pour cause de propagation de l’athéisme sur internet. Ses interrogations, y compris avec leur part de naïveté hors-sol, rappellent parfois celle de notre adolescence. Là où les sentiments sont partagés, c’est sur la démarcation ou non-démarcation entre islam et islamisme. En gros: un islam « modéré » est-il possible ou l’islam porte-t-il en lui une intolérance conquérante et totalitaire ? Comme Vaneigem, je crois par exemple que l’islam, dans toutes ses formes, est un « fantoche viril » utilisé pour « exorciser la menace que la femme en voie d’émancipation fait planer » mais pour quelqu’un de ma génération, qui a connu les quartiers populaires sans aucun voile à l’horizon, ce fantoche viril ne semblait pas dans les années 80 bien plus terrible que celui, catholique, qui planait sur certaines copines d’origine portugaise. On a vu monter ici un courant politique qui était inexistant, ou très marginal, en tout cas non perçu. La première fois que quelqu’un a demandé à une de mes meilleures copines pourquoi elle ne portait pas le voile, c’était un étudiant marocain à la fac, un fils-à-papa de l’exportation d’agrumes. Cela avait semblé alors à tou-te-s une ingérence hallucinante et obscène. On a connu ici, je crois, une époque sans islamisme. Du coup on se dit, avec une toute autre expérience que celle de Waleed, que l’islamisme n’est pas intrinsèquement inévitable, ce que certaines lectures de son livre pourraient peut-être conclure.