Claude Cahun, l'antimuse

Résumé : « Écrivain errant » selon Pierre Mac Orlan, artiste polyvalente, musicienne, révolutionnaire, surréaliste atypique [sic], traductrice, journaliste, résistante insolite pendant la Seconde Guerre mondiale, en un mot inclassable, Claude Cahun sort des voies toutes tracées et offre une œuvre photographique déconcertante - élaborée dans l'intimité - où elle se met en scène avec l'aide de sa compagne de toute une vie, Suzanne Malherbe. Ensemble, elles forment un couple mythique - autant que celui de Gertrude Stein et Alice Toklas, Marguerite Yourcenar et Grace Frick, Virginia Woolf et Vita Sackville-West, en leur temps - mais le plus souvent occulté. Anticonformisme foncier, un rien esthète, et individualisme - par perpétuel souci de différenciation et « manie de l'exception » - animent les deux femmes. Cette œuvre « à quatre mains » donne la primauté à l'imaginaire et tente de mettre en application la résolution des antinomies prônée par le surréalisme. « Toute création est création de soi », écrit Claude Cahun, rebelle à toute identification et aux yeux de laquelle « les étiquettes sont méprisables ». Méconnue de son vivant, longtemps et injustement oubliée des livres sur le surréalisme, les avant-gardes des années 1920 et 1930 ou la Résistance, Claude Cahun est peu à peu sortie de l'ombre à partir des années 1990 grâce aux travaux de François Leperlier, à des articles, des livres, des expositions. Cette nouvelle approche s'appuie notamment sur ses propres textes et sur les très longues lettres envoyées à ses amis. « Ne voyager qu'à la proue de soi-même », tel était le désir de cette « cavalière désarçonnée » selon le mot d'André Breton. « Il nous faut des miracles inédits, clamait-elle, un merveilleux au goût du jour. »