Par Bernard Quiriny
Monologue labyrinthique de plus de quatre cents pages, Clémence Picot, sixième roman de Régis Jauffret, nous fait suivre de l’intérieur l’activité cérébrale de plus en plus déréglée d’une narratrice qui évolue vers la démence violente. Le premier paragraphe donne le la : "Je m’appelle Clémence Picot. Je viens d’avoir trente ans. J’habite Boulevard Saint-Michel. Je travaille dans une clinique où je suis infirmière de nuit. Mes parents sont morts, je n’ai d’autre famille qu’un vieil oncle dans le Marais". Avec une indifférence totale, Clémence Picot nous raconte la vacuité de son existence -enthousiasmante et monotone comme une chambre froide-, nous parle de son éducation par des parents imprégnés jusqu’aux os du culte de l’épargne, de la rigueur quotidienne (on les croirait sortis d’une utopie de Cabet), certains passages suscitant d’ailleurs moins le sourire ambigu que la révolte pure et simple. Clémence Picot a une voisine d’immeuble, Christine, célibataire et mère d’un fils de dix ans, Etienne. Projetant sur eux les idées macabres qui la hantent, en faisant les pièces maîtresses de l’univers fictif qu’elle se construit, elle va s’acharner, les persécuter insidieusement, les détruire en même temps qu’elle-même s’enfonce de plus en plus loin dans le dédale obscur de son psychisme malade. (...)
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