Cobrastar
5.4
Cobrastar

livre de Thomas Bois (2021)

Bon. Quand j'ai lu une critique élogieuse de ce livre dans la newsletter de ma librairie habituelle, le comparant à Tarantino, j'ai eu un doute. Ça flairait le piège, mais en même temps ça titillait suffisamment ma curiosité pour vouloir lui donner une chance.

Et après l'avoir lu, j'imagine que cette comparaison vient du fait que Tarantino a un cinéma bourré de références, ce qui est aussi le cas dans Cobrastar, la subtilité en moins. Parce que là franchement j'ai l'impression qu'on me colle chaque référence sous le nez en me disant "eh, t'as vu, t'as vu, c'est une ref de pop culture !". Oui bon, on a compris que l'auteur a vu New-York 97 et joué à Mass Effect, pas la peine de le crier sur tous les toits.

S'il n'y avait que ça, cela dit, ça m'agacerait mais ça irait. Non, en fait, il y a trois défauts majeurs à ce livre. Et je ne comprends pas comment les éditions du Tripode ont pu ne pas les remarquer.

1) Les descriptions (ou plutôt leur absence).
Je commence par le plus gros problème de ce livre, à savoir qu'il n'y a (quasi) aucune description. Je ne suis pas très fan des descriptions à rallonge à la mode au XIXe, genre Balzac qui passe des pages à nous raconter à quoi ressemble le salon des Grandet. Il me faut juste quelques mots, et je me fais très vite une image mentale. Sauf que là, dans Cobrastar, il n'y a pas ces quelques mots : il n'y a rien. Jamais de description, ou alors des trucs hallucinants genre un personnage féminin décrit par cette seule phrase : "Fille de la plus riche capitaine nomade de Tartarus, Cynnamon est dotée d'un physique à réveiller la libido d'un panda et d'une intelligence redoutable." Écrire ça en 2021, il fallait oser. Ça revient presque à écrire "ouah elle est trop bonne et en plus elle est pas conne"...

Deux autres exemples : un bébé monstre est attaqué par d'autres monstres. On ne sait ni à quoi ressemblent les monstres, ni même leur nombre approximatif. Du coup j'étais incapable de visualiser la scène.

Et le dernier exemple est le meilleur : on apprend 14 pages avant la fin que deux des principaux protagonistes ont la peau rouge et sont Végiens. Avant ça on savait juste qu'un des deux est costaud et que l'autre est une petite femme fofolle.

2) "personne ne parle comme ça". Un défaut classique dans la littérature : écrire des dialogues qui sonnent faux. Alors, je modère tout de suite : la plupart des dialogues sonnent justes. L'auteur utilise même un argot mi-stéphanois mi-personnel qui donne une couleur certaine aux échanges. Mais pour au moins deux personnages, les dialogues sonnent faux : Tiny (la petite fofolle dont je parlais au-dessus, et qui est un véritable cliché ambulant, parlant avec des amis imaginaires ayant des noms de flatulences et dessinant des licornes et du rose partout) et Doc Death (de loin le plus agaçant car il commence et termine toutes ses phrases par "P'tain ! F'chier !" Mais qui parle comme ça ?!).

3) la culture terrienne (enfin, franco-américaine) est partout. Alors qu'on apprend dès le début que la Terre est une planète ne faisant pas partie de la civilisation galactique et dont l'accès est interdit ! Alors pourquoi est-ce qu'on a des paroles de chansons anglo-saxonnes à presque chaque chapitre, un duo de tueurs fans de disco, des humains à tous les coins de rue et même une référence directe à la Roue de la fortune ?! Vous me direz : c'est juste pour le fun. Et je suis d'accord, en fait. Sauf que dans ce cas il aurait suffi d'établir d'entrée de jeu que la Terre fait partie de la civilisation galactique, et le tour était joué.

Bref. Contrairement à ce que cette logorrhée pourrait laisser croire, je n'ai pas détesté ce livre. Simplement, ça me fait l'impression d'un gros gâchis. L'auteur écrit bien, il a son univers et son vocabulaire, mais je ne comprends pas comment un éditeur a pu laisser passer tous ces écueils, qui auraient mérité un retravail.

Enfin, peut-être que je ne suis simplement pas le public visé. Et, soyons honnête, ce genre de publication n'est pas si fréquente parmi les auteurs français, donc laissez-lui sa chance, peut-être.

Sheon
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le 12 sept. 2023

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