Jean Teulé, bien qu’extrêmement documenté sur Charles Baudelaire et son époque, a commis une autobiographie alternative où l’homme est scruté au delà du poète. L’exercice est à double tranchant. En effet, connaître les racines de l’homme de lettres et se rendre compte de ses excès dans la drogue et l’alcool, de ses moments extravagants et de sa débauche, apporte-t-il vraiment quelque chose? Quelque part, Charles Baudelaire n’est plus jugé par la qualité certaine de sa prose mais sur un parcours de vie chaotique où il a multiplié les extravagances.Même si Crénom, Baudelaire a le mérite de contextualiser certains poèmes de l’auteur ( de l’Albatros à l’Horloge), sa lecture est plutôt laborieuse et indigeste.Ce qui me paraît ressortir du livre de Jean Teulé, c’est la relation particulière que Baudelaire avait avec sa mère et comment elle a inconsciemment déteint sur ses rapports avec ses maîtresses. C’est aussi comment il a écrit les Fleurs du mal dans la plus grande précarité, fuyant les dettes et les créanciers. Le décorum des amis romantiques ( avec Flaubert et Gautier entre autres) n’étant qu’une toile de fond pour amplifier les problèmes de Baudelaire avec l’argent( dont il manquait toujours) et la société à laquelle il s’est opposé jusqu’à son dernier souffle. Entre les lignes, on conçoit aussi que l’absence de figure paternelle chez Baudelaire et le fait d’être mal vu par un beau-père autoritaire et sans véritable empathie et profondeur, n’avaient dès le départ rien fait pour arranger les choses.Il y a de la matière dans le livre de Jean Teulé mais l’immersion brutale dans l’existence flinguée de Charles Baudelaire est quand même une déambulation assez nauséeuse. Selon moi, lire la poésie de Baudelaire reste une expérience littéraire à part entière et connaître sa vie personnelle un état de fait plutôt secondaire à dire vrai.Cette volonté contemporaine de vouloir éplucher à tout prix les vies privées d’hommes ou femmes illustres n’étant qu’une déclinaison supplémentaire des journaux people ou d’investigation.