Et nos yeux doivent accueillir l'aurore par GuixLaLibraire
C’est fou comme Sigrid Nunez - qui pourtant fait le récit de la vie de Georgette et Ann d’une façon très factuelle la plupart du temps - arrive à nous rendre les événements très vivants, grâce à un nombre de détails incroyables, beaucoup de ressenti et de sentiments, et un mode de narration non linéaire vraiment original. George regrette certaines choses mais raconte son histoire sans amertume, sans mélo, sans tomber dans la caricature ou l’outrance. C’est un récit fictif qui me semble (j’ai bien dit me semble, je n’ai pas vécu cette époque autrement qu’à travers des films, documentaires et livres) coller fidèlement à une certaine réalité, décrivant avec exactitude deux types de vie de cette époque, celle de George, à la recherche d’une certaine banalité, d’une facilité, d’un confort modeste mais contentant (bien que sa vie fut loin d’être banale) le rêve américain en somme…, et celle d’Ann, femme martyr, dont la vie ne lui a jamais véritablement appartenue et ce volontairement, dévouée aux autres, s’oubliant soi-même, pleine d’opinions et d’idéaux parfois justes et quelquefois trop extrêmes, une militante hors du commun, un être qui marquera les esprits et restera plus un symbole aux yeux du monde qu’une femme de chair et de sang.
Non, on ne peut pas dire que ce roman soit léger, bien qu’il ne soit pas difficile à lire ; l’écriture de Nunez est fluide, agréable, entraînante, bien que jamais réellement gaie ou drôle. C’est un roman puissant, au ton changeant comme les époques qu’il passe successivement, un très bon roman que je conseille pour les amateurs de cette période, des années 60 à 80 aux Etats-Unis, aux amateurs de récits de vie et de femmes plus particulièrement, pour ma part je l’ai refermé comblée, heureuse d’avoir découvert cette auteur talentueuse, que je vous conseille sans hésitation.
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