Dans le ventre de la bête
Bien sûr la forme peut rebuter... Saviano écrit en "éclaté", multiplie les points de vue et les chiffres, les lieux et les époques, se met en scène et s'interroge, comme Norman Mailer a pu le faire dans "Le Combat du Siècle"... Parfois c'est indigeste. Mais quand le souffle est là, sur les chapitres mexicains et russes en particulier, ce n'est pas une brise.
Et puis Extra Pure dépasse les enjeux de style, comme Gomorra avant lui. C'est le fond qui frappe, cette réalité cachée qu'il éclaire le temps de 450 pages fiévreuses. L'affirmation qu'il n'y a pas d'économie légale sans narcotrafic, que c'est le second qui finance la première, que nos sociétés reposent sur un socle de mort.
La coco, l'héro, l'extorsion, la prostitution, la corruption, le blanchiment et la fraude fiscale (la banque HSBC est -tiens tiens- citée à plusieurs reprises)... les vieilles recettes, en définitive, mais sauce vingt-et-unième siècle : Des mafias internationales, gérées comme des entreprises boursières, parfaits parasites de l'humanité, charriant chaque jour des PIB entiers et se recréant sans cesse. Le nouveau mythe de Sisyphe.