Willem Elsschot, de son vrai nom Alfons-Jozef de Ridder né et mort à Anvers (1882-1960) est un écrivain flamand majeur. Il a peu publié, avait fondé une agence de publicité qu'il dirigeait, travail qu'il n'aimait pas mais qui le faisait vivre. Fromage paraît en 1933, vingt ans après son premier livre.
Ceci étant dit, ce Fromage est un pur régal, et pourtant, je ne suis pas très amateur d'Edam, je préfère un bon fromage français qui pue, qui coule et qui se révèle encore plus sur une bonne tartine d'un bon pain. Ces remarques culinaires passées, Fromage est avant tout un constat du changement de la société des années 30. Frans Laarmans est le parfait crédule, celui à qui l'on fait croire qu'il peut et doit réussir socialement et qu'il vivra mieux ainsi, sera considéré et entrera dans la belle société.
Ce court roman est profond en même temps que léger : avec beaucoup d'humour, il raconte les péripéties de Frans auxquelles le lecteur compatit et rit. On peut prendre cette histoire comme une simple pochade, mais ce serait dommage, Willen Elsschot observe et décrit les faiblesses humaines, n'en tire pas de jugement ni d'analyse, il laisse ce travail éventuel au lecteur. Satire du monde des affaires absolument pas datée, et pourtant elle a presque un siècle. Je dois même dire que j'avais commencé ma lecture avant de prendre des renseignements sur l'auteur et que les premières pages ne m'ont pas alerté sur le fait que ce livre était une réédition. C'est un peu plus loin que je me suis posé la question, mais plutôt à cause -ou grâce- à l'écriture de l'auteur, à son style. Classique, évidemment mais assez moderne -la traduction est récente et c'est Xavier Hanotte (dont l'excellent Du vent, m'a réjoui) qui s'y est collé. Humour noir, conte ou fable, odyssée fromagère (j'emprunte l'expression au magazine Elle), tous ces termes siéent parfaitement à ce roman. L'un de ceux que l'on garde précieusement, un classique de la littérature flamande que Le castor astral a la bonne idée de rééditer dans sa collection Galaxie.