Hérétiques par François Gautier

Ce fut drôle, intéressant mais drôle. Le style n'est pas toujours agréable, un peu lourd (lorsqu'il fait 5 comparaisons par idée on se demande si c'est toujours pertinent, surtout quand il reproche à G. B. Shaw de faire la même chose... mais ce ne sont pas les contradictions qui manquent dans ce livre), toutefois cela n'empêche pas une lecture fluide.
C'est sur le fond qu'il y a beaucoup de choses à dire. Dans un des premiers articles (car c'est un assemblage d'articles, choisis par Chesterton lui-même), il dit que c'est la vision d'ensemble d'une personne qui compte, et non ses idées sur tel ou tel point de débat. Or sa vision à lui est très chimérique et mythologique. Il capable de très puissantes fulgurances (notamment sur la place que la société accorde aux riches et à la richesse) mais il appuie sa pensée sur de nombreuses imprécisions et erreurs et j'ai l'impression qu'il veut se faire une image fantasmée de la société européenne et du christianisme (alors que le christianisme est déjà très beau !) quitte à utiliser des biais de confirmation.
Voici quelques exemples pour illustrer mon propos. Dans un article sur l'anthropologie, il dit qu'une vérité ne doit pas être filtré par l'esprit alors qu'il reprochait quelques lignes plus hautes à l'anthropologue de s'effacer le temps de son enquête (il dit « cesser d'être un homme »). De plus, lors de son enquête, un anthropologue ne cesse pas d'être un homme, il doit simplement réduire son ego, sa particularité. Et en parlant de particularité, il reproche aux anthropologues de voyager pour décrire d'autres cultures alors qu'on pourrait tout savoir en étudiant le comportement des hommes de Londres. Mais c'est justement le travail de l'anthropologue de décrire des particularités pour mieux comprendre l'universel (ce qui nous amène ensuite à partager sa conclusion que, quel que soit leur culture, les hommes partagent de nombreuses choses).
Pour conclure, Chesterton devrait accorder plus d'attention aux raisonnements et au travail qui vient en amont d'une conclusion (chose révélatrice, il dit dans un de ses articles que les hommes sont là pour avoir des réponse) car cela tombe parfois juste mais aussi souvent dans l'erreur.