Un premier roman découverte!
Hasard des lectures, me voilà de nouveaux à aborder un roman où les personnages principaux font pour la première fois connaissance dans un cimetière (J'ai lu auparavant "Le mec de la tombe d'à coté" de Katarina Mazetti )!
Lieu, à priori, incongru pour lier une relation sentimentale, celui de Passy, (16ème arrondissement de Paris) sert néanmoins de cadre à la rencontre de Daniel Debaecker et Christine Stretter. Un jour venteux de septembre, il aide la jeune femme à allumer sa cigarette blonde, action qui l'emmène des années plus tard à la retrouver de façon régulière dans des hôtels parisiens où dans des établissements régionaux du même type. Au hasard de ses voyages en tant que brocanteur/ antiquaire, Damiel a découvert la véritable chambre qui hante la jeune femme: celle de l'Hôtel Lausanne à Casablanca (Maroc). Prix du premier roman en 2008, éditée au format poche par les éditions 10/18, cette œuvre de Thierry Dancourt nous immerge dans une ambiance bercée par la chanson de Christophe: "Les Paradis perdus". Une chanson, remise au goût du jour récemment au travers le film de "Quand J'étais chanteur" (2006) le film de Xavier Giannoli, avec Gérard Depardieu et Cécile de France, et que le chanteur Raphaël (fan de Daniel Bevilacqua, le vrai nom de Christophe) a intégré à son répertoire de scène (tout comme "Je l'ai pas touché"), qui illustre parfaitement l'atmosphère désuète et désabusée de ce récit que l'on peut rapprocher également du courant de la Nouvelle Vague (Le cinéma de Truffaut, de Godard issu des années 50). Tout du long de ce court roman, Christine Stratter se révèle une sorte d'icône noire et blanche (La couverture de Guillaume Petit fait son effet!) autour de laquelle gravite le narrateur (Daniel), son père, collectionneur de mappemondes et Antoine, son mari, cinéaste dont le premier film pourrait être une sorte de documentaire autobiographique sur son épouse. Les différents protagonistes ne se parlent pas vraiment, c'est particulièrement vrai entre la gente masculine et la "fragile"Christine dont elle est incontestablement la Muse. La femme étouffe dans l'atmosphère pesante de l'appartement qu'elle partage avec les deux derniers. Le père veuf et fortement attaché à sa fille ne supporte pas les habitudes mondaines de son gendre. L'écrivain adopte le ton adéquate, choisissant d'illustrer le non dit et la pudeur caractérisant les rapports humains de l'époque. Daniel et Christine sont manifestement amants mais cet aspect de leur relation est occulté. Il émaille son récit de scènes drôles, imprégnées d'une certaine tristesse. La propension de l'héroïne à collectionner les "Livres sur les villes"; le story-board loufoque du film d'Antoine en sont quelques exemples. Tout est suggéré plutôt que véritablement explicité, un procédé qui n'est pas sans rappeler la aussi l'interprétation subjective d'une photographie et qui termine de rattacher le texte à un travail artistique, teinté d'intellectualisme. Un exercice qui n'est pas forcément à la portée de tous et qui amène à penser que si en ce qui me concerne j'ai apprécié ce roman, ce ne sera pas le cas d'autres à qui les références qui pourront y voir une histoire manquant cruellement de chaleur et d'actions! Difficile en revanche de trouver à redire quand à l'écriture! En ce qui me concerne j'ai apprécié ce nostalgique voyage et je ne doute pas que je me laisserai tenter par le second roman de Thierry Dancourt, "Jardin d'hiver", qui vient de sortir aux éditions de la Table ronde, et dont le synopsis paraît très proche de celui de "Hôtel de Lausanne" que je vous conseille de prendre le temps de découvrir.