L’auteur du best-seller Shibumi nous livre un western violent au suspens implacable et aux personnages parfaitement construits.
A la toute fin du XIXème siècle, la petite ville de Twenty-Mile survit tant bien que mal. La seule activité économique de la région, une mine d’argent à laquelle on accède par une voie de chemin de fer creusée à même la roche, dessert chaque weekend son flot de mineurs venus faire la fête. La quinzaine d’habitants de Twenty-Mile, de l’aubergiste à l’épicier en passant par le barbier et les prostituées, attend chaque fin de semaine avec impatience. Rien ne semble déranger cette routine. Pourtant arrive un jour un jeune étranger, Matthew, qui cherche à tout prix à s’intégrer à la paisible mécanique. Mais le danger vient de plus loin, lorsque débarquent trois hommes échappés de prison…
Trevanian, auteur aussi talentueux que mystérieux, campe dans ce western toutes les figures archétypales véhiculées par les films et les livres du genre. S’appuyant sur une histoire vraie et un manuscrit qu’on lui a confié, Trevanian cherche à faire « un roman qui serait fermement ancré dans les conventions du western, mais qui traiterait de questions plus vastes et plus contemporaines : la fin d’un siècle, la fin d’un rêve qui définissait, mais aussi limitait les hommes américains… ». A partir de ces faits, Trevanian déroule une histoire au suspens implacable servie par des personnages bien délimités. Matthew, le jeune nouveau de Twenty-Mile, est orphelin et cherche absolument du travail, inspirée par les lectures du Ringo Kid. Lieder, échappé de prison, est la figure même du Mal : un psychopathe qui s’appuie sur un passé douloureux pour justifier ses abominables actes, s’excusant après chaque crime commis. Il y a aussi les prostituées (la vieille, la Noire et la Chinoise), le tenancier du bordel, la famille immigrée de Norvège, le vétéran de la guerre de Sécession, etc. Avec son art du portrait et des dialogues, Trevanian construit un western au suspens crescendo où chaque coup de feu semble être une résolution au mal qui gangrène la ville.
« Toute la racaille et toute la lie du vieux monde déferlent sur l’Amérique pour se gaver des richesses produites par la sueur de mes ancêtres, alors pourquoi les Irlandais auraient pas le droit de se joindre au festin ? Plus on est de fous, plus on rit, voilà ce que je pense ! Allez-y, plongez votre groin dans l’auge ! (…) Vous avez entendu parler de la statue de la Liberté, Professeur Murphy ? Elle se dresse à l’entrée du port de New York, tel un phare guidant la pourriture du monde venue bâfrer la générosité de notre beau pays ! Et pourquoi pas, hein ? Plein nos rues pavées d’or ! Vous direz ce que vous voulez des nègres, ils sont tout de même pas aussi fourbes que les immigrants. C’est pas leur faute s’ils sont ici, à traîner, à nous voler et à violer nos femmes. »