Qu’il est délicat de chroniquer une telle lecture.
Parce qu’il ne s’agit pas d’une fiction, mais bien de l’histoire de Lacy M. Johnson. Chaque lecteur percevra et vivra donc cette lecture en fonction de son vécu personnel, et, également, de son état d’esprit à l’instant T.


Un récit romancé, sans romance, sans nuance, sans fioriture.
Juste son histoire. Les faits tels qu’ils se sont déroulés.
Un écrit à l’état brut.


La poésie du texte est précisément dans l’absence totale d’intention d’enjoliver ou, au contraire, de noircir les faits.
Elle se raconte, elle nous raconte, sans chercher à avoir notre aval, ni, surtout, notre pitié.
Ça s’est passé. Elle l’a vécu. Elle le dit, sans essayer d’amoindrir le choc ou d’appuyer sur le rendu.
Ses mots à elle, posés sur ses douleurs propres.
Ses mots sur ses maux...


Exercice cathartique ? Peut-être.
Le meilleur moyen de sortir de l’enfer n’est-il pas d’en ouvrir les portes en grand ?
L’offrir à tous, pour s’en libérer soi-même.
Mais sans jamais se victimiser.


Attention, victime, elle l’a été, le sera toujours un peu, par conséquent.
Mais de pitié ou de compassion, elle n’en réclame aucune.
D’où, peut-être, ce langage presque brutal, ces énoncés parfois cliniques. Il est difficile de mettre de la distance avec nos douleurs, les raconter c’est déjà beaucoup. Si en plus il faut les triturer dans tous les sens pour qu’elles soient moins effrayantes, elles n’en sortiraient que plus lancinantes encore.
Montrer l’hématome, mais sans appuyer dessus.


Raconter la blessure, c’est toujours la revivre un peu. Mais parfois ça peut aussi aider à en calmer la brûlure.
Je ne suis pas encore morte est le récit d’une souffrance physique et psychologique intense, infligée par l’autre.
Comme trop de victimes en subissent chaque jour.
Alors il est nécessaire d’en parler, pour les expurger, pour les faire connaître, pour alerter sur leur existence.
Tout mettre en mots pour toutes celles qui ne le peuvent pas.
Ou qui ne le peuvent plus...


Lire ce livre c’est comme écouter l’auteure. C’est se placer face à elle, prendre ses douleurs et ses cicatrices comme elles viennent.
L’écouter elle, pour les entendre toutes.
Parce qu’il le faut.

annesophiebooks
9
Écrit par

Créée

le 29 avr. 2021

Critique lue 76 fois

annesophiebooks

Écrit par

Critique lue 76 fois

Du même critique

Les enfants sont rois
annesophiebooks
10

Roman d'utilité publique.

Attention, ce roman est édifiant et hautement addictif ! Avec « Les Enfants sont Rois » Delphine de Vigan nous propose une lecture qui parlera à tous. Parce que ce qu’elle nous narre, c’est notre...

le 30 mars 2021

12 j'aime

Trois
annesophiebooks
10

Delicatesse et profondeur

Trois, c’est le roman de l’amitié, de sa force et de ses failles ; celui des relations humaines, dans ce qu’elles ont de plus beau et de plus sombre ; celui des secrets, de leur nécessité et leurs...

le 3 avr. 2021

8 j'aime

2

Vox
annesophiebooks
9

Absolument génial.

Ce roman devrait beaucoup faire parler de lui. Pour moi en tout ça a été un énorme coup de cœur. Jean est une scientifique spécialisée dans les troubles du langage. Mais elle qui a tant étudié pour...

le 1 avr. 2019

7 j'aime