Jeanne, mère de Jacqueline de Romilly était une femme formidable.
Maintenant que la phase purement technique du résumé est terminée, passons à ce qui relève du subjectif: la critique de Jeanne, le livre (la femme étant maintenant hors-sujet). Avertissement de rigueur: votre serviteur n’a jamais lu de livre de l’auteur ou de sa vaillante maman. Pourquoi cette précision est-elle capitale? Rappelez vous le dernier mariage auquel vous avez assisté. Il y a de grandes chances pour que vous ayez eu à subir le rituel désormais inévitable du powerpoint.
Pour les luddites, voici une petite description de ce fléau des temps modernes. Il s’agit d’une suite de photos illustrant un certain nombre de situations plus ou moins honteuses accompagnées de commentaires de la bande de copains responsable de l’oeuvre. Si vous ne connaissez que de loin les intéressés, Il est probable que vous ayez trouvé le résultat un peu moyen. Les images sont plates, et les commentaires frôlent le cliché. La séquence n’est intéressante que pour les personnes qui ont un lien direct avec le sujet de la présentation. Pour les autres, elle n’apporte pas grand chose.
Jeanne est un hommage personnel d’une fille à sa mère. Le livre a été du vivant de Jacqueline de Romilly réservé à ses proches, et cette décision était parfaitement logique. Le manque total et assumé de recul, la constance avec laquelle les compliments sont adressés, la répétition des descriptions, tout cela aide les proches à raviver le souvenir de la disparue, mais n’apporte rien aux autres. L’hommage est magnifique. L’écriture est sensible, et parvient à conserver un certain rythme malgré le peu de choses à dire. Comme un powerpoint, le récit prend sont départ en s’appuyant sur quelques photos. la progression chronologique permet à l’auteur d’abandonner ce médium et de n’utiliser par la suite que ses propre souvenirs. Il y a quelque chose d’intéressant dans ce travail de mémoire, coloré par les sentiments de l’auteur. Malheureusement, ce thème est très peu développé; ce n’est pas le but du livre. Le but est de maintenir un être cher en vie, et tant pis pour les autres.
Un autre point noir vient grandement gêner la lecture. Jeanne est une femme qui a vécu dans un certain confort tout au long de sa vie. Son univers (et c’est encore plus vrai pour sa fille) était celui des lettres et des planches. Quand on voit avec quel mépris sont traitées les amies qui vont finalement passer leur vie à “traire les vaches”, avec quel distance l’auteur décrit ces individus à l’esprit frustre et simple, on ressent un certain agacement. Le livre parle d’atrocité pendant la seconde guerre mondiale quand le couple mère/fille se voit contraint de partager un logement un peu trop étroit. Tout au long du livre sont distillés des indices qui vous montrent que vous n’êtes pas du même milieu. Difficile d’adhérer à la thèse de l’auteur quand elle affirme que Jeanne est la définition du tragique.
L’élément le plus pertinent de Jeanne reste la photographie de la couverture. Avec un mélange subtil de désuet et d'impertinence, elle suffit à donner une certaine idée du personnage.