May Duignan, jeune irlandaise native d’Edenmore a choisi de quitter sa famille et de tenter sa chance aux Etats-Unis. En cette fin de XIXème siècle (1890), ils sont nombreux à faire le trajet qui les amène vers ce qui leur semble être une terre promise. Quels sont les rêves de la toute jeune May en faisant ce saut en avant ? Qu’espère-t-elle de cette nouvelle vie ?
Ce que fuit May c’est l’extrême pauvreté de son village natale et de sa nombreuse famille. Ce qu’elle attend, c’est un autre destin, peut-être quelque chose de plus grand. Mais pour s’en sortir dans ce nouveau monde, May fera comme beaucoup de femmes seules : elle se prostituera. De mauvaises rencontres en obstacles divers, elle passera par les cases de voleuse, braqueuse, danseuse, prisonnière et écrivain pour coucher ses mémoires sur le papier.
Cette biographie, richement documentée, mais qui laisse aussi une grande part à l’imagination de l’auteure, laisse un sentiment mitigé. Pas par la qualité de l’écriture ni par celle du travail effectué par Nuala O’Faolain qui sont l’une et l’autre plutôt à saluer, mais par le portrait qui est ici dressé.
Car May n’a rien d’une héroïne flamboyante. Si son destin est exceptionnel c’est aussi l’histoire d’une femme pour qui la vie n’a pas été tendre et qui a dû lutter pied à pied pour conserver sa liberté. Une liberté chèrement acquise et finalement toute relative puisqu’elle s’est bien souvent retrouvée sous la coupe d’hommes qui l’ont utilisée et qu’elle a même carrément été emprisonnée dans des conditions effroyables.
On ne peut s’empêcher de ressentir plus de compassion que d’admiration pour cette femme dont la vie, si elle est traversée de quelques moments fulgurants, reste surtout une sorte de longue fuite en avant voire de descente aux enfers. Si elle a eu l’occasion de voyager (Le Caire, Paris, Londres...), les conditions de ces voyages sont le plus souvent loin d’être idylliques et c’est par exemple surtout la prison qu’elle découvrira en France. On ne peut non plus s’empêcher de ressentir l’extrême solitude dans laquelle May se retrouve le plus souvent, elle qui n’eut quasiment jamais de domicile à elle.
May n’est pas Bonnie Parker ou Mata Hari. Elle nous paraît subir plus qu’elle ne décide de vivre cette vie qui est loin d’être facile pour une femme seule et exilée. Au-delà de l’histoire de Chicago May c’est aussi une page d’histoire que nous raconte Nuala O’Faolain, celle d’un siècle nouveau dans un pays en construction, celle de l’Irlande (dont l’auteure est aussi originaire) sous la coupe anglaise et en pleine quête d’indépendance et celle de femmes qui, comme May, ont dû lutter quotidiennement.