L'étau du mal par Aely Nah
Natalie, atteinte de dégénérescence rétinienne profite des derniers moments de vision pour s'adonner à sa passion, la photographie. Jusqu'à ce qu'une crise surprise et plus forte que les autres ne la laisse dans le noir le plus complet. Elle garde cependant la tête haute devant le monde même si parfois seule chez elle le désespoir la saisit.
Liam MC Kenzie est un flic qui a vécu, morflé tant professionnellement que personnellement mais qui continue à donner tout ce qu'il a pour que les familles des victimes voient un jour que justice est faite. Sorti aussi d'un passé d'alcoolique, il tient le coup et son palmarès d'affaires résolues en fait une célébrité au sein de sa brigade. Flic et divorcé de père en fils, il se consacre entièrement à son boulot et cette fois-ci encore il compte bien relever le défi de l'enquête en cours et envoyer le coupable derrière les barreaux.
De prime abord, rien ne les relie. Rien jusqu'à ce fameux soir où Natalie est victime d'une agression à son domicile. Agression qui ressemble à celle sur laquelle enquête Mac mais qui a pour Natalie une finalité moindre que pour la précédente victime. Car elle va s'en sortir et c'est ce qui va les faire se rencontrer.
Ils sont tous deux des personnages blessés et pourtant malgré un début fracassant un lien invisible semble s'être tissé entre eux.
C'est comme s'ils sont l'un l'autre capables de voir leur vraie personnalité derrière la façade. Et pour eux deux qui dissimulent leur faiblesse à la face du monde ce face à face irréel et pourtant incisif les prend au dépourvu, les humanise et les déstabilise aussi.
Le livre à peine entamé j'aime cette relation complexe qui débute entre nos deux protagonistes. Il y a des quiproquo dès le départ qui les font partir sur de mauvaises bases.
Lui l'agent spécial professionnel semble oublier toute logique lorsqu'elle est dans les parages. Pour une simple photo il est troublé car il semble voir la passion qu'elle cache derrière l'objectif de son appareil.
Elle, qui croit que la photographie et donc ses passions sont finies, entrevoit dans la présence de Liam des désirs nouveaux de reprendre sa vie en main.
Cette découverte amenée rapidement dans le scénario aurait pu être jugée trop rapide et pourtant elle met ainsi en place une ambiance chaude et tendue qui va tout à fait avec l'enquête elle-même.
Les relations ainsi dévoilées entre les différents protagonistes, principaux ou secondaires sont une bouffée d'air frais dans la noirceur de l'enquête.
On les découvre tous avec leurs forces et leurs faiblesses et cela nous les rend attachants et amicaux.
Le métier de flic est difficile, beaucoup de scènes nous le prouvent pourtant ces hommes et ces femmes se battent chaque jour pour trouver en eux un rai de lumière afin de garder le sourire, l'humour ou l'amour pour continuer à avancer.
Nos héros vont évoluer au fil de l'enquête, se découvrir eux-mêmes mais aussi apprendre que faire confiance aux autres n'est pas QUE synonyme de douleur ou seulement de travail. La confiance peut aussi exister autrement.
Et lorsqu'au hasard des chapitres nous passons du "côté sombre de la Force", la rencontre avec le tueur et ses motivations est,elle aussi, intéressante. Car l'auteure réussit à nous le montrer victime et coupable à la fois.
Ancien détenu, il a découvert la foi en prison. D'autres éléments allant dans ce sens l'ont mené vers une conception particulière de Dieu, du pardon ou du péché.
Nous n'avons pas envie de lui trouver d'excuses mais plutôt de blâmer ces prédicateurs manipulateurs qui ont d'une manière ou d'une autre mis en lui ces pensées obtues qui l'ont amené à la suite des événements. Il est constamment obnubiler par cette idée de péché et les sentiments de culpabilité qui l'assaillent à ses pensées sont contrebalancés par cette petite voix divine qui le pousse vers ce qu'il semble être la rédemption.
C'est donc un personnage complexe là encore que nous côtoyons à notre plus grand plaisir car ses réactions semblent imprévisibles et le suspens reste ainsi omniprésent sur ses prochains actes. Car malgré certaines décisions prises dans un sens ou dans l'autre il y a toujours ce côté schizophrène entre Dieu et Diable qui nous tiendra en haleine.
L'auteure nous dépeint une image particulièrement cynique de cette Amérique puritaine par devant et corrompue par derrière.
Les actes jugés punissables ou haïssables dans le cadre de la Bible et de Dieu sont ici presque excusables et divins pour la protection de Son Royaume.
La corruption et la noirceur n'est semble-t-il pas l'apanage des bandits. Car certains semblent penser que de se jouer de la loi dans un but dit "louable" les amende aux yeux de Dieu et des hommes.
Ce sont les dangers d'un fanatisme mis au service de criminels que nous retrouvons dans ce roman.
Et cependant il s'agit aussi de la lutte d'autres hommes et femmes pour cette même justice, pour sa reconnaissance et son respect. Mais aussi une bataille contre l'adversité, le handicap, ou tout simplement de droit à vivre comme on l'entend.
Ce roman est à lui seul un thriller haletant , une leçon de vie et de courage et une sombre image de la décadence de notre société.