La vision d'Elena Silves par Nina in the rain
Et nous voilà en train de recommencer, comme d'habitude, la biblio d'un auteur. Bon, cela dit, c'est vite fait, un seul roman de Nicholas Shakespeare avait été traduit avant Héritage. Ça facilite les choses, c'est sûr. Pour qu'il y aie tout de même une goutte de piment, La Vision d'Elena Silves est épuisé, mais on le trouve facilement sur internet en occasion à des prix défiant toute concurrence. Du coup, aussitôt pensé, aussitôt fait, je commande mon bouquin après avoir vérifié sur Place des Libraires que plus personne ne l'avait en stock. C'est devenu un réflexe et ça me permet de faire livrer par exemple des livres par courrier à des amis pour des anniversaires sans passer par Amazon : je suis en vacances dans le Sud-Ouest dans un coin sans librairie accessible à pieds et où mon seul chauffeur est la personne à qui je veux faire le cadeau, je commande le livre sur le site d'Ombres Blanches, à Toulouse. Livraison en 48h, offerte à partir de 25 euros de commande... Mes sous vont dans la poche d'une vraie librairie et je bénéficie d'un service de vente par correspondance. Quand on en arrive à ce point-là (vérification sur Place des libraires du libraire qui me l'enverra le plus rapidement, commande en ligne, paiement sécurisé, envoi rapide) je ne vois plus du tout l'intérêt de commander sur Amazon ou Fnac.com.
Bref, le but du message était de parler du bouquin, pas de l'économie du livre sur Internet. La Vision d'Elena Silves est un roman de jeunesse. Il est paru en 1998 chez Albin Michel et je pense être en mesure de comprendre pourquoi il a fait un flop. D'abord, la traduction est catastrophique. Les phrases sont bien plus lourdes que dans Héritage et tout n'est pas du à l'inexpérience de l'auteur : quand on voit les contresens et les erreurs ridicules faites dans la traduction des parties en espagnol, on prend peur pour le reste du texte. On ajoutera à cela une myriade de fautes d'orthographe, de grammaire et de conjugaison qui me font penser d'abord que les traitements de texte ont bien évolué depuis 20 ans, mais qu'en plus la fabrication n'était à l'époque pas des plus soigneuses chez Albin Michel. Je ne peux pas faire de reproche sur la couverture, après tout la mode c'est la mode, mais je n'en pense pas moins, comme vous pouvez vous l'imaginer. Une fois tapé sur l'éditeur, c'est sur notre poulain qu'il va falloir... non, pas taper, mais euuuh... effleurer de la main, peut-être ? Franchement, c'est un texte qui aurait mérité plus de maturité. L'histoire est bonne, intéressante, mais on sent les ficelles et elles sont énormes. Certains passages sont superbes, mais beaucoup tombent à plat et la volonté d'imiter les grands écrivains sud-américains est parfois presque pathétique. Elle a d'ailleurs tout à fait disparu de son écriture habituelle, ce qui montre qu'il a été bien conseillé.
La Vision d'Elena Silves a malheureusement aussi vieilli. Un lecteur d'aujourd'hui, peu au fait des mouvements révolutionnaires d'Amérique du Sud, ne comprendra pas forcément toutes les allusions au Sentier Lumineux ni le contexte exact dans lequel se déroule le roman. L'auteur n'explique pas ce qui à l'époque semble évident (le texte est écrit en 1989) mais, aujourd'hui, un jeune lecteur n'aura pas les clés nécessaires à la compréhension de l'intrigue. Le fantasme de la belle et du guérillero laisse donc place à une histoire d'amour qui, si elle n'est pas banale dans son déroulement, semble moins exotique de nos jours.
Ce n'est pas un roman indispensable, mais que cela ne nous empêche pas de continuer notre quête pour une traduction française des romans de Shakespeare !