Très bon basique, et même un peu plus que cela, pour aborder la littérature de Lovecraft en une dizaine de chapitres. Pour ma part, il se trouve que j'avais déjà lu un ouvrage bien plus conséquent chez ActuSF sur le même sujet, donc j'y ai perdu un peu en engouement. Il n'empêche que si, pour le coup, cette lecture relevait plus de la révision pour moi, j'y ai déniché quelques informations, par-ci par-là, qui m'étaient encore inconnues.
Christophe Thill a concocté un guide efficace, qui couvre tous les sujets essentiels, de la biographie de Lovecraft aux "extensions", littéraires comme autres (cinéma, bande dessinée, musique, jeux de rôles et jeux vidéo), en passant par l’analyse rapide d'un corpus choisi de vingt fictions lovecraftiennes (on peut regretter l'absence du Cauchemar d'Innsmouth, bon), mais aussi de dix autres textes moins connus : essais, poèmes, "révisions" (textes écrits en collaboration avec d'autres auteurs, ici en très grande partie par H.P.L. lui-même). L'idée même d'avoir inséré dans le corpus ces derniers textes souvent méconnus, escamotés par les nouvelles, bien plus célèbres, montre que Christophe Thill ne s'est pas contenté d'effleurer son sujet.
Il s’est également attaqué aux fameux clichés, qui, malgré les années et les études qui se sont multipliées, perdurent encore, ou bien au contraire, s'est attaché à confirmer des faits, comme le racisme indéniable de Lovecraft. Surtout, il a pris soin de démonter en quoi le fantastique de Lovecraft était spécifique - expliquant clairement en quoi le fantastique lovecraftien mérite son nom d’horreur cosmique.
Là où je suis moins emballée par le livre, c'est lorsque Christphe Thill fait preuve d'un peu trop de complaisance avec ses amis de Bragelonne, du Bélial', etc. J'ai trouvé un peu gros qu'il ait reproché d'entrée aux éditions Robert Laffont, qui avaient tout de même produit un énorme boulot en éditant une première intégrale de Lovecraft en français, d'avoir réuni les textes sous des catégories certes discutables ("Mythe de Cthulhu", entre autres) au lieu d'avoir proposé une présentation chronologique, alors que Bragelonne, très récemment, a commis exactement la même erreur, à une époque où ça n'est plus tellement excusable. Mais bon, apparemment, quand Bragelonne refait les même conneries que les autres éditeurs, ça ne pose aucun problème. Pas de critique non plus des traductions récentes de David Camus, qui, malgré un travail méticuleux, s'est un peu lâché sur l'aspect actualisation de la langue, alors que les autres traducteurs ne relevant pas de la triade Bragelonne et compagnie en prennent pour leur grade. Mais le pire, pour moi, c'est d'avoir fait de la publicité gratuite pour un livre que je considère comme une bouse éditée il y a fort peu de temps par Le Bélial', et qui surfe sans vergogne sur la mode Lovecraft sans se préoccuper de qualité littéraire.
Ah oui, et il y a ce glossaire à la fin qui ne sert à rien ou presque et qui est d'un ennui total.
Reste un véritable guide, qui mérite son nom, qui servira aux néophytes, sans doute aucun, mais aussi aux amateurs un peu plus renseignés, ou encore à ceux qui, comme moi, veulent réviser leur Lovecraft vite fait sans relire des centaines de pages ou aller chercher à droite çà gauche des infos qu'ils auraient oubliées. C'est très bien documenté (et c'est peut-être là la qualité première du livre, mais Christophe Thill n’est pas n'importe qui), très bien présenté, concis mais précis, ça donne de découvrir ou de redécouvrir Lovecraft, et de réfléchir à un certain nombre de sujets abordés dans l'ouvrage. Donc, pas d'hésitation : malgré ses quelques défauts, lisez-le.