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Sema Kilickaya (Éditions In Octavo)
Lire Le royaume sans racines, de Sema Kilickaya, c’est aller à la rencontre de l’Autre. Dans ce cas précis, il s’agit de la communauté turque, immigrée en Haute-Marne. La France, un Eldorado pour tous ces hommes, ces femmes, ces familles, venus chercher, au prix de douloureux sacrifices, des conditions de vie plus clémentes.
Née en Turquie, à la frontière syrienne, Sema se base sur son expérience d’enfant puis d’adolescente immigrée pour s’interroger, à travers son roman, sur ce rapport si intime qui existe entre la Langue et l’Identité : le Verbe qui permet d’être. Être Soi, rester soi avec sa propre culture, sa propre langue et rencontrer l’Autre, s’ouvrir à lui pour en fin de compte s’intégrer, et faire sienne une société au départ étrangère tout en conservant sa propre identité. Être digne, aussi.
Le roman de Sema Kilickaya ne cesse de nous interpeller sur le thème si important du « savoir vivre ensemble ». On accompagne ces personnages, on tremble parfois avec eux, pour eux, on s’émeut. La petite fille qui, du fait de l’école, devient la référence du groupe, de la famille, parce qu’elle comprend la langue … le mal du pays … le bonheur d’y repartir pendant des vacances durement gagnées … Sema nous embarque pour un vrai voyage, un peu dérangeant parfois (l’Eldorado n’en est pas toujours un) et dépaysant aussi. Son œuvre dégage une réelle chaleur humaine et comme pour son premier roman Le chant des tourterelles, elle sait faire chanter sa plume si caractéristique, une plume ronde et généreuse. Lire Sema Kilickaya, c’est sentir le soleil et les parfums de l’Orient, l’écriture enchanteresse mais aussi terriblement juste.
Et surtout, c’est toujours une leçon de vie particulièrement bienvenue en ces temps tourmentés où l’intolérance semble chaque jour faire davantage son lit dans notre société. D’ailleurs, La Chancellerie des universités de Paris ne s’y est pas trompée, qui lui a décerné cette année son très beau prix Seligmann, prix contre le racisme et l’intolérance. C’est à la Sorbonne qu’elle s’est vu remettre ce prix prestigieux.
Une distinction absolument méritée.
Chère Sema Kilickaya, soyez remerciée pour cette œuvre nécessaire qui ne peut qu’enrichir celui qui la lit.
Christelle Angano
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le 19 mars 2015

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