Je me souviens avoir lu ce bouquin avec circonspection dans un premier temps, puis en enthousiasme à mesure que j'y progressais. On a peine à croire que l'attirance pour les bords de mer soit si récent, et qu'elle ait pu être entachée d'un tel discrédit au XVIIIè siècle.
En retraçant la naissance d'un désir, concomitant de l'émergence d'une nouvelle façon de voir la nature - et, plus justement, de la voir _enfin_ -, Corbin dessine l'émergence d'un trait de mentalité contemporain, le goût pour les fronts de mer et la zone indéfinie entre les lignes haute et basse des marées inlassables : l'estran.
C'est passionnant, parfois roboratif mais dans l'ensemble écrit de façon alerte et précise ; et le lecteur, peu à peu, se forge une image de ce qu'ont bien pu être, en leur commencement, les curistes et les touristes avides de pittoresque (scènes dignes d'être peintes) aux bords des rivages d'Europe, et dont je connais bien la version Atlantique pour y avoir, mais dans mon enfance, connu le vif des tempêtes et la mélancolie des mortes eaux.