Pour ceux qui prendraient cette série en cours, je rappelle, d'une part qu'ils peuvent se reporter à mes recensions concernant les deux tomes précédents (Un été à Pont-Aven et Étrange printemps aux Glénan) et d'autre part qu'elle est écrite par un auteur allemand tombé amoureux de la Bretagne, qui use donc d'un pseudonyme et qui est traduit par Amélie de Maupeou.
En fait quand je dis que JL Bannalec est tombé amoureux de la Bretagne, c'est un euphémisme tant parfois son emballement pour cette région et particulièrement le Golfe du Morbihan frôle la brochure publicitaire. J'aime beaucoup également la Bretagne, je me sens même y appartenir -même si je vis à Nantes et que nous ne sommes toujours pas raccrochés à la Bretagne, mais dans une espèce de région bizarre, hétéroclite, les Pays de la Loire qui peine et peinera sans doute longtemps à se forger une identité forte-, mais sur quelques pages, l'auteur fait plus dans le guide touristique, la description dithyrambique au risque de saouler le lecteur. Il faut qu'il arrête sinon, la Bretagne va être envahie de hordes d'Allemands et de Parisiens tous les étés... Plus sérieusement, ce qui est un peu agaçant, c'est que sur deux ou trois pages, il aligne chiffres de pluviométrie, d'ensoleillement,... histoire de bien montrer que le Golfe du Morbihan c'est la côte d'Azur bretonne, c'est long, assez mal fait, pas subtil. Tout comme dans d'autres domaines, certains dialogues, ou répliques attendus, pas finauds :
"- Oui, nous serions dans un polar, ce serait le moment où...
- Nous ne sommes pas dans un polar, Le Ber." (p.271)
De grosses ficelles donc pour un polar qui tourne en rond pendant toute sa première partie autour des paludiers indépendants de Guérande, de la coopérative qui en regroupe d'autres, de la société Le Sel qui veut tout racheter et tout contrôler (par contre, vous ressortirez de ce bouquin avec un exposé complet sur le sel de Guérande, le meilleur du monde, évidemment, mais là, il a raison JL Bannalec). Là aussi, où le temps ne s'écoule pas au même rythme que dans les villes, le sel n'étant récolté -et non produit- que grâce à l'action du vent et du soleil, le profit, les magouilles, les jalousies sont parvenues à entrer. Les commissaires Dupin et Rose n'avancent pas, mais la balade est belle, j'aime beaucoup Guérande, Le Croisic toute cette côte sauvage et puis aussi le Golfe du Morbihan ; la prochaine fois que j'y vais j'emporte ce livre, il me servira de guide, le commissaire Dupin a de bonnes adresses de restaurants.
Pendant qu'on se balade, l'enquête piétine et Dupin trépigne obligé qu'il est de seconder la commissaire Rose au demeurant fort efficace et au courant de tout. Puis, enfin, lorsque Dupin retrouve sa méthode : "Il passait chaque élément de l'enquête en revue et le combinait avec des informations nouvelles. Cette manière de laisser son esprit former librement des associations d'idées avait toujours porté ses fruits, et il défiait quiconque de trouver meilleure méthode pour arriver à un résultat cohérent. Il suffisait de persévérer, de fouiller chaque détail, partout, sans cesse." (p.285), tout s'emballe et le final prend une autre tournure, une autre dimension. Reste que ce polar est un poil pèpère, que je le conseille parce qu'il est finalement plutôt très agréable mais si vous aimez l'adrénaline, vous faire peur en lisant, les trépidations, les rebondissements, les courses-poursuites, le sang qui gicle, les autopsies en direct, les descriptions de cadavres, le suspens haletant quitte à se faire du mal, eh bien ce polar n'est pas pour vous, ou alors si, pour vous reposer entre deux thrillers éprouvants.