C’est une collection que l’on scrute avec beaucoup d’attention chez Lettres it be que celle proposée en littérature étrangère chez Buchet-Chastel. Après avoir déniché un trésor comme Bariloche d’Andrés Neuman dont nous vous parlions il y a quelques mois, il y a fort à parier que les éditeurs de cette collection réitéreront tôt ou tard cette performance, celle de faire vivre dans l’Hexagone un texte hors du commun nous arrivant de bien au-delà de nos frontières. Et si c’était avec Made in Trenton, le premier roman du journaliste et traducteur américain Tadzio Koelb ?
La bande-annonce
New Jersey, 1946. Alors que le monde sort tout juste des horreurs de la guerre, travailler dans l’industrie florissante de Trenton est une des clés de l’émancipation pour les classes populaires de la côte est des États-Unis. Le rêve américain fonctionne à plein, et le mystérieux Abe Kunstler, nouveau venu à l’usine, semble déterminé à en tirer parti. Travailleur obstiné, bon camarade, buveur émérite, Abe est l’archétype du col bleu : sauf qu’Abe est un mirage, un imposteur qui cache un terrible secret.
De l’après-guerre au Vietnam, l’histoire de Kunstler nous montre combien ce rêve américain est une machine implacable qui broie tous ceux qui ne sont pas nés dans la bonne classe, le bon corps, la bonne peau.
Confronté à une société américaine au conformisme impitoyable, empêtré dans une vie de mensonges et menacé de voir son secret révélé, jusqu’où Abe Kunstler sera-t-il prêt à aller pour préserver l’existence qu’il a tenté de se forger ?
L’avis de Lettres it be
Une existence construite sur le terrain mouvant d’une identité bafouée, c’est le point de départ et d’arrivée du premier roman d’un journaliste américain bien connu pour les lecteurs fidèles du New York Times ou bien du Times Literary Supplement. Tadzio Koelb, c’est son nom, propose avec Made in Trenton un récit de près de 250 pages, récit qui nous immerge dans une société qui refleurit après le chaos outre-Atlantique, qui retrouve la lumière après l’obscurité. Mais dans cette société américaine du possible où les cheminées fument comme jamais auparavant et où les industries se multiplient au rythme des tiroir-caisse, les existences se fracassent alors que le paraître en société commence timidement à pointer le bout de son nez. Ouvrier modèle, collègue fidèle, mari attentionné… Où est la faille ?
Un énième premier roman au cœur d’une rentrée littéraire qui en aura fait sa grande force avec près d’une centaine de livres du genre publiés (94 exactement), une première depuis bientôt dix ans. Mais cette fois, ce Made in Trenton se démarque par une maturité certaine, un sens du phrasé qui fait vivre à chaque page l’industrie américaine post-Seconde Guerre mondiale, et la société qui en découle. Tadzio Koelb, fort de sa grande expérience journalistique, fait vivre un récit globalement sombre en plein cœur d’une société et d’une époque où tout semblait encore possible, y compris le pire.
Retrouvez la chronique en intégralité sur Lettres it be : https://www.lettres-it-be.fr/critiques-de-romans/auteurs-de-k-%C3%A0-o/made-in-trenton-de-tadzio-koelb/