Mangue amère
7.4
Mangue amère

livre de Bulbul Sharma (2009)

Mangue amère est un recueil d'histoires, plus que de nouvelles proprement dites, racontées par des femmes lors de la préparation d'un repas rituel consacré à l'anniversaire de la mort d'un de leurs parents, Bhanurai Jog. Certaines de ces femmes sont jeunes, mais pour l'essentiel elles sont d'âge mûr. Certaines d'entre elles sont issues de familles aisées, voire riches, certaines sont de familles pauvres. Elles ont été mariées ou pas, elles n'ont connu que l'Inde ou ont émigré en Grande-Bretagne. Mais toutes vivent dans le carcan étroit de la société indienne. Et ces histoires, qu'elles se racontent d'année en année, sont le témoignage de leur difficulté à vivre leur vie de femme.


L'intérêt majeur de ce livre, c'est donc l'appréhension de la société indienne et hindoue, de ses codes et de la place qu'elle accorde aux femmes. On s'en doute, le tout n'est pas bien gai et les histoires racontées sont baignées de mélancolie, voire de désespoir. Rien qui puisse laisser entrevoir un avenir plus souriant pour ces femmes : Bulbul Sharma se montre résolument pessimiste. Et c'est en partie là que le bât blesse, parce qu'on la sent finalement elle-même enfermée dans ces règles de la société indienne dont elle n'imagine pas pouvoir sortir.


Je trouve également que ce recueil ressemble beaucoup à d'autres : évidemment, j'ai pensé à Mariage arrangé de Chitra Banerjee Divakaruni, qui traite exactement du même thème, et que j'ai trouvé franchement meilleur. Mais aussi à Gens de Taipei et à d'autres recueil de nouvelles asiatiques qui prennent pour thématique la société d'un pays à un moment donné. Donc, pas beaucoup d'originalité dans le cas de Mangue amère, qui manque un peu, à mon goût, de subtilité ou d'émotion dans son étude de la place de la femme indienne au sein de la famille et de la société. Je suis restée sur ma faim.


L'idée d’insérer les neuf histoires dans le cadre plus large de la préparation du repas, un peu à la façon des Mille et une nuits, m'avait paru intéressante. Chaque histoire est en effet précédée d'un chiffre de un à neuf, en tête de chapitre, et de la présentation d'une des femmes, en train d'éplucher ceci ou d'émincer cela, et qui prend la parole pour s'apprêter à raconter son histoire (ou celle d'une femme qu'elle a connue). Viennent ensuite le titre, comme L'histoire de Jamini, l'amie de Badibua, et l'histoire proprement dite. Mais pas de chance, Bulbul Sharma ne s'est pas montrée très rigoureuse, et c'est ainsi qu'on ne sait pas d'où sort ni qui raconte l'histoire Cinq, qui ne porte d'ailleurs pas de titre, que l'histoire du défunt Banurhai Jog, qui logiquement devrait clore le recueil, se retrouve en position numéro huit, et que le tout se termine avec l'histoire Neuf, qui fait l'effet d'un cheveu sur la soupe. À la fin du livre, le cadre initial a disparu, exit les protagonistes de départ et la préparation du repas. Ce genre de choses, qui révèle un sérieux manque de rigueur dans l'écriture, m'agace prodigieusement ; d'autant plus que, de cette façon, Bulbul Sharma gâche ce qu'il y avait de plus original dans son livre.


Cependant, ça se lit vite et plutôt agréablement dans l'ensemble. Disons que c'est une bonne introduction sur le sujet de la place des femmes dans la société indienne, sans plus. Je m'essaierai tout de même à d'autres livres de Bulbul Sharma ; nous verrons bien si je les trouverai meilleurs.

Cthulie-la-Mignonne
7

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Créée

le 14 févr. 2016

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