On peut concevoir "le Quatuor de Jérusalem" comme une tapisserie, Whittemore étant à la Méditérannée orientale ce que la reine Mathilde est à la Manche.

Comme la tapisserie de Bayeux décrit et évoque, parfois de manière hermétique, des événements et des personnages historiques (petits et grands, connus et méconnus, importants et anecdotiques), Whittemore bâtit au fil de ces 4 tomes une tapisserie littéraire.

S'appuyant sur des faits et des personnages qui parlent à l'inconscient collectif (charge de la brigade légère ; massacre de Smyrne ; occupation de Jérusalem par les templiers ; évacuation des îles Aran ; révolte iralndaise ; découverte des sources du Nil ; juif errant ; ...), il leur mélange des événements ou figures anecdotiques (réelles ou pas ?) qui prennent corps, acquièrent substance, et offre au lecteur l'accès à un paysage méconnu.

Dans les deux premiers, Whittemore donne le sentiment de tendre des duites (fils de trame) qui serviront de support à la tapisserie ; ces fils sont les faits historiques, les lieux et les personnages qui portent l'oeuvre, qui lui donnent à la fois sa solidité et ses couleurs de base.

Puis, dans Ombres sur le Nil, le travail de l'auteur change.
Il tire un fil (fil de chaîne), perpendiculaire aux précédents, apportant détails et nuances pour donner pleinement vie à sa tapisserie, en posant me, semble-t-il, des questions essentielles :
- comment connaître la réalité d'un être humain, apprécier la valeur (morale ?) de sa vie, apporter le jugement de l'histoire et de ses pairs à la seule aune des marques qu'il aura laissé dans la trame de l'espace-temps ?
- la somme des événements qu'il aura induits, des rencontres qu'il aura faites, des liens qu'il aura noués (encore la tapisserie) permet-elle (suffit-elle ?) à le décrire ?
- est-ce que l'observation des conséquences d'une vie permet de connaître sa contribution à des nobles fins.

Ce fil, aux couleurs de deux des personnages principaux du quatuor, Stern et de Joe, entrecroise la trame de l'histoire et de la géographie de cet orient compliqué pour produire un motif simple qui nous interroge sur ce qu'est l'humanité (au sens humaniste du terme) et sur la difficulté à distinguer l'homme de la bête (renvoi à la tapisserie de l'Apocalypse ?).
LamRona
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le 30 oct. 2012

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