Pékin, une révolution estudiantine sévit avec une ampleur incontrôlable. Ayamei, jeune étudiante, déambule dans les rues ensanglantées, il lui faut fuir de la place Tian an men et partir vers la montagne. Zhao, jeune militaire, doit la traquer, par la force des choses, il va être amené à revivre certains des souvenirs de la jeune fille et se remémorer les siens.


Shan Sa, née à Pékin, est arrivée à Paris, en 1990, afin de poursuivre ses études en philosophie et histoire, et déjà écrivaine de poèmes. Porte de la Paix céleste est son premier roman, par lequel elle reçut le prix Goncourt du premier roman, le prix de la Vocation et le prix du Nouvel An chinois, l’ensemble en une année, celle de 1998. Elle fut la plus jeune membre de l’Association des écrivains de Pékin. L’auteure, francophone donc, a toujours, dans tous ses livres, gardé un décor ancré en Chine. L’époque elle, varie. Shan Sa a ça d’incroyable et d’invariable, que, quel que soit son livre, son approche sensible, tristement réaliste et poétique de l’histoire nous fait prendre part aux évènements, comme si, non pas qu’on les aurait intégrés intellectuellement, mais vécus, ressentis. Ce qui rejoint la philosophie. Car à partir de là, il est intéressant de constater les différents degrés de compréhension de chacun.
En plus d’être écrivaine, elle est également peintre et photographe. Élément remarquable à la façon qu’elle a de décrire les choses. « La neige volait dans l’air comme font les pétales des fleurs de pommiers. »


L’histoire alterne par chapitre du point de vue des deux principaux personnages. On explore alors les deux réalités. On identifie les idéologies dans lesquels ils ont grandi. « Un soldat perd une famille restreinte, mais il en gagne une plus vaste : le peuple est son père, les soldats sont ses frères. » Les deux ressassent leur passé. Et nous autres lecteurs en sommes témoins. Témoins de l’impuissance d’enfants face à des adultes aux opinions arrêtés et tétanisés, incapables d’agir par leurs propres principes. « Nous évitions soigneusement les conversations sérieuses qui risquaient de mal tourner et de trahir nos sentiments. Ma mère ne quittait pas son air résigné. Mon père avait cette expression sévère et froide qui m’a toujours tenue à distance. » Le jeune qui ne peut rien comprendre à la vie sans suivre un chemin et des règles strictes et prédéfinies. Le livre parle, en fait, pleinement des relations qui peuvent exister entre êtres humains. De certitudes que certains peuvent avoir et qu’ils estiment primordial d’imposer à d’autres. Jamais motivées de mauvaises intentions. Exactement comme l’enfer. Et il s’agit justement de ça, l’enfer que nous pouvons nous faire vivre dû à de simples sentiments de peurs pour des situations, souvent justifiés à mauvais titres, d’inconvenances. Et le tout, principalement résultant d’incompréhensions. « Notre bonheur était si grave que j’aimerais mourir sur-le-champ. »


Dans ce livre, tous les mots résonnent. Tout parle. Il s’exprime à notre place. Une fois lu, il nous libère d'un poids, parce que l’on se dit, qu’aussi horrible puisse-t-elle être ou paraître, « En réalité, la vie n’offre ni le bien ni le mal. Le bonheur est un fruit qu’on cultive et récolte dans son âme. On ne peut pas le recevoir de l’extérieur. »


Judith K. N. Schmidt


SA, Shan. Porte de la Paix céleste. Paris : Gallimard, 1998. (Collection folio, n°3316). 146 p. ISBN 2-07-040746-2

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le 14 avr. 2019

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