C'est la lutte finale...

"On peut faire de bons romans qui traitent de la mondialisation et des délocalisations d'entreprise ?" s'étonne l'écrivain français.
"Bien sûr que oui", répond l'auteur gallois.
_ Comment qu'on fait ? Normalement, on prend un personnage en état d'apesanteur social dont l'épaisseur est équivalente à celle du papier à cigarette et qui passe son temps à se masturber la tête sur son moi profond.
_ Ben là, on fait l'inverse. Déjà, notre héros est un ouvrier.
_ Ca existe encore les ouvriers ?
_ Oui, oui...
_ Qu'est-ce qui peut bien lui arriver ?
_ Son entreprise va être délocalisée et il est bien décidé à lutter contre. Alors, il décide, soutenu par ses copains, de s'enterrer jusqu'à ce qu'on écoute ce que ceux qui vont perdre leur emploi ont à dire.
_ Parce qu'ils ont des choses à dire en plus ?
_ Oui, et ils ont une famille, une histoire personnelle qui s'écrit dans un cadre de désindustrialisation des économies occidentales et de déstabilisation des sociabilités populaires.
_ Si on commence à inscrire les personnages dans un cadre socio-culturel, on s'en sort plus. Manquerait plus qu'il arrête de se poser des questions sur son moi et son rapport à lui-même.
_ Justement. Le héros décide de prendre fait et cause pour une lutte collective. S'il s'interroge sur lui-même, c'est pour mieux comprendre l'évolution d'une société dont il n'est qu'un représentant. Il brise les solitudes individuelles en rappelant au monde que les ouvriers ne sont pas morts et qu'ils se battront pour défendre leur dignité et leur gagne-pain.
_ Dis donc, ça a l'air compliqué ton truc.
_ Non, non. C'est juste que t'as pas l'habitude.
_ En même temps, je passe mon temps à lire C. Angot et F. Beigbeder alors c'est peut-être pas faux.
_ C'est sûr que le style et la profondeur des personnages et du récit risquent de te faire un choc. Mais il faut parfois des chocs pour nous réveiller.