Avec Stoner Road, le roman de Julien Heylbroeck, je continue dans mon petit périple dans les contrées littéraires du « sex, drugs, magic and rock’n’roll » (après Perkeros et Armageddon Rag). C’est un peu un hasard, parce que j’ai acheté le bouquin à l’origine par pur copinage, mais il se trouve que ça tombait pile-poil dans le flux.
Stoner Road, c’est un peu comme son nom l’indique: un bouquin sur les routes et qui parle de stoner rock, mais aussi de l’Amérique profonde, de drogues, de bières (américaines, hein; pas d’enthousiasme, non plus) et dieux aztèques. Et, en général, quand on parle de ce genre de zozos, on peut être certain que ça ne va pas être propre: du sang, de la tripaille, du vomi, de la sueur, du stupre et d’autres sécrétions encore moins recommandables.
Au départ, il y a Josh Gallows, dit « Doc Défonce », un junkie libertaire (gibier de potence, comme son nom l’indique), du genre à ne pas avoir une descente mais plutôt une overdose de sang dans son acide. Il cherche à récupérer sa copine au cours d’un concert clandestin dans le désert, mais quand il arrive, il est trop tard: elle a disparu avec un groupe mexicain légendaire qui traîne une drôle de réputation derrière lui.
Au cours de sa recherche, il va s’apercevoir qu’il y a beaucoup de monde qui disparaît pendant ces concerts et va finir par faire équipe avec un pur redneck du fin fond du bayou, qui lui recherche sa sœur. Ensemble, ils combattent le crime. Ou pas. Surtout pas, en fait.
Stoner Road, c’est une enquête dans les bleds paumés du sud-ouest américain, une frontière, un pôle de marginalité où tout le monde est au minimum bizarre. Comme l’explique l’entrevue en post-face, c’est une histoire entre le road-movie et le buddy-movie, avec un côté Cronenberg dans le fantastique et les jeux sur les corps, les drogues et les perceptions.
Si, dans l’ensemble, j’ai bien aimé Stoner Road pour son intrigue et son ambiance, deux-trois choses auraient pu être mieux vues. Le duo entre Josh le camé et Lee le réac est souvent sympa, mais ce dernier est un peu sous-exploité; au final, il fait plus sidekick que réel partenaire. Et puis la fin est sérieusement bizarre: une grosse ellipse qui m’a donné l’impression d’avoir raté un truc.
Il y a deux-trois scènes qui sont un peu too-much à mon goût (hors rôlisteries, Julien s’est fait connaître pour avoir lancé les TrashEditions), mais en même temps, avec le stoner, ce n’est pas exactement la peine de sortir les gants blancs et les cols amidonnés.
(À ce sujet: évitez – comme je l’ai fait – de lire ce bouquin avec, dans les oreilles, le rock progressif ultra-optimiste de FreddeGredde dans les oreilles. Même si l’album est très bon, la dissonance cognitive est plutôt brutale. Fiez-vous plutôt à la liste d’écoute en fin de bouquin, également dispo sur de multiples plateformes en ligne.)
Tous comptes faits (deux cafés, l’addition), Stoner Road est un chouette roman, qui colle à l’ambiance stoner comme un t-shirt de Kyuss colle à son porteur après deux heures de generator party dans le désert. C’est lourd, c’est hypnotique, ça balance les watts. Oui, la musique aussi.