Il y a de la tragédie grecque dans ce livre.
Une passion amoureuse qui balaie tout sur son passage. La logique, le devoir, la morale, les engagements. Tout ceci nous construit depuis toujours. Soudain les mêmes concepts se réorientent vers un être nouveau entré par inadvertance dans la vie de notre narrateur. Un policier de L.A. qui succombe très volontairement au charme d'un suspect rencontré au hasard d'une enquête sur le meurtre présumé d'un jeune prostitué.
Tout le talent de Philippe Besson est de rendre une intrigue potentiellement banale et improbable, très prenante et captivante. Les chapitres s'enchaînent sans temps mort. L'écriture est brillante comme souvent dans son oeuvre. Il y a un côté fataliste et ineluctable qui donne sans cesse envie de poursuivre la lecture pour voir comment tout cela va finir.
Au commencement, rien ne laisse entendre que notre héros à la vie toute tracée et bien ordonnée va s'engager dans cette voie contradictoire. Une impasse délicieuse où le danger vient de la clandestinité et du double jeu : assouvir une passion au risque de détruire tout le reste. Mais est-ce vraiment une question de choix ?
Page 220 : " en abandonnant (...) j'aurais renié tout ce que nous avions vécu, piétiné tout ce qui nous liait, affirmé : cet amour vaut moins que mon propre sort. Ce n'était pas envisageable. Je ne l'ai pas envisagé".
Si vous n'avez jamais lu Philippe Besson, ce court roman me paraît une entrée en matière tout à fait adaptée. Un très bon livre sur la passion amoureuse. Le thème de l'homosexualité est certes classique chez Besson, par contre ici, il excelle à rendre cela très accessoire dans le contexte plus global de la folie destructrice. Une brillante démonstration de bonne littérature je trouve.