« N’est-il pas grand temps de passer de la gestion des ressources humaines à la gestion humaine des ressources ? » Cette question, directement inspirée des propos de Gaël CHATELAIN, Marc ELSEN, l’auteur de l’essai Vers une évolution du management politique (publié en avril 2017 aux éditions Noctambules) lui rend toute sa pertinence dans le champ choisi pour ses réflexions, l’évolution d’une manière de manager la politique dans un monde qui pousse au développement d’une nouvelle identité collective.
D’entrée de jeu, Marc ELSEN se situe dans sa vie, avec son histoire (lire la 4e de couverture reprise en infos à propos de ce livre), rappelant que toute vie est aussi une histoire … propos que, personnellement, j’ai envie de prolonger en disant que toute vie est une histoire qui s’inscrit et éclaire l’Histoire, ici la facette de l’Histoire qui met en lumière le passé, gère le présent et devrait générer le futur de la gestion de la res publica et du lien indissociable qui trame - ou non -, même si très différencié dans le temps et selon les citoyens (politiques ou autres), les fondements d’une gestion collective, participative et partenariale appelée à formuler et mettre en œuvre des réponses immédiates aux préoccupations de l’ensemble et, tout en même temps, à se donner le temps d’une réflexion urgente sur l’essentiel à mettre en place au service du bien commun de tous, chacun étant unique, différent et semblable aux autres.
La réflexion proposée par l’auteur devrait permettre de rencontrer la mise en garde de Edgar MORIN qui disait : « A force de sacrifier l’essentiel à l’urgence, on finit par oublier l’urgence de l’essentiel ». Et ce n’est un secret pour personne que le monde des politiques est souvent régi par l’urgence. Celle de faire tomber dans son escarcelle la masse critique d’adhérents (fut-elle masse silencieuse) pour, sans pour autant gagner sa confiance, pouvoir, dans un rapport de force favorable, faire passer les décisions qui, à défaut parfois de répondre aux besoins profonds du collectif des citoyens, se revêtent, à tout le moins, d’une présentation qui peut plaire aux individus et leur donner l’image qu’il existe encore des hommes politiques vrais, forts et purs capables de défendre le peuple … même si les décisions prises relèvent parfois plus du service des intérêts particuliers de quelques- uns, voire des seuls politiques qui y trouvent avant tout leurs comptes et une quasi-certitude d’être réélus au suffrage suivant.
L’ouvrage de Marc ELSEN s’appuie sur une écriture lisible par tous, structurée par la mise en chapitres courts, souvent interpellant le lecteur sous forme de questions qui en clarifient l’objet. La réflexion menée, en toute humilité, sans arrogance ni fausse-modestie est, en outre, particulièrement bien référencée. La bibliographie offerte en fin d’ouvrage est un cadeau pour qui veut prolonger par des lectures pertinentes la réflexion ici proposée.
Si une des seules affirmations péremptoires de l’auteur – si non la seule ! – est qu’il faut en finir avec le ‘Tout au politique’, tout pouvoir d’agir, toute décision de la gestion publique, toute responsabilité … ce qui, soit dit en passant, permettra au peuple de désaimer de plus en plus le monde politique lorsqu’il estimera, à tort ou à raison, ne pas avoir été suffisamment entendu et reconnu dans ses besoins réels ou fantasmés. Au terme d’heureux détours par ce qui constitue les valeurs de l’auteur, son histoire, ses bases de vie et les leviers expérimentés dont il dispose, le coeur de l’ouvrage (le mot cœur est préféré au mot centre parce qu’il dit d’où procède la réflexion) le cœur donc est, comme le dit plus d’une fois l’auteur, un essai, une ouverture à la réflexion, la formulation de pistes pouvant conduire à un changement, pour un mieux, du management du monde politique. Cet essai ne se prétend pas une réponse toute faite et immédiate à ce qui a lieu d’être mis en place. Non, bien plus subtilement, il montre et illustre (plutôt que de démontrer à force d’argutie) l’importance du collectif, de l’associatif et du lien de partenariat qui unit déjà et devra unir encore davantage la société et les politiques qui restent, ils l’oublient parfois, des citoyens comme le lecteur lambda. Il s’appuie sur la nécessité de construire un partenariat ‘tous gagnants’ qui permette la mise en œuvre du nécessaire au bien commun, à l’intérêt général, seule réponse à moyen terme pouvant contrer les populismes qui fleurissent un peu partout dans nos sociétés contemporaines.
Marc ELSEN, un auteur qui n’a pas vocation à faire tourner les rotatives pour se faire un nom politique, non ! Marc ELSEN, un politique citoyen, tout autant qu'un citoyen engagé politiquement qui prend racine dans son histoire, ses engagements de jeunesse, son métier au service de l’Education, son engagement humaniste dans une politique qui se déshumanise trop souvent… tout cela pour poursuivre un engagement de service au citoyen, tous hommes ou femmes, attachés à leur unicité, enrichis de la rencontre de l’autre, unique, lui aussi, si différent et pourtant semblable. Marc ELSEN, un essayiste au service de l’humanisme.