Abécédaire des parapluies de Cherbourg

Résumé : Radiographie de l'amour qui passe, manifeste punk déguisé en chanson de variétés, les Parapluies de Cherbourg cachent bien leur jeu. Avec eux, Jacques Demy invente le genre du film de regrets, dont les héros vivent leur vie au conditionnel passé.Laurent Jullier est l'auteur de Hollywood et la difficulté d'aimer, aux éditions Stock, Prix du meilleur livre du Syndicat Français de la Critique de Cinéma en 2004. Ciné-Création est une collection d'essais sur le cinémaExtrait du livre :CheveluresLe langage capillaire, sabir de chignons, de neigeuses et de fichus, double les tête-à-tête amoureux des Parapluies. Lorsqu'elle apparaît pour la première fois, Geneviève a certes retenu ses cheveux comme on retient ses élans, mais elle le déplore : s'ils sont noués, c'est de noir. Un peu plus tard le funèbre élastique est devenu doré, soulignant au lieu de la déplorer, la domestication consentie des boucles d'or. Madeleine, de son côté, pratique la stratégie de l'effeuilleuse (Pin-up). La première fois que nous la voyons elle ôte son fichu pour dévoiler «des cheveux qui tombent comme le soir» (Ferré) - un geste qu'elle reproduira par la suite chaque fois qu'elle rencontrera Guy. Hélas ! il s'en moque, quand bien même elle ôterait tout le reste. A la fin du film, cependant, voici les deux rivales à égalité. Fini de rire. Adieu blondes queues, adieu noires volutes, de savants échafaudages les ont remplacées, choucroutes laquées comme des barbes à papa, semblables à celle que porte Sheila après qu'elle a défait ses couettes de L'école est finie.«Quand vous aurez fini de me coiffer j'aurai fini de vous haïr» : tout Geneviève tient dans ce vers de Saint-John Perse. Elle a compris que c'était pour son bien. Elle n'en veut plus à sa mère, puisque ses manies sont désormais les siennes -Madame Emery qui, même en p?